A. Lahjomri, Commandeur de l'Ordre français des Palmes académiques, plaide pour une francophonie positive

5437685854_d630fceaff_b-

‘’L'un des plus grands intellectuels du Maroc, homme pétri de lettres, de langues et de cultures, Abdejlil Lahjomri a occupé différentes fonctions universitaires, de chef du département de langue et littérature française à l'Université Mohammed V, à la direction de l’Ecole Normale supérieure de Rabat, en ayant entre temps fondé le département de langue et de littérature française de l’université de Fès, Sidi Mohammed Ben Abdellah.’’ (Hélène Le Gal)

1
Partager :

Rabat - Le secrétaire perpétuel de l'Académie du Royaume du Maroc, Abdeljalil Lahjomri, a été décoré mercredi des insignes de Commandeur de l'Ordre français des Palmes académiques, lors d'une cérémonie organisée à la résidence de France à Rabat, en présence de sa famille et ses amis.

L'ambassadrice de France au Maroc Hélène Le Gal s'est réjouie de "pouvoir distinguer un homme de lettres, de culture, un grand professionnel de l’éducation unanimement apprécié, qui a été pendant plus de 60 ans à l’interface entre la France et le Maroc". C’est « tout à la fois, a-t-elle commencé par dire, au Secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume qu’au directeur du Collège Royal que je veux rendre hommage ce soir. » 

L'ambassadrice de France au Maroc Hélène Le Gal remettant les insignes de Commandeur de l'Ordre français des Palmes académiques au secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume Abdejlil Lahjomri

Cette décoration, a-t-elle précisé, "vise à reconnaître les mérites civils de toutes les personnes qui, à un titre ou à un autre, œuvrent pour l’école, son rayonnement, et qui apportent une contribution exceptionnelle à l’enrichissement du patrimoine culturel de la France".

Mme Le Gal a exprimé "l'immense gratitude" de la France pour l'engagement exceptionnel de M. Lahjomri au service des deux pays, de leurs cultures, de leurs langues et de leur patrimoine commun, mettant en évidence son parcours remarquable, à la fois comme ambassadeur des cultures française et marocaine et artisan de la relation entre les deux pays, qu'il a enrichie avec constance et passion.

"Avec un engagement sans faille, responsabilité et discrétion, vous avez œuvré inlassablement à la promotion de l’enseignement francophone et de la culture française au Maroc. Vous avez plus que quiconque contribué à faire du système éducatif français une référence auprès des membres de la famille Royale, contribuant ainsi directement au rayonnement de la France", a-t-elle dit.

M. Lahjomri, a-t-elle poursuivi, a toujours voué une passion à la conservation du patrimoine littéraire et historique du Royaume et œuvré dans ses fonctions successives pour permettre l’accès à la culture au plus grand nombre.

Commentant sa décoration, le secrétaire perpétuel de l'Académie du Royaume a affirmé que "cette distinction qui perturbe un peu ma modestie innée, revient sans aucun doute à Mesdames et Messieurs les membres de la commission, représentants des deux ministères de l’Éducation marocain et français, du ministère des Affaires étrangères marocain, et à Madame la Professeure principale de Notre établissement, qui a accompagné en facilitatrice dans un engagement sans faille, leurs travaux et leurs débats".

La Francophonie positive

"L’aventure pédagogique du Baccalauréat Français International (OIB), car c’en était une, passionnante et audacieuse avait l’ambition de recentrer les établissements français au Maroc, en proposant un enseignement soutenu de la langue arabe et des littératures arabe, de l’histoire et de la géographie du Maroc en langue arabe, aux élèves marocains, binationaux et étrangers tiers qui le souhaitaient et qui étaient inscrits dans ces établissements", a relevé M. Lahjomri qui avait été décoré, il y a un peu plus d’une trentaine d’années, des insignes de Chevalier de la Légion d’honneur, à l’issue des négociations maroco-françaises pour la mise en œuvre de l'Option internationale bilingue du Baccalauréat français.

Toute réforme pédagogique, a-t-il fait observer, "finit par subir les affres de l’usure du temps et comme l’histoire ne se répète pas, un nouveau dispositif [le Baccalauréat Français International de langue arabe (BFI)] est proposé aux jeunes Marocains, binationaux et étrangers tiers confiés aux établissements français au Maroc avec les mêmes objectifs de recentrage et d’insertion dans leur société, mais inscrits dans une structuration nouvelle".

Avec la mention BFI de langue arabe, a-t-il ajouté, « nous possédons maintenant un outil d’avenir, une voie,  et plus encore une vision qui dépasse le cadre des établissements français au Maroc pour offrir aux élèves de notre diaspora, un espace de culture en partage, qui, s’il investit le plus grand nombre d’établissements en France et ailleurs dans le réseau, serait à même de leur permettre d’entretenir des liens étroits avec leur pays, malgré l’éloignement géographique, de mettre en œuvre des projets en partage et de leur faciliter grandement leur retour. 

« Et si nous rêvions un peu et que nous imaginions un Baccalauréat International Marocain de langue française, un BMI de langue française, nous aurions non seulement fait bénéficier nos élèves dans les établissements marocains d’une sécurité linguistique, qui mobiliserait leurs énergies pour faciliter par le jeu des équivalences leur études supérieures en France, dans l’espace européen ou canadien, mais  surtout ouvert la voie à un déploiement d’une francophonie positive qui démentirait l’affirmation de Kateb Yacine, qui faisait de la langue française un butin de guerre, pour en faire  une langue de la fraternité, de l’égalité et pourquoi pas de  la liberté. »

Abdejlil Lahjomri ? Le voilà, en substance et en résumé abusif, tel qu’il transparait dans l’itinéraire qu’a tracé de lui l’ambassadrice de France au Maroc, l’ambassadeure dira-t-il, toujours un brin conservateur sur la réforme de la langue : 

Né à Rabat, Abdeljalil Lahjomri, a obtenu une licence ès-lettres françaises à la faculté des lettres et sciences humaines de l’Université Mohammed V, avant de rejoindre l’Université Nanterre à Paris où il a soutenu une thèse dont le thème "L'image du Maroc dans la littérature française de Loti à Montherlant" est annonciateur de ce qui sera le fil conducteur de plus d’un demi-siècle de passions.

L'un des plus grands intellectuels du Maroc, homme pétri de lettres, de langues et de cultures, il a occupé différentes fonctions universitaires, de chef du département de langue et littérature française à l'Université Mohammed V, à la direction de l’Ecole Normale supérieure de Rabat, en ayant entre temps fondé le département de langue et de littérature française de l’université de Fès, Sidi Mohammed Ben Abdellah.

Il a publié de nombreux ouvrages, et par son écriture, romanesque, poétique ou historique, il a enrichi le patrimoine culturel du Maroc et de la France. Aux côtés de la section marocaine de la "Confrérie des compagnons de Gutenberg", M. Lahjomri a accompagné la promotion de l’écrit dans toutes ses déclinaisons.

En 2008, il a fondé l’association "Rives méditerranéennes", qui par ses ateliers de langues, ses cafés littéraires ou ses ateliers d’écritures devient un espace d’invention et de création. Il a également présidé l’association "Vision- Rhoa" qui œuvre en faveur des professeurs et des étudiants déficients visuels ayant des difficultés de lecture des textes imprimés.

En 2015, le Roi l'a nommé Secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume du Maroc. A la tête de cette institution prestigieuse, il a également piloté l’instance académique supérieure de traduction, l’institut académique des Arts et l’Institut Royal de l’histoire du Maroc. Il s'est vu en 2019 attribuer par l’Académie Française le "Grand prix de la francophonie", en reconnaissance à son action infatigable pour servir et enrichir la science, la connaissance, les cultures et les langues au Maroc.

Lire l’allocution de Abdejlil Lahjomri dans laquelle il rêve de la langue française non pas comme un butin de guerre, mais pour en faire une langue de la fraternité, de l’égalité et pourquoi pas de la liberté.

 

Je n’aurais jamais pu mériter cette distinction si je n’avais pas pu puiser mon énergie et ma force au sein de ma famille, auprès de mon épouse qui stoïquement a pu supporter des moments de tension et d’abattement , mon fils et ma belle-fille, aimant et présents et surtout mes petits- enfants Alya et Kamil,

lire aussi