EST-CE QU’IL VOUS VIENDRAIT A L’ESPRIT DE FAIRE UN TOUR PAR SIDI KACEM ?

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Petitjean, l’avaient baptisée les colons qui y ont débarqué dans le sillage de Lyautey, premier résident général français au Maroc et pas encore maréchal de France qui ne lui sera accordé qu’en 1921. C’est un nulle part dans une zone marécageuse qui va donner un peu de pétrole et beaucoup de produit de la terre une fois asséchée

Sidi Kacem est une ville qui ne ressemble à rien ou plutôt si, à toutes ces villes qui ont poussé avec le protectorat et qui ont mal grandi. Elles sont légion au Maroc. J’y ai mis les pieds une seule fois, tout au début des années quatre-vingt du siècle dernier. Puis je n’y ai plus mis les pieds, jusqu’à cette semaine.

En m’y rendant, dans une autre vie, beaucoup de choses se bousculaient dans ma tête. Le général Ahmed Dlimi dont le nom et le grade s’associaient comme deux siamois au chef-lieu des Chrarda (et à un tas d’autres choses) était encore au faîte de sa puissance, sans savoir que quelques mois plus tard il allait être victime dans la région de Marrakech d’un accident controversé.  Son père, Haj Lahcen, régnait, disait-on, en « saint patron » craint et vénéré, c’est selon, de la région dont le chef-lieu, à l’indépendance, prendra le nom de Sidi Kacem, véritable chrif de l’endroit.

Petitjean, l’avaient baptisée les colons qui y ont débarqué dans le sillage de Lyautey, premier résident général français au Maroc et pas encore maréchal de France qui ne lui sera accordé qu’en 1921. C’est un nulle part dans une zone marécageuse qui va donner un peu de pétrole dont on sent encore aujourd’hui l’odeur et beaucoup de produit de la terre une fois asséchée. C’est cet assèchement du sol pour le rendre fertile que des Français tentent de temps en temps d’appeler les biens faits du colonialisme sur les colonies.

 En 1982, c’est le regard des gens qui m’avait frappé et marqué. Une sorte de peur ambiante enveloppait de sa chape une ville où « l’étranger » était visible à mille lieues et à l’œil nu. En m’y rendant en ce jour béni, lundi dernier, de cet an de grâce 2019, pour assister au lancement de la campagne agricole, se sont ces souvenirs qui sont remontés à la surface. J’ai vu le ministre de l’agriculture, Aziz Akhannouch, arroser un plant d’olivier, faire les stands, donner un discours. Il y a annoncé 2,2 millions de quintaux de semences sélectionnées à des prix incitatifs, le renforcement de la capacité de stockage sera à travers l’exploitation du nouveau centre de stockage, appeler à la rationalisation de l’eau au niveau des barrages à usage agricole, le taux de remplissage se situant à 45% contre 57% à la même période de la campagne précédente et bien d’autres choses.

Sur le chemin du retour, dans le rétroviseur, je laissai une ville qui a perdu en embellissement et gagné en décontraction, me disant qu’en dépit des régressions et une certaine démoralisation qu’alimentent des affaires, celle de Hajar Raïssouni entre autres, qui n’ont pas lieu d’être, elles sont bien derrière nous les années de plomb. Puis par ces digressions dont seules les pensées dans les circuits du cerveau humain ont le secret, je me suis dit que sans doute c’est bien d’être ministre, mais des matinées comme celle-ci à arroser un plant d’olivier et à serrer des louches pour la plupart inconnued, ça ne doit pas être très marrant. Ou pas. Mais je ne suis pas ministre, donc je ne peux pas savoir.

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