Dieu, le déficit pluviométrique et la COP22

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La salle du conseil de gouvernement s?est transform?e en mosqu?e improvis?e. Clandestine, diront les langues fielleuses. Jeudi 12 mai, les ministres ont eu obligation d??couter religieusement le pr?che du cheikh Abdalilah Benkirane. Impossible de faire autrement. En ouverture des travaux du conseil hebdomadaire qui se tient sous sa pr?sidence, le premier ministre a invoqu? Allah pour expliquer le d?ficit pluviom?trique que conna?t notre pays.

Les bras crois?s, les yeux lev?s au ciel et le ton grave, il a fait cette d?claration solennelle devant ses ministres, une d?claration destin?e surtout ?? l?opinion publique ?selon notre foi, lorsque?Dieu retarde la pluie, c?est pour une seule raison, celle d?appeler les gens ? un retour ? Lui. Et alors que nous sommes au mois de cha?bane, qui pr?c?de celui de ramadan, il est primordial que nous entreprenions tous une r?vision de nous-m?mes. Nous sommes une nation musulmane et croyante.?Notre gouvernement doit ?tre un mod?le pour ses citoyens en mati?re de rectitude??.

Pour un pays qui accueille la conf?rence mondiale sur les changements climatiques, la COP22, un tel discours r?sonne ?trangement. Que le chef de gouvernement soit imperm?able aux enjeux climatiques et ? la r?duction de l??mission de gaz de carbone passe encore (par pure charit? chr?tienne), mais qu?il apporte une explication divine au manque de pluie est symptomatique d?une gouvernance puis?e dans l?irrationnel. Mais pas seulement. Pour parler aux Marocains, M. Benkirane convoque le registre religieux. C?est tellement plus simple d?expliquer ce qui ne va pas par une volont? divine qui, elle, n??tait pas au programme ?lectoral?!

Il ?ne faut surtout pas s?y m?prendre. Quand le chef de gouvernement en appelle au retour ? Dieu en ce mois de chaabane et ? quelques semaines de celui de ramadan, il conna?t les rapports irrationnels des citoyens de ce pays avec la religion. ?Un sondage effectu? par un institut tunisien sur la religiosit? et le degr? de pi?t? des maghr?bins confirme cette tendance. On y apprend par exemple que pr?s de 62%des Marocains ?-qui s?identifient d?abord par l?appartenance ?? l?islam et ensuite par la citoyennet?- ?sont contre le voile int?gral. Dans le m?me temps, ils sont 54% ? ne pas ?tre d?rang?s ??par l?application de la chariaa. A la primature, on imagine que ce sondage a ?t? lu avec la plus grande attention. D?o? la communication de M. Abdalilah Benkirane devant le conseil de gouvernement donnant ? voir un premier ministre en pr?dicateur.

A quelques mois des ?lections l?gislatives, le leader islamiste et patron de l?Ex?cutif en appelle ? un retour ? Dieu. Le d?ficit pluviom?trique est un avertissement. ?Demain, la consigne de vote sera encore plus claire?: Voter PJD pour aller au paradis.