Benkirane va nous manquer

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Les électeurs de Benkirane ? Il sait leur parler, flatter leurs bas instincts, les faires rire de leur situation et les faire pleurer avec lui de ses malheurs personnels. Si bien que chemin faisant, il a subjugué certains, j’insiste sur les guillemets, « intellectuels » supposés de gauche ou presque

Nombre de gens n’ont pas compris qui était le grand perdant de l’éviction de Abdalilah Benkirane de la chefferie du gouvernement. Ses partisans et ses inconditionnels, le plaçant sur un piédestal, veulent laisser croire que c’est le Maroc et le processus démocratique exposé de ce fait à la régression. On ne prête qu’aux riches, mais là, avec Benkirane, on lui prête un peu trop. Si le Maroc en arrive à dépendre d’un seul homme et non plus d’un système, appelez régime, monarchie ou Makhzen, c’en sera fini du Royaume et de son unité. Dieu nous en garde. Le départ de Abdalilah Benkirane du gouvernement ne nuira même pas à son parti. Sinon c’est mal connaitre le bonhomme qui n’a jamais rêvé d’atteindre ces sommités de popularité. Et il faut continuer à compter avec lui et sur lui pour poursuivre sa capitalisation sur les bénéfices engrangés grâce à son passage à la tête du gouvernement qui lui a procuré une tribune hors pair, une visibilité de rêve et une audibilité inespérée. Il était là au bon moment, au bon endroit avec le bon profil. Non, les vrais orphelins de A. Benkirane, se sont les journalistes. L’ex-chef du gouvernement est pour la profession ce que l’on appelle dans le jargon du métier un bon client.

Photogénique, non seulement parce que l’appareil photo l’aime, mais parce qu’il a une belle gueule. Même si en accédant à la primature, comme beaucoup d’autres, allez savoir pourquoi, il a pris du poids et pas seulement au sens figuré. Il s’est un peu ampoulé sans perdre grand-chose du charme qu’il exerce autour de lui. Même si parfois ses ricanements déduisent de la sympathie naturelle qu’il dégage. Eperdument amoureux des bons mots, passionnément entichés des blagues des plus truculentes aux plus salaces, c’est un sujet vivant à écrire, une matière pétillante à rapporter. Dès lors on imagine facilement qu’avec le taciturne Saadeddine El Othmani qui le remplace, on va rigoler moins, sachant qu’en blagues, les plus courtes sont les meilleures. Celle de Abdalilah Benkirane a duré cinq ans. Son atout majeur ce n’est pas tant sa compétence, mais le pouvoir de séduction qu’il exerce sur ses électeurs, 1.6 millions de personnes qui ont voté pour lui. Il sait leur parler, flatter leurs bas instincts, les faires rire de leur situation et les faire pleurer avec lui de ses malheurs personnels. Si bien que chemin faisant, il a subjugué certains, j’insiste sur les guillemets, « intellectuels » supposés de gauche ou presque. Fascinés par son sens du spectacle, ils en ont oublié l’idéologie et le programme qu’il incarne. Rétrograde de chez rétrograde. Tout comme un homme devant une femme canon, ou l’inverse, tombe sous son charme en faisant fi de la grave MST qu’elle couve.

 

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