La parenthèse Chabat

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Tout joueur d’échec madré, tout responsable politique intelligent ou tout joueur de cartes qui compte correctement ses atouts aurait choisi la retenue ou la discrétion en cette période de mercato gouvernemental et de plomberie majoritaire impossible. Pas Chabat.

La mainmise de Hamid Chabat, et de sa garde prétorienne, sur le parti de l’Istiqlal a abouti, au final, à trois échecs patents. 

Le premier une sortie calamiteuse du gouvernement en 2013 que ni les responsables politiques ni les militants de ce parti n’ont compris à ce jour. L’explication donnée par Hamid Chabat d’une manipulation à « l’insu de son plein gré » n’est ni très crédible à ce niveau de responsabilité ni très documentée compte tenu de ses dégâts politiques et historiques occasionnés. 
 
Le deuxième échec, corollaire du premier probablement, est le naufrage politique historique acté  par trois échecs électoraux successifs, élections locales, régionales et législatives,  qui ont fait de son parti un parti à la traine, sans vocation, sans positionnement lisible et sans leadership légitime. 

Le troisième échec, peut-être le plus spectaculaire, est un sabordage politique, en bonne et due forme, construit sur des déclarations hasardeuses de Hamid Chabat aux conséquences diplomatiques cataclysmiques. Une saillie contre la Mauritanie et son unité territoriale qui met dans une colère noire le pouvoir mauritanien et qui sabote ouvertement les efforts du Maroc, soutenus et patients, pour retrouver sa place naturelle au sein de l’UA.
 
Tout cela est trop pour un seul homme. Et c’est trop, également, en si peu de temps, pour un seul parti, l’Istiqlal en l’occurrence.

Sur la Mauritanie, les réactions «chimiques» en chaine  ne se sont pas fait attendre. Et elles sont à la hauteur de la transgression. Appel téléphonique rassérénant du Roi au président mauritanien, communiqué sanglant du MAEC stigmatisant Hamid Chabat, prise de position inhabituellement vigoureuse de Abbas El Fassi, voyage éclair du Chef du Gouvernement à Zouerate pour rassurer le président Ould Abdelaziz, communiqué exonérant la personne de Taoufik Hejira en qualité de président du Conseil national de l’Istiqlal… Et le reste est à l’avenant. 
 
Le bilan de tout cela est passablement catastrophique. Il se suffit à lui même pour ouvrir au sein de l’Istiqlal une nouvelle séquence « post-chabatienne » afin de sauvegarder les acquis historiques de ce parti notamment sa contribution légitime aux gouvernements successifs du royaume et de protéger  son avenir possible mis sérieusement en danger par un «leadership» manifestement irresponsable et suicidaire.  
 
Le contexte politique national dans lequel s’est déployée l’obsession mauritanienne dévastatrice de Hamid Chabat est, également, des plus explosifs. Tout joueur d’échec madré, tout responsable politique intelligent ou tout joueur de cartes qui compte correctement ses atouts aurait choisi la retenue ou la discrétion en cette période de mercato gouvernemental et de plomberie majoritaire impossible. Plus de 2 moins de blocage politique sanctionnés par une  sortie de route de Chabat qui met tout le monde d’accord… contre lui. Du grand art politique ! 
 
De fait l’Istiqlal se voit renvoyé à aller mettre sérieusement de l’ordre dans sa maison, reprendre ses bases politiques, fermer la parenthèse Hamid Chabat avec sa gouvernance erratique, et nettoyer au karchër, si possible, sa garde prétorienne qui a fait de l’intimidation, l’injure et la diffamation une culture étrangère au parti de Allal El Fassi. 
 
Le mois de mars prochain  et un mois de congrès pour les istiqlaliens. Cela devrait représenter pour eux  un rendez-vous  de la clarification politique, du retour au fondamentaux istiqlaliens et de l’émergence d’un nouveau leadership civilisé, responsable, et compétent dont ce parti ne manque aucunement. 
 
Il n’est pas exclu qu’après ce ménage du printemps que le parti de l’Istiqlal retrouve naturellement sa place au sein du gouvernement Benkirane III à la faveur d’un remaniement équilibrant, opportun et qui ouvre de nouvelles perspectives gouvernementales pour le pays soit en termes de «professionnalisation»  de l’expérience démocratique actuelle ou en terme de préparation d’une future alternance.   

Toutefois, en l’état actuel des choses, il est très difficiles malgré les pétitions de principe de Abdalilah Benkirane, que la crise mauritanienne a en principe levé, de continuer à vouloir offrir un avenir  gouvernemental à Hamid Chabat et à sa clique. 
 
Si Abdalilah Benkirane, le Chef du gouvernement désigné par le Roi, veut vraiment aider le parti de l’Istiqlal, en tant qu’institution politique incontournable dans le pays, c’est de le renvoyer à un renouvellement profond de ses instances. Cela serait indubitablement salvateur pour le pays.

 

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