Lâcheté politique

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Abdalilah Benkirane. Il veut se dédouaner des événements d’Al-Hoceima parce que, dit-il, il n’était pas sur la photo, n’a pas été associé au projet « Al-Hoceima phare de la Méditerranée ». Pourtant, ce sont bien sept ministres de son gouvernement qui ont signé

 

Nous avons, de tout temps, soutenu l’idée que le Roi, de par la constitution, est l’incarnation de la nation, qu’il est au-dessus des questions partisanes, et qu’il n’a pas à gérer les questions logistiques. Or, le gouvernement, les partis politiques de la majorité, les syndicats, certaines associations, réclamaient une intervention royale pour éteindre l’incendie d’Al-Hoceima. Il y a en effet une lâcheté politique des autres institutions, qui est à la fois dangereuse et inexplicable du point de vue institutionnel. L’exemple le plus significatif est celui de l’ancien chef du gouvernement, Abdalilah Benkirane. Il veut se dédouaner des événements d’Al-Hoceima parce que, dit-il, il n’était pas sur la photo, n’a pas été associé au projet « Al-Hoceima phare de la Méditerranée ». Pourtant, ce sont bien sept ministres de son gouvernement qui ont signé. N’avait-il aucun pouvoir sur ses ministres ? Une fois les projets signés, monsieur Benkirane a-t-il dit à qui de droit, partant de ses prérogatives constitutionnelles, que l’intendance ne pouvait pas suivre, qu’il n’y avait pas assez d’argent pour mettre en application tous ces accords signés devant le Souverain ? Cette manière de refaire l’histoire est plus que décevante, elle est inquiétante. Quelle est la conception institutionnelle de monsieur Benkirane ? Le Roi, doit-il contrôler, lui-même, les chefs de services ? Le Roi doit-il aller vérifier les budgets sectoriels ? Quel est donc le rôle de l’Exécutif, si ce n’est, et comme son nom l’indique, de mettre en musique les orientations générales et mettre les mains dans le cambouis. Le Roi a respecté la constitution. Il s’est exprimé fortement lors d’un Conseil des ministres, a accédé aux demandes des manifestants en ordonnant la mise en place d’une commission d’enquête sur les chantiers qu’il a lancés en 2015. Le Souverain n’a pas l’obligation de suivre la réalisation de ces chantiers. C’est plutôt de la responsabilité de l’Exécutif, sauf en cas de défaillance de celui-ci, ce qui est le cas aujourd’hui. L’institution monarchique est là pour être un prescripteur, pour assurer l’équilibre des pouvoirs, pas pour négocier des intérêts catégoriels. Le Roi, de par la constitution, est au-dessus de la gestion des crises locales. C’est au gouvernement et à ses extensions d’y répondre. Le drame c’est que les autres institutions, le gouvernement en premier lieu, n’a pas fonctionné pour ouvrir un réel dialogue avec les manifestants d’Al-Hoceima. L’initiative de Tanger et, très tardivement, celle d’un collectif autour d’anciennes figures des droits de l’Homme, ont été prises pour remédier à sa défaillance. Rappelant que les manifestations sont un phénomène lié à la démocratie, les heurts entre les forces de police et les manifestants sont courants, même dans toutes les démocraties matures. Il est clair que la sphère politico-administrative a d’énormes difficultés à instaurer sa légitimité. Il faut qu’elle se réforme et non pas qu’elle mette en jeu l’aura du Monarque. La stabilité du Maroc en dépend.

 

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