Maroc-Espagne: En finir avec la méfiance

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Il est étonnant de voir que le nouveau chef du gouvernement espagnol utilise les mêmes termes que son prédécesseur Mariano Rajoy pour qualifier le Maroc: « Sur les questions de l’émigration, du terrorisme et du trafic de drogue, le Maroc est un allié fiable et indispensable »

Par Ahmed Charaï - La visite du chef du gouvernement espagnol au Maroc, la semaine dernière, s’inscrit dans un contexte très particulier. Malgré les changements de majorité et les difficiles équilibres politiques en Espagne, les relations entre les deux pays paraissent très apaisées et même très bonnes.

Sur le plan économique, le partenariat avance très correctement. L’Espagne conteste à la France le premier rang des partenaires commerciaux. C’est une réalité, mais cela aurait pu être plus important si le Maroc avait réussi à délocaliser les grosses PME espagnoles. Le tourisme connait un mouvement dans ce sens.

Au-delà de l’économie, il y a les relations stratégiques. Il est étonnant de voir que le nouveau chef du gouvernement espagnol utilise les mêmes termes que son prédécesseur Mariano Rajoy pour qualifier le Maroc: « Sur les questions de l’émigration, du terrorisme et du trafic de drogue, le Maroc est un allié fiable et indispensable », a-t-il dit.

C’est un aspect très important entre les deux pays frontaliers surtout au moment où les nationalismes montent partout et que c’est une tendance qui se renforce. Que Madrid et Rabat collaborent sur des sujets aussi prégnants, à la satisfaction des deux, alors que plusieurs pays se renferment, à une importance particulière.

Surtout quand on sait, chiffres à l’appui, que l’Espagne redevient le portail de l’Europe pour les migrants subsahariens et que c’est le Maroc qui limite le flux. Dans ce contexte, il faudrait s’intéresser aux échanges humains et culturels entre les deux peuples. Huit cent mille Marocains vivent en Espagne, les Espagnols constituent le deuxième plus grand contingent de touristes au Maroc. La question de Sebta et Melilia est gérée, par les deux parties, de manière intelligente. L’Espagne accepte les minarets et l’appel à la prière, les prières sont dites au nom du Roi du Maroc, ce qui est impossible dans l’Espagne continentale.

Dans la même ville de Sebta, il y a une statue du Charif El Idrissi, l’un des plus grands géographes de l’histoire, natif de la ville. En Andalousie, il y a un véritable mouvement culturel en faveur de la reconnaissance de l’aspect mauresque de l’histoire de la région. Ces éléments humains, culturels, nés de l’histoire, devraient donner un élan, encore plus grand, à la coopération entre les deux voisins. Ce n’est pas le cas parce que les élites ne sont pas au diapason. Des deux côtés du Détroit on peut trouver les mêmes analyses avec le même argumentaire, sur la nécessité d’une coopération plus raffermie. Néanmoins, il y a une véritable méfiance réciproque. Cela se ressent même au niveau des médias qui se rejettent des accusations souvent infondées. Il y a un problème de communication qui doit être réglé. Il faudrait, qu’au-delà des barrières de la langue, les partis, les associations, les artistes, les intellectuels des deux pays puissent échanger, collaborer. Cela enracinerait encore plus une coopération imposée par l’histoire et la géographie, qui est immuable. Rabat et Madrid devraient s’attacher à la promotion de ce genre d’échanges.

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