Jeûne et funérailles: en Cisjordanie, un ramadan entaché de violences

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Des Palestiniens identifient les corps de quatre personnes à la morgue d'un hôpital de Tulkarem, en Cisjordanie occupée, le 21 mars 2024, après une agression militaire israélienne dans le camp de réfugiés palestiniens de Nur Shams, qui jouxte la ville de Tulkarem. Depuis le début de la guerre d’extermination des Palestiniens par Israël, la Cisjordanie a connu une flambée d’agressions, à des niveaux jamais atteints depuis près de vingt ans. (Photo par RONALDO SCHEMIDT / AFP)

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A Jénine, l'hôpital de Wissam Bakr est en première ligne du rebond des agressions israéliennes en Cisjordanie occupée, qui assombrit cette année les célébrations habituellement joyeuses du ramadan, mois de jeûne musulman.

Depuis le début de la guerre d’extermination dans la bande de Gaza, qui s’inscrit dans la suite de l’objectif sioniste d’effacer le Palestinien de sa Palestine, une hausse des violences qui effraie la population de cette ville située dans le nord de la Cisjordanie, dont le camp de réfugiés, l'un des plus peuplés et pauvres des Territoires palestiniens.

"La nuit, nous essayons de ne pas sortir dehors car ce n'est pas sûr. A toute heure, il peut y avoir un raid", dit Wissam Bakr, en référence aux opérations de l'armée et des colons israéliens. "J'ai peur pour moi et pour mes enfants".

En plein ramadan, mois normalement marqué par de grands repas pour la rupture du jeûne à la nuit tombée, les rues sont plus calmes qu'à l'accoutumée et les célébrations plus discrètes.

Et cette atmosphère lourde ne se fait pas uniquement sentir après les opérations militaires israéliennes, raconte Mohammed Omar, un vendeur de pâtisseries qui a passé toute sa vie dans le camp.

"Il n'y a personne" dans les rues, "les gens restent chez eux, ont peur des bombardements et n'ont pas d'argent à dépenser", dit-il.

Tristesse, colère et douleur 

Plus de 440 Palestiniens ont été tués par des tirs de soldats ou de colons israéliens en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza.

A Jénine, un présumé commandant local de la branche armée du Jihad islamique (organisation islamiste palestinienne) et deux autres Palestiniens, accusés sans aucune peruve par Israël de préparer des attentats, ont été tués mercredi par une frappe de l'armée israélienne. Un quatrième homme, blessé dans cette frappe, est mort jeudi, selon l'Autorité palestinienne.

Et la semaine dernière, deux hommes avaient été abattus dans le périmètre de l'hôpital. L'armée israélienne avait alors utilisé sa ritournelle de mener une opération "antiterroriste" contre des "suspects armés".

Wissam Bakr montre, sur son téléphone, les images de l'un d'eux, Mahmoud Abou al-Haija, tué devant la porte d'entrée du service des urgences.

La tante de cet homme, Farha, assure auprès de l'AFP que son neveu "n'était pas un combattant ou quelqu'un portant une arme" et affirme qu'il cherchait seulement à se protéger au sein de l'hôpital.

"Nous, les musulmans, sommes impatients de célébrer le ramadan" mais cette année "des familles ont perdu un membre et il y a de la tristesse, de la colère, de la douleur dans les cœurs", juge Farha Abou al-Haija.

Mokhles Turkman raconte pour sa part qu'il rentrait chez lui en voiture après le travail lorsqu'il a entendu le bruit de la frappe ayant notamment tué le présumé responsable local du Jihad islamique. Le jeune homme de 29 ans a alors décidé de rejoindre la procession funéraire au lieu d'aller rompre le jeûne avec sa famille.

Le "ramadan n'a jamais été comme ça", a-t-il dit à l'AFP mercredi soir, alors qu’on inhumait les corps. "Nous voulons montrer que nous sommes proches de leurs familles, leur montrer que nous sommes tous unis", a-t-il ajouté. (Quid avec AFP)

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