Coronavirus : le maire d’opposition d'Istanbul réclame un confinement total

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Le maire d'opposition d'Istanbul a réclamé jeudi un confinement total de la plus grande ville de Turquie pour empêcher une hécatombe liée au nouveau coronavirus, déplorant un manque de coordination avec le président Recep Tayyip Erdogan.

"En me basant sur ce qui est fait ailleurs dans le monde, je suis convaincu qu'un confinement total de deux ou trois semaines à Istanbul permettra de réduire le nombre de cas et (...) de morts", a déclaré Ekrem Imamoglu dans un entretien avec l'AFP.

Istanbul, capitale économique de Turquie qui compte quelque 16 millions d'habitants, est l'épicentre de l'épidémie de nouveau coronavirus dans le pays.

Mercredi, le ministre de la Santé avait indiqué que 117 personnes malades du Covid-19 étaient décédées à Istanbul et que 60% des cas enregistrés en Turquie l'avaient été dans cette ville.

Selon le dernier bilan officiel publié jeudi soir, plus de 18.000 cas de coronavirus ont été recensés en Turquie, dont 356 mortels.  

En dépit de la progression de plus en plus rapide du nombre de personnes infectées ces derniers jours en Turquie, le gouvernement n'a pour l'instant pas annoncé de confinement généralisé.

A l'heure actuelle, seuls les plus de 65 ans et les personnes atteintes de maladies chroniques ont été sommées de rester chez elles, sous peine d'amende. Les manifestations et rassemblements ont en outre été interdits et les restaurants, cafés et autres espaces collectifs fermés.

Même en l'absence de confinement obligatoire, de nombreux habitants d'Istanbul se sont cloîtrés.

L'emblématique place Taksim, habituellement noire de monde, est devenue le terrain de jeu des pigeons et des chiens errants. Et les rares passants qui se risquent sur l'avenue Istiklal, les "Champs Elysées d'Istanbul", pressent le pas en rasant les murs.

Mais pour M. Imamoglu, ce n'est pas suffisant. "Même si seulement 15% de la population sort, on arrive vite à deux millions de personnes (...) Cela pose potentiellement un risque sérieux", souligne Ekrem Imamoglu. 

Le gouvernent a prévenu que des "mesures plus strictes" pourraient être prises si besoin, sans évoquer de confinement total.

"Toutes les mesures qui ont été prises sont bonnes. Mais elles auraient dû être prises avant", estime M. Imamoglu. "Ce qu'on a pu voir ailleurs, c'est que plus les mesures sont prises tôt, meilleurs sont les résultats. Dire +attendons un peu+, c'est ne pas comprendre cette maladie", ajoute-t-il.

"Pas de réponse" 

M. Imamoglu indique qu'il a transmis au gouvernement son appel à mettre en place un confinement --une prérogative régalienne--, mais qu'il n'a "pas reçu de réponse" à ce jour.

Issu du principal parti d'opposition, le CHP (social-démocrate), M. Imamoglu a été élu maire d'Istanbul l'an dernier, une fonction qui l'a propulsé au rang de principal opposant du président Erdogan.

Au lieu de donner lieu à une union sacrée, le défi posé par le SARS-CoV-2 a renforcé la rivalité entre les deux responsables, accentuant le risque d'un manque de coordination pour gérer l'épidémie à Istanbul.

Ainsi, en lançant lundi un appel aux dons auprès de la population pour combattre le nouveau coronavirus, M. Erdogan a fait interdire une cagnotte créée par la municipalité d'Istanbul.

Depuis plusieurs jours, le chef de l'Etat turc a multiplié les attaques contre le maire d'Istanbul, qu'il accuse de "se prendre pour un Etat dans l'Etat".

Nous ne laisserons pas le champ libre à ceux qui cherchent la division plutôt que la solidarité", a encore lancé jeudi M. Erdogan, s'en prenant à ceux qui "essaient de dynamiter" les efforts du gouvernement contre l'épidémie.

Critiquant l'annulation de la cagnotte municipale, M. Imamoglu explique qu'il "fait de son mieux" pour améliorer la coordination avec le pouvoir central à Ankara.

"La situation actuelle m'attriste. Nous avons l'obligation de nous coordonner avec toutes les institutions (...) Nous devons travailler ensemble", a-t-il déclaré.

Pour lui, la seule façon de gérer la situation est d'interdire à tout le monde de sortir, "à l'exception de ceux dont le travail est nécessaire".

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