Ramadan sous le signe de l’inflation et des pénuries alimentaires en Tunisie

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Le mois de Ramadan s’accompagne par une hausse notable de consommation estimée à 34% selon des chiffres officiels, mettant à rude épreuve la capacité des marchés intérieurs de satisfaire un tel niveau de demande, au risque d’entraîner des hausses exorbitantes des prix et des ruptures d’approvisionnement

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Tunis - En Tunisie, le mois de ramadan intervient cette année dans une conjoncture économique difficile marquée par la persistance des pressions inflationnistes et les pénuries de nombreux produits de base, compliquant davantage le quotidien des Tunisiens dont le pouvoir d’achat ne cesse de s’éroder.

Avec une inflation qui dépasse les 7% et une sécheresse qui plombe les rendements agricoles depuis des années, plusieurs produits alimentaires parmi les plus demandés par les Tunisiens lors du mois sacré n’ont pas été épargnés par des hausses des prix qui ont rythmé les premiers jours du jeûne en Tunisie.

Parmi les denrées alimentaires qui ont vu leur prix monter en flèche, figurent les viandes rouges et le poisson, contraignant les Tunisiens à chercher des alternatives plus abordables pour composer leurs plats ramadanesques.

Force est de constater que le mois de Ramadan s’accompagne par une hausse notable de consommation estimée à 34% selon des chiffres officiels, mettant à rude épreuve la capacité des marchés intérieurs de satisfaire un tel niveau de demande, au risque d’entraîner des hausses exorbitantes des prix et des ruptures d’approvisionnement, faute de mesures adéquates.

L’Organisation tunisienne d’orientation du consommateur a anticipé une nouvelle hausse des prix des légumes et des céréales pendant le ramadan qui coïncide avec l’intersaison agricole, s’attendant à une augmentation évidente du coût quotidien d’un panier typique du ramadan.

Outre l’inflation, le spectre des pénuries alimentaires devenues récurrentes en Tunisie plane sur les festivités du mois sacré, de nombreux produits de grande consommations tels que le sucre, le café, le riz, le lait et l’huile végétale subventionnée se font de plus en plus rare sur les étales des marchés et des points de vente, voire quasiment indisponibles.

Pour plusieurs économistes, ces pénuries sont indissociables de la crise économique et financière que traverse la Tunisie, dont les négociations pour accéder à un financement tant crucial du Fonds monétaire international sont au point mort depuis des mois.

Cité par les médias, l’économiste Ridha Chkoundali, a expliqué que l’économie tunisienne vit une période de stagflation, marquée par une chute de la croissance et une montée de l’inflation" qui a "un double effet sur le pouvoir d’achat des Tunisiens", faisant "baisser les revenus réels".

Et d’ajouter que "le remboursement des dettes surtout extérieures, au détriment de l’approvisionnement du marché en denrées de base et intrants agricoles", entraîne les fameuses pénuries qui s’étendent à de larges catégories de produits.

Miné par des difficultés d’accès aux financements extérieurs et le resserrement des marges budgétaires, l’Etat tunisien qui centralise les achats de produits subventionnés voit ses finances constamment asphyxiées par la lourde charge de subventionnement, provoquant au passage de multiples pénuries au grand dam des catégories sociales les plus vulnérables.

Au-delà des difficultés financières, la sécheresse prolongée et la baisse des rendements agricoles sont considérées également parmi les principaux facteurs des pénuries alimentaires qui ne cessent de s’aggraver, malgré l’engagement des autorités à trouver des solutions à ces crises à répétition.

Les dernières statistiques officielles des services de la météorologie sont alarmantes, dans la mesure où la Tunisie a enregistré un déficit pluviométrique de 60% en janvier dernier par rapport à la moyenne normale du mois, confirmant la persistance du stress hydrique.

Parallèlement aux changements climatiques, la spéculation est également pointée du doigt par les autorités, étant parmi les pratiques déloyales qui contribuent à déstabiliser les marchés et tirer les prix vers le haut.

Depuis le début du ramadan, plusieurs communiqués font état de la multiplication des campagnes de contrôle sur le terrain, ce qui a permis la saisie de quantités considérables de plusieurs produits subventionnés (lait, sucre, farine..) dissimulés pour des fins spéculatives.

Confrontée à une profonde crise économique et financière, la Tunisie a enregistré un taux de croissance de seulement 0,4% en 2023, alors que le taux de chômage a dépassé les 16%, selon l’Institut tunisien de la statistique.

Face aux grandes difficultés d’accès au financement, la Tunisie avait conclu en octobre 2022 un accord avec le FMI pour un prêt de deux milliards de dollars mais les négociations se sont enlisées, vu la réticence des autorités à la mise en oeuvre des réformes dans le système de compensation et le secteur des entreprises publiques.

 

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