Dénouement de l’affaire des « Chibanis » de la SNCF

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Ce mercredi, la justice s'est prononcée et a confirmé la condamnation en appel de la SNCF accusée de discrimination contre les 848 cheminots

Un montant réclamé de plus de 600 millions d’euros pour un dossier sensible aux odeurs coloniales. La cour a pris en compte le préjudice moral et intégral de plus de 800 personnes après 40 années de travail bafouées par une discrimination difficilement contestable.

Des dédommagements insuffisants

628 millions d’euros, voici le montant réclamé à la SNCF par les « Chibanis ». Les auto-proclamés « indigènes du rail » ou « déclassés de la SNCF » ont « bon espoir » de l’emporter devant la cour d’appel, cependant l’appréhension atteint son paroxysme après des années d’attente a déclaré à l’AFP, Clélie de Lesquen-Jonasn, l’une des avocates des plaignants. 

En septembre 2015, la SNCF avait été condamnée en première instance pour discrimination dans l’ensemble des dossiers, à quelques exceptions prés. Condamnation devant le conseil de prud’homme de Paris dont le montant des dommages et intérêts s’élevait à 170 millions d’euros (soit à peu près 20000 euros par personne), mais suspendue par l’appel de la Société National des Chemins de fer. Un chiffre bien loin de la somme demandée de 628 millions d’euros. Car en plus  des méthodes « honteuses » de calcul des réparations, l’avocate des salariés déclare que doit s’ajouter aux réparations du « préjudice intégral » de carrière et de retraite, une reconnaissance du « préjudice moral » due à un ressenti d’une « vraie humiliation » par les cheminots d’origine marocaine.

Le jugement rendu est bel et bien en faveur des "Chibanis". et Clélie de Lesquen-Jonasn confirme bien qu'une reconnaissance du "préjudice moral" a été obtenue. L'information sur le montant des dommages et intérêts n'a toujours pas été divulgué. La SCNF, quant à elle, "prend acte de cette décision de justice".

Pensions et discriminations

Ces anciens cheminots marocains ou d’origine marocaine accusent la SNCF de différences de traitement subis pendant plus de 40 ans, mis en lumière après leurs retraites.

En 1970, plus de 2000 marocains avait été recruté grâce à un accord bilatéral entre le Maroc et la France, à un moment ou la SNCF était dans un besoin capital de main-d’œuvre. Après une visite médicale et la signature de leurs contrats à l’office national de l’immigration, ces milliers de marocains commencent leurs durs labeurs. Sauf que le problème réside dans ce contrat. Un CDI de droit privé pour travailleur étranger qui présente quelques différences avec les contrats accordant le  « statut permanent » dont bénéficie la majorité des salariés de la SCNF. Une majorité considérée comme des fonctionnaires contrairement aux « Chibanis ».

Vers les années 2000, la SCNF leurs propose des plans de départ anticipé à 55 ans que beaucoup d’entre eux acceptent. Cependant quelques années plus tard le résultat est amer tant le montant de leur pension est maigre. Ainsi, les victimes demandent une pension de base pour un contractuel ayant cotisé 40 ans, soit 1100 euros par mois.

Ces cheminots ont dû travailler dans « des conditions difficiles », en faisant « les mêmes tâches que leurs collègues français au statut » mais avec des « carrières bloquées et des retraites moindres » déclare Olivier de Boissieur à l’AFP, un des avocats des « Chibanis ». A travail égal, force est de constater que le traitement et le salaire ne le sont pas. L’égalité prônée par l’Etat français ne semble pas s’appliquer à tous même si ce jugement aura le mérite d'appaiser les souffrances de ces centaines de travailleurs.