Aphorismes de Nouhad : La sagesse monte le sage sur ses esses.

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couv-nouhad La sagesse aurait-elle des esses ? Certes, l?aphorisme peut para?tre ?trange et saugrenu, ? premi?re vue, vu que la sagesse n?a pas d?esses, mais ? y regarder de plus pr?s, on ne peut ne pas remarquer que??le mot ??sagesse?? se compose de deux mots?: ??sage ? et ??esse?, que le mot ??esse?? lui-m?me, se compose de deux ??SS ? -ce qui nous ram?ne au pluriel ? ses esses??- et se prononce ?galement ??S??. Le jeu de mots, porte, entre autres, sur trois points?: le premier, ??sagesse?? et ??esse??, le deuxi?me, ??esse?? et ??S??, et le troisi?me, ??esses?? et ??SS??. Comme on le sait tous -ou comme le dictionnaire la d?finit- une esse est un crochet sous forme de ??S??, donc, le sens, la graphie et la phonie concordent parfaitement et s?accordent absolument ? donner la m?me signification ? l?aphorisme, une signification secr?te que le mot ??sagesse?? livre lui-m?me de l?int?rieur, comme une ossature qui laisserait voir sa moelle, une interpr?tation que la composition, v?ritable histoire du mot, impose, car qui veut raconter l?histoire d?un mot, n?a qu?? fid?lement le fr?quenter, longuement l??couter, pour pouvoir authentiquement et sinc?rement rapporter. Si on part de la forme, le d?coupage ou le d?montage du mot sagesse aurait d?j? une histoire et un sens qu?il r?v?le ? qui veut l?entendre, puisque le mot ??sage??, mont? sur ??esse?? ou les deux ??SS??, sage+ss ou sage+esse, donne le terme ??sagesse?? et c?est ce qui conf?re, ? l?autocitation, de la cr?dibilit? et de l?autorit? ?tant donn? que la signification ?mane de sa structure-m?me, de son architecture et de son organisation, et non du simple prisme de la subjectivit?. De fait, si cette pens?e est valable sur le plan du contenant, elle n'en est pas moins vraie sur le plan du contenu, puisque l'esse, ici, n'est qu'une m?taphore, signalant l'?l?vation (par un crochet figur?) du sage au-dessus de ses semblables, gr?ce ? son m?rite, ? son savoir et ? sa philosophie, qui le distinguent des autres, le placent au-dessus d?eux et lui valent honneurs, estime et consid?ration. Comme on ne manquerait pas de le remarquer, cet aphorisme, bien vrai sur les deux plans : forme et fond, donne plus d'exhaustivit? et de compl?tude ? la signification de la citation dont le jeu de mots, nullement superficiel, accentue, au contraire, la profondeur du sens et favorise son ancrage, par la cr?ation de sa propre musicalit?. Cette technique d??criture appel?e mot sur mot, est l'une des techniques apport?es par le livre ?ponyme. Mais loin de tout structuralisme, m?me si elle se base sur la structure du mot, qui s?offre volontiers aux regards de ses observateurs, offrant ainsi avec g?n?rosit? ses multiples connotations -et cr?ant ainsi une subjectivit? impos?e- cette technique s?appuie sur la solution de l??nigme du mot par ses propositions, d?gag?es ? m?me sa charpente et ?tay?es par sa construction et sa disposition interne et externe. Quand l?abstrait rejoint le concret, on ne peut cens?ment parler de co?ncidence ni d?avoir forc? le sens, en tout cas, on ne peut rester insensible ? une adresse et ? une apostrophe aussi ?videntes, ? l?invitation d?un signe qui nous appelle aussi concr?tement et aussi nettement et qui nous enjoint d?en d?coder les incontournables missives. L?arrangement et l?agencement des diff?rentes parties ne peut ?tre al?atoire donc s?impose au destinataire ou au narrataire, puisqu?il s?agit d?une histoire narr?e, ou plut?t susurr?e, comme un argument d?autorit? dont le sens s?articule autour d?une forme observable et analysable, dans son ordre et sa contexture?; la constitution de cet ensemble mat?riel et spatial ne peut ?tre n?glig?e ou rejet?e, c?est une signification compl?te qui s?articule sous nos yeux, appelant tous nos sens ? communiquer avec les diverses acceptions et synergies du mot. C?est une structure programm?e depuis toujours pour cette fin mais qui demeure ? la port?e du chercheur daignant pr?ter attention ? ses signes, ? ses codes, ? ses formations, ? son ?volution et ? ses d?formations. Malgr? la densit? de ses messages due, d?une part, ? la paucit? de ses ?l?ments et, d?autre part, ? la multiplicit? de ses images et de ses messages, il est des indices qui ne trompent pas dans un mot, car ? la structure de surface et de forme, correspond une structure interne percutante, divulgu?e et annonc?e par le tintement de sa musicalit?, par le retentissement de sa voix, telle une cloche ? laquelle on ne peut r?sister, ? laquelle on ne peut que succomber, un appel c?leste puissant auquel on ne peut que r?pondre par la soumission, un mouvement coulant parfaitement structur? et divinement organis?. Prenons d?autres exemples pour ?lucider cet aspect?:
  • La moiti? de l??l?gance est dans la fragrance.?(Le fond ?pouse la forme, au niveau de la forme?: ??gance??, qui est la moiti? de l??l?gance fait partie des lettres de ??fragrance??, au niveau du sens?: on ne peut concevoir une ?l?gance sans fragrance, car les relents comptent beaucoup dans l??l?gance d?une personne.)
  • Personne n?est personne s?il ne perce et ne sonne.?(Forme?: ??perce?? et ??sonne?? font partie de la composition et de la prononciation de ??personne???; fond?: personne n?est digne de ce nom, s?il ne sort du lot pour s?exprimer et faire entendre le son de sa cloche.)
  • Le charisme est un m?lange de charme et de prisme, sans paix. (Disposition?: ??charisme?? se compose de ??charme ? et ??prisme??, sans la lettre???P???; interpr?tation?: le charisme est un m?lange de magie et d?ensorcellement, exerc?s par le charismatique et de r?alit? d?form?e par le prisme de la passion pour une id?e ou un principe, ce qui peut fausser la v?rit? et atteindre le fanatisme, des fois. De ce fait, le charismatique et ses suiveurs ne peuvent que mener une vie mouvement?e donc, sans paix.)
Une signification aussi parfaitement homog?ne ne peut ?tre aveugle, la forme n??tant que l??corce qui cache et prot?ge le sens de toute interpr?tation ind?sirable ou fausse. Cette excellente corr?lation entre la position du mot vis-?-vis du langage et de la vie, et sa disposition, ne peut ?tre l?effet du hasard ni passer inaper?ue, c?est ce qui la rend digne d??tude et d?int?r?t car c?est le mot lui-m?me qui agit sur l?usager et d?finit la mani?re d?envisager son ensemble, dans une intelligence collective et coh?sive, en fonction des relations qu?il nous pr?sente clairement, sans ambig?it? ni confusion, professant ses opinions et nous enseignant ses sagesses?; c?est une cl? dont il nous munit afin de nous aider ? sonder ses myst?res, ? d?crypter les pr?ceptes qu?il d?clare et les principes qu?il pr?ne. Le groupement des diff?rentes parties -du reste, indissociables- permet la coh?rence, la coh?sion et l?encha?nement rationnel de cet ensemble, constituant parall?lement, son rythme et sa participation ? la musique du monde, et d?limitant la nature de ses contacts, les connexions qu?il entretient les ramages qu?il tisse et les prises de position qu?il fixe. C?est un syst?me complexe et durable provenant du fin fond de l?Histoire et des confins du mot et constituant, ? la fois, son r?seau et son armature, en en faisant une structure fonctionnelle, utile presque infaillible. La combinaison essentielle des ?l?ments constitutifs de l?entit? mot, impose pour sa lecture, la production et l??change de ses innombrables messages, une lecture nouvelle susceptible de g?n?rer d?autres sens, de faire preuve d?originalit? et de nous sortir des lieux communs, des st?r?otypes, des clich?s et des pr?jug?s sur le langage?; c?est le m?talangage que le langage offre pour se faire ?tudier et se faire conna?tre, rehaussant sa cr?ativit? et poussant sans ?quivoque ? sa r?invention. Donc oui, effectivement, la sagesse a plus d?une esse -ce qui est vrai, d?ailleurs, formellement et s?mantiquement- des esses sur lesquelles, elle ne monte que les sages, ses serviteurs, qu?elle sert ? son tour, c?est r?ciproque et logique. Cela souligne l?interaction, l?activit? et le dynamisme de la sagesse, qui ne demeure nullement passive aux services -quoi que gratuits- qu?on lui rend et que fatalement, on ?cope des r?sultats de sa sagesse et de sa folie, en somme, de ses convictions, utilis?es ? bon ou ? mauvais escient. La Sagesse serait alors cette f?e, ? toutes mains, ?levant, sans conteste, le sage qui l??l?ve, ? un degr? sup?rieur ? la normale, humainement, socialement, historiquement, moralement, intellectuellement et surtout, sentimentalement et ?motionnellement, faisant de lui un sage ?lev? ou abaiss?, et de sa philosophie, une sagesse, mont?e ou d?mont?e.