Centrafrique : les raisons d’une instabilité persistante

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CENTRAFRIQUE

En Centrafrique, la situation ne cesse de se d?grader depuis trois jours. La pr?sidente est toujours contest?e et les Casques bleus vis?s par des attaques

A vingt ann?es d?instabilit? et de violences entre 1993 et 2013, s?ajoute l?escalade qui secoue la R?publique centrafricaine depuis maintenant trois jours. En effet, l??l?ment d?clencheur de la mont?e des violences est le coup d?Etat de mars 2013, qui a renvers? le r?gime de Fran?ois Boziz? et renforc? les milices de la S?l?ka. Sur le terrain, c?est la troisi?me guerre civile ? laquelle assiste le pays, au moment o? la pr?sidente de transition Catherine Samba-Panza est de plus en plus contest?e par la population. Beaucoup parmi les centrafricains disent avoir perdu leur confiance en Samba-Ranza. Ils lui reprochent des d?tournements de fonds, en plus de son inefficacit? ? maintenir la paix dans le pays.

La S?l?ka vs Les anti-balaka

Pour comprendre les rapports de force existants en R?publique centrafricaine et les raison de l?instabilit? qui y r?gne, il faut conna?tre le poids de la S?l?ka et des anti-balaka. La premi?re est une milice regroupant les partis politiques et les rebelles, qui ont exprim? en 2012 leur opposition au pr?sident d?chu Fran?ois Boziz?. Parmi ces rebelles, on retrouve des mercenaires venus de Lybie, du Tchad et du Soudan. Ils forment une coalition ? vocation religieuse islamique, dans un pays o? 80% des habitants sont de confession chr?tienne. La S?l?ka a 20?000 personnes ? son actif. Sa dissolution avait ?t? annonc?e en 2013. Mais sur le terrain, cette dissolution n?a rien chang? ? la situation instable de la Centrafrique. D?ailleurs, le coup d?Etat contre Fran?ois Boziz? porte l?empreinte de la S?l?ka. Ses milices avaient eux-m?mes revendiqu? la prise du palais pr?sidentiel, le 24 mars. L?enqu?te ouverte par Cour p?nale internationale (CPI) sur les massacres commis dans la r?gion entre 2012 et 2014 pointe du doigt la S?l?ka ?galement. Elle estime que la milice est impliqu?e dans des ??crimes de guerre??, selon le Statut de Rome qui ?num?re les agissements consid?r?s comme tels et o? la CPI est comp?tente au niveau des enqu?tes, des poursuites, du lancement des mandats d?arr?t, des demandes d?extradition et des proc?s.

Quant aux groupes anti-balaka, ils ont ?t? cr??s bien avant la S?l?ka. Depuis 2009, cette milice chr?tienne regroupe plusieurs paysans centrafricains. Ses porte-parole estiment que les anti-balaka sont entre 50?000 et 70?000 personnes, essentiellement bas?es dans la capitale Bangui. Ils pr?tendent vouloir s?auto-d?fendre en combattant les ?coupeurs de route?. Depuis 2013, c?est contre la S?l?ka qu?ils ont commenc? ? prendre les armes. Le pays a donc replong? dans une guerre civile de plus, apr?s celles de 2003 et de 2012. De nombreux coups d?Etat militaires et mutineries ont pr?cipit? ces guerres civiles qui ont fait plusieurs morts et d?plac?s parmi les populations. Ce n?est donc pas un hasard si l?enqu?te ouverte par la CPI met en cause la S?l?ka autant que les anti-balaka, au m?me niveau d?implication dans les crimes commis ces deux derni?res ann?es.

Catherine Samba-Panza perd la confiance populaire

Catherine Samba-Panza est actuellement pr?sidente de transition en Centrafrique. Avant son accession au poste, la S?l?ka s??tait empar?e du palais pr?sidentiel et destitu? Fran?ois Boziz?. Le pr?sident d?chu avait lui aussi acc?d? au pouvoir apr?s un coup d?Etat militaire, en 2003. En 2011, Boziz? a ?t? r??lu avec 64% des voix lors de la pr?sidentielle, durant laquelle il a battu Ange-F?lix Patass?, l?ex-pr?sident qu?il avait lui-m?me destitu? huit ans auparavant. Apr?s une ann?e au pouvoir, Boziz? ?tait critiqu? par la S?l?ka. Elle lui reprochait son non-respect des accords de cessez-le-feu, pass?s en 2007 et en 2011 entre milices, opposition et gouvernement. La S?l?ka a donc repris les armes et contr?l? plusieurs grandes villes du pays, en coalition avec d?autres mouvements arm?s et rebelles de l?opposition. Apr?s plusieurs accords et n?gociations de paix vou?s ? l??chec, la milice pro-islamique a fait son entr?e ? Bangui le 23 mars 2013. Un jour apr?s et alors que Fran?ois Boziz? ?tait en dehors du pays, le groupe a annonc? la prise du palais pr?sidentiel. Rapidement, le militaire et membre de la S?l?ka Michel Djotodia a pris la fonction de pr?sident pas int?rim. C?est ainsi que la guerre interconfessionnelle opposant la S?l?ka aux anti-balaka et ? l?arm?e de Boziz? a ?clat?. C?est ainsi ?galement que l?ONU a adopt? en d?cembre de la m?me ann?e une r?solution pour le maintien de la paix. Elle a pr?vu le d?ploiement de la Mission internationale de soutien ? la Centrafrique sous conduite africaine (MISCA). Dans le cadre de cette mission, la France a d?ploy? de son c?t? 1?200 membres de son arm?e pour ??l?op?ration Sangari??. Celle-ci qui avait comme objectif de d?sarmer les milices ? Bangui et ??permettre l?acheminement de l?aide humanitaire??.

Apr?s l?initiation d?un processus de paix, Michel Djocodia a ?t? press? pour pr?senter sa d?mission. Le Conseil national de transition (CNT) a ?t? cr?? et s?est occup? d?organiser des ?lections pr?sidentielles transitionnelles. Catherine Samba-Panza a ?t? ?lue en 2014 et a tout de suite appel? la S?l?ka et les anti-balaka ? d?poser les armes. Elle a ?t? d?ailleurs derri?re la requ?te aupr?s de la CPI pour lancer une enqu?te contre les crimes de guerre commis en Centrafrique, entre 2012 et 2014. En revanche, les hostilit?s interconfessionnelles n?ont fait que croitre depuis le d?but de l?ann?e. La population civile autant que les Casques bleus ne sont pas encore ?pargn?s par les attaques attribu?es ? la S?l?ka. C?est ainsi que les civiles et m?me les ex-membres de la S?l?ka demandent aujourd?hui la d?mission de la pr?sidente, en l?accusant notamment de d?tournement de fonds. Samba-Panza nie les accusations, alors que le magazine Jeune Afrique a r?v?l? ??la gestion opaque de 10 millions de dollars accord? par l?Angola?? ? la Centrafrique. L?affaire d?montre qu?un quart de ce don n?est pas all? directement aux caisses de l?Etat, alors que la somme avait ?t? octroy?e ??en mains propres?? pas le pr?sident angolais ? cet effet.

Dans un contexte o? les violences interconfessionnelles sont m?l?es ? une gestion politique et ?conomique controvers?es, le FMI et la Banque Mondial disent avoir l?intention de se pencher sur le cas des soup?ons mettant en cause Catherine Samba-Panza. Entre temps, l?instabilit? persiste dans le pays. Hier soir, des ?changes de tirs d?armes lourdes ont ?t? entendus ? Bangui et l?a?roport a ?t? ferm?. La veille de ces accrochages dont le bilan n?est toujours pas connu, la MINUSCA et les forces fran?aises ont ?t? attaqu?es par des milices arm?es, faisant ?tat d?un mort parmi les Casques bleus.

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