Des partis politiques sans rivages

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Les déclarations des chefs de partis ne peuvent que désorienter les observateurs quand il s’agit des éventuelles alliances : « Il n’y a pas de ligne rouge » ce qui signifie que tout le monde peut s’allier avec tout le monde.

C’est même clairement énoncé quand, de manière unanime, ils déclarent que les alliances se feront en fonction des résultats.

C’est une vision qui vide la politique et l’action partisane de toute substance et qui explique, voire même, justifie l’abstention puisque, selon cette vision, tout se vaut et que l’objectif unique c’est le partage des strapontins.

Les « chefs » ignorent-ils les notions élémentaires de ce qu’est un parti politique ? Son rôle ? Ou c’est leur soif de pouvoir qui les fait réagir ?

Il n’y a pas de mal à leur rappeler les fondamentaux.

Un parti politique c’est d’abord une vision du monde, une idéologie, déclinée en un programme. Des slogans comme la réforme de l’Education ou de la santé ne signifient rien en eux-mêmes. Les libéraux proposeront encore plus de privatisations ; la gauche un renforcement de la solidarité par le biais de la fiscalité; les conservateurs le retour de l’ordre moral dans l’éducation et le renforcement de la santé publique par un appui des mécènes dans le cadre de la Zakat. Ce sont trois projets antagonistes, cachés sous le même vocable.

Ce sont des partis qui fonctionnent ainsi qui sont utiles, nécessaires à la démocratie. Ils sont utiles parce qu’ils font vivre un débat public représentatif des courants qui traversent la société et qui traduisent eux-mêmes la diversité des intérêts des classes sociales.

Rappelons que la démocratie ce n’est pas la négation des conflits entre les intérêts divergents, mais le moyen de les pacifier, de les gérer en préservant la cohésion sociale.

Les alliances se font entre les partis dont la vision du monde est proche, avec des nuances, ce qui leur permet d’établir des programmes communs. Mais elles ne sont jamais entre des partis aux visions antagonistes, sauf quand des événements historiques, la guerre par exemple, imposent une union nationale qui ne peut être que conjoncturelle parce que les divergences des intérêts sociaux et des visions sociales demeurent.

Le choc des valeurs fonde la vie d’une nation.

Les partis politiques marocains se sont éloignés de cette réalité immuable. Par une pratique malsaine du jeu des alliances, ils ont fini par gommer leur ADN au profit de combinaisons sans principes. Les électeurs se détournent des urnes, parce qu’ils n’ont pas le choix entre des projets de société distincts, des programmes clairs, et que leur vote n’a pas de signification politique. En effet, si vous votez libéral pour que les libéraux s’allient avec les Islamistes cela n’a pas grand sens.

Ces alliances sans rivages, sans principes, minent la démocratie. Un parti politique n’est pas une écurie pour gérer des ambitions personnelles, mais un projet porté par des militants qui veulent le faire partager par la population. Il faut revenir à cette définition si on veut une véritable démocratie.

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