Le PJD commencerait-il à avoir peur du RNI ?

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En débarquant le week-end dernier chez Mbarka Bouaida, le Bureau Politique du Rassemblement National des Indépendant était dans un fief du RNI des origines, quand Bouaida le père, Ali, portait sur les fronts baptismaux dans la région le parti nouvellement créé au courant de l’année 1978 du siècle dernier.

Sur ses traces, que soit en affaires ou en politique, Mbarka Bouida a par deux fois piqué ma curiosité : une fois quand, membre alors de du Conseil supérieur de la HACA, je l’ai vue venir défendre son projet d’une radio de sports, Radio Mars aujourd’hui. 

Une deuxième fois quand elle a troqué son tailleur pantalon-veste contre une m’lhfa sahraouie pour bien marquer ses origines et passer avec une aisance surprenante de son statut de ministre à première femme présidente d’une Région, celle de Guelmim-Oued Noun où son faux-vrai parachutage au détriment de son cousin est venu dénouer la longue crise dans laquelle se débattait l’institution régionale.

C’est en somme, à travers ces deux escales jalonnées par bien d’autres, l’itinéraire d’une battante à laqulle le BP du RNI, voué de son propre gré au nomadisme à travers les régions du Royaume, a rendu hommage poursuivant ainsi une action de proximité qui commence, si ce n’est à faire peur, à inquiéter. 

Sinon comment expliquer autrement la sortie dans Hespress de Abdellah Bouanou qui n’exclut plus une alliance avec le PAM jusque-là ligne rouge diabolisée à outrance par les islamistes qui dirigent le gouvernement ?

Au PJD, Abdallah Bouanou n’est pas n’importe qui. Il est le chef indéboulonnable du groupe parlementaire, mais pas seulement. Il est surtout l’un des porte-drapeaux des intransigeants qui a souvent défrayé la chronique par des sorties intempestives.

On pourrait mettre l’éventualité de cette alliance avec le « diable », n’est-ce pas ainsi qu’ils le perçoivent, sur le compte d’une attitude tactique pour appuyer ceux qui, au sein du PAM, travaillent à sa décomposition en vue de sa « recomposition » en dehors de son sentier battu. Mais cette perspective se réduit à un effet collatéral dès que l’on tombe, dans le même entretien, sur une attaque en règle contre le RNI, un allié gouvernemental réel et pas potentiel jusqu’à preuve du contraire. 

L'agression par l'allusion

L’allusion, pour reprendre l’expression de Hespress, est à peine voilée. Une technique d'agression déjà vue qui mèle le vague et la précision, le faux et le vrai. Sans rien révéler de ses sources et sans étayer le chiffre si précis qu’il avance, Abdellah Bouanou assure ainsi que le RNI a « dépensé plus de 250 millions de dirhams » qu’il convertit en centimes pour mieux impressionner, (25 milliards), « soit, dit-il, la valeur de la subvention versée par l’Etat à l’ensemble des partis politiques ». Et s’il ne «ne vise personne » [sic], il relève tout de même que « le fait de rassembler des gens juste pour manger et boire questionne sur la problématique du financement ».

Dans ce « boire et manger » de Bouanou, il y a à boire et à manger. Il faut n’avoir couvert aucune des activités du RNI depuis le congrès de Bouznika en octobre 2016, ou être intentionnellement sourd, ce qui est fort probablement le cas, pour ne rien entendre des débats qu’agitent le RNI. Au lendemain du congrès de Bouznika qui marque la mue entamée par un Rassemblement dans l’abîme, peu misaient un kopeck sur une renaissance de ce parti, beaucoup s’en gaussaient en revanche. Pourtant…

Une action de proximité méthodique et soutenue

Est-ce à dire que le RNI est en mesure de remporter les élections de 2021 ou de remobiliser l’intérêt populaire pour les législatives à venir ? C’est un autre débat et ses cadres eux-mêmes ne s’aventurent pas à de pareils pronostics. Est-ce à dire encore que le RNI constitue la panacée aux problèmes du Maroc ? Certainement pas, en tout cas pas à lui tout seul.  Des choses ont toutefois été acquises : La restructuration du parti est faite ; des organisations parallèles et dédiées ont été mises en place et elles fonctionnent ; la Jeunesse RNI tient régulièrement ses universités d’été ; une action de proximité méthodique et soutenue à travers les régions et les villes est menées et des débats de qualité sont organisés.

Deux, à Rabat en juillet dernier, retiennent particulièrement l’attention : L’un sur les 20 ans de règne de Mohammed VI, l’autre consacré à l’état de la santé au Maroc. Leur particularité vient du fait qu’ils ne sont pas RNIo-RNI. On y a vu le sémillant économiste Youssef Saadni, le truculent usfpéiste Ali Bouabid, la constitutionnaliste Nadia Bernoussi, le politologue et animateur télé Abdallah Tourabi, le droit-hommiste M’barek Boudarqua, le président du Policy center Karim El Inaoui, l’islamologue franco-marocain Rachid Benzine et autres Omar Charkaoui, Aurélien Duchène, Eugène Daronnat, Younes Abchir, Dominique Reynié…

 Aux discussions, ils ont apporté leur expertise, leur regard critique et leur franc-parler que très peu de partis tolèrent. Leurs contributions ouvrent à la réflexion des perspectives qui nous changent des oukases théologiques des chouyoukhs moyen-orientaux que le PJD a l’habitude d’inviter à sa table.  Si bien que Andallah Bouanou n’a plus trouvé mieux qu’une alliance avec ce qui reste du PAM pour tenter de contenir une formation devenue à ses yeux menaçante.   

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