tn

5437685854_d630fceaff_b-

1
Partager :
couv-tn Il ressort de ce r?cit que ce qui est appel? ??r?volution?? n?a pas encore accouch? d?un futur ?panoui, serein, rassurant C'est Tunis, la capitale, ou le pays du jasmin, Tunisie. Deux douces consonnes qui t?moignent d?une grande passion. C'est ce que dit le titre du r?cit original d?un retour de Dora Latiri au pays apr?s un exil volontaire: ??Un amour de tn?? auquel l?auteure ajoute un sous titre ??Carnet photographique d'un retour au pays natal apr?s la r?volution??. En ces temps o? d?nigrer son pays est devenu un peu partout un d?cevant et honteux ?sport national, il est rare de trouver des r?cits pudiques dont l?intensit? ?se r?sumerait en si peu de lettres (2) et en si peu de pages (113). Rare ?mais surtout ?r?confortant. Pudeur cisel?e en des mots justes qui racontent l?enfance fleurie, l?adolescence flagell?e ? cause ?d?amours interdites, le d?c?s ?de la m?re, le d?sespoir du p?re, l?absence, l?exil. ?Une trentaine de photographies ?en noir et blanc que la photographe Dora propose ?aux ?commentaires ?mouvants et ?lucides de Dora, l?auteure. Parce qu?il y a plusieurs Dora. L?identit? ?cartel?e, martel?e, diverse, est ainsi sereinement ?voqu?e ?dans le dernier fragment intitul? Sa?d, ?crit en trois langues (les langues de Dora) (arabe?? fran?ais ? anglais). ?Le texte en fran?ais dit : ??j?ai l?impression parfois d??tre un flot de courants multiples. Je pr?f?re cela ? l?id?e d?un moi solide, identit? ?? laquelle tant d?entre nous accordent tant d?importance??. ?Il y a surtout la Dora-paradoxe qui dans ce flot de courants qui entra?ne son moi bouleverse et percute ?ses ?certitudes. Comment une enseignante aussi ferme dans son engagement en faveur de l?enseignement de l?arabe moderne, qui n?h?sita pas ? pol?miquer avec fermet? avec les tenants de la primaut? du dialectal ? l?INALCO, a-t-elle pu dans ce beau r?cit utiliser cette langue, l?Arabizi ? Les mots de la langue maternelle qui parfois surgissent ainsi dans un r?cit en langue fran?aise, se jouant de la vigilance de l?auteur, est une panac?e de ce genre d??crits. A Khatibi en a parl? brillamment. ?Le d?bat est clos maintenant. C?est ?bien la m?moire qui ? partir de toutes les madeleines que le pr?sent impose qui ?convoque ?en langue maternelle les souvenirs li?s ? l?attachement au ?pays natal. Mais quid de l?Arabizi ? ??Quid de cette langue barbare, qui m?le l?alphabet num?rique et l?autre alphabet classique, qui avant de retentir en un dialectal si peu po?tique, dans un r?cit d?licieusement fugace, ?aurait d? heurter le regard de Dora l?artiste. Mais il en est ainsi. L?imp?ratif de modernit? brouille en quelque sorte le charme de l?esth?tique. ?. ???Des ?sms, inopportuns hachurent un style ?nostalgique et s?duisant. ??Ce moi pluriel utilise une pluralit? de langues Ce moi multiple n?h?site pas ? rappeler la coexistence des croyances, la foi tol?rante, ? photographier une synagogue d?cr?pie, ? donner ? voir la statue de la vierge Marie en fin de r?cit comme un souvenir enfoui au fond du c?ur d?une enfant musulmane ?confi?e pour son ?ducation aux bonnes s?urs ?des ?coles catholiques ?et qui ressurgit vivant et douloureux . Ce r?cit est une autobiographie l?g?re. On devine ? peine pourquoi Dora s?est exil?e. On ne sait pourquoi l??tre aim? est rest?. ??Qu?est-ce qui m?aura tant manqu? pour que je parte, qu?est-ce que ??tn?? lui aura tant donn? pour qu?il reste??? Aucune r?ponse. ?Autobiographie tellement pudique que le ??ici et l?ailleurs?? dont parle l?auteure se confondent en un triste pr?sent. Il ressort de ce r?cit que ce qui est appel? ??r?volution?? n?a pas encore accouch? d?un futur ?panoui, serein, rassurant, qui aurait motiv? un retour d?finitif. Mais a surtout accouch? d?un flot de d?parts encore plus pr?gnant que celui d?avant la r?volution. L?, un commissariat ?ventr?, la repr?sentation ?d?une sir?ne dont on a fait dispara?tre les seins nus sous une couche de peinture vengeresse. Le nom de Mohammed Tarek Bouazizi est bien s?r cit? ?puisque c?est sa m?saventure qui fut cause d?un printemps qui n?en fut pas un. ?Peu de choses a chang? comme si la r?volution a eu lieu et n?a pas eu lieu. Si Dora Latiri est retourn?e au pays natal ? la recherche de ce qui a chang? elle n??voque que ce qui n?a pas chang?, comme si elle ?tait ?retourn?e ? la recherche d?elle-m?me. Les photographies ?le prouvent : c?est la Tunisie ?ternelle qui s?offre ? elle, comme celle de cette enfant habill?e de v?tements achet?s ? la fripe, qui ressemblent ? ceux que Dora mettait, enfant et que son p?re achetait ...... ? la fripe . ?trange retour d?o? l?espoir est absent et la joie de vivre et l?exub?rance qui nous ont fait aimer ???tn??, bannies. Je suppose que Dora quitte cet ici si peu accueillant pour retourner ??la bas?? ?pour les m?mes ?raisons qui ont pr?sid? ? son ?exil : l?absence d?amour, d?esp?rance d?amour, d?avenir pour tout amour. Que signifie donc ce titre : ??Amour de?tn?. Est-ce l?amour ?ternel pour la Tunisie ?ternelle, ou un amour laiss? ? ??tn?? parce que ??tn?? est oublieuse de tout amour. Lisez ce r?cit poignant, il t?moigne de la douloureuse ambivalence de tout amour. Celui de la patrie chevill?e au corps et ? l'?me et celui des ?tres qu?on y laisse et qui continuent ? ?habiter votre m?moire et ?vos c?urs. Et dont l?oubli ne vous lib?rera ?jamais.

lire aussi