Corruption au Maroc: entre lutte acharnée et contraintes

5437685854_d630fceaff_b-

1490
Partager :

Ali Rame, directeur du pôle des affaires juridiques à l’Instance Centrale de Prévention de la Corruption (IPC) a déclaré, à l’occasion de la journée nationale de lutte contre le corruption (vendredi 06 janvier) que « le Maroc a déployé des efforts considérables dans sa lutte contre ce phénomène sociétal ».

Il a également noté que le royaume a commencé par une politique « répressive, avant d’entamer une approche de moralisation de la vie publique (1999-2002), puis une programmation gouvernementale (2005 et 2010), pour adopter finalement une vision globale et intégrée ».

Ali Rame a expliqué que cette approche a porté sur deux étapes qui sont l’adhésion du Maroc à la Convention des Nations Unies Contre la Corruption (CNUCC) (2003-2007) et la constitutionnalisation du principe de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption (2011-2015).

En 2015, le royaume a réalisé deux pas importants dans la lutte contre la corruption, relève le responsable précisant qu’il s’agit de la promulgation de la loi n° 113-12 relative à l’Instance nationale de probité, de prévention et de lutte contre la corruption comme une instance constitutionnelle indépendante, et l’adoption de la stratégie nationale de lutte contre la corruption, qui englobe les différentes initiatives et unifie les efforts dans un cadre global et intégré. 

Rame a affirmé que l’ICPC a fourni un effort « remarquable  dans la lutte contre la corruption à l’échelle nationale malgré ses ressources humaines et techniques limitées, à travers l’accompagnement des projets de lois et des politiques publiques, le développement de la coopération nationale et internationale et la réception et traitement des plaintes et dénonciation ». Il a ajouté qu’après huit ans d’exercice, « l’ICPC fait encore face à un certain nombre de contraintes qui ont limité l’efficacité et l’efficience de ses politiques ».

Ces contraintes relèvent du manque de la dimension stratégique et la faiblesse de la coordination des acteurs institutionnels ainsi que le manque d’autonomie administrative et financière de l’instance, a-t-il dit.

Pour sa part, le Secrétaire général de Transparency Maroc, Fouad Abdelmoumni, a souligné que le Maroc a lancé un certain nombre d’actions « dans le bon sens », en particulier la mise en place de l’ICPC et l’adoption de la stratégie nationale de lutte contre la corruption.

Abdelmoumni a appelé à mettre en œuvre l’ensemble des actions prévues dans cette stratégie, déplorant « l'absence de mobilisation » des instances de gouvernance pour la bonne application de cette stratégie.

Il a aussi souligné la nécessité de « prendre à bras le corps la problématique de la corruption », afin de transiter d’une situation où la corruption est « systémique et endémique » à une situation où elle deviendrait « marginale », précisant que Transparency mène plusieurs actions au Maroc en vue de dénoncer et interpeller la société aux dangers de la corruption, et d’accompagner les instances de gouvernance chargées de la lutte contre ce fléau.

Toutefois, il a déploré, la capacité d’action de cette ONG  qui reste « limitée », faisant remarquer que la lutte contre la corruption dépend d’une « véritable volonté politique ».

Au cours des dernières années, le gouvernement marocain a pris plusieurs mesures en vue de limiter l’expansion de ce fléau dans la société, notamment la mise en place du portail électronique « stopcorruption » et d’un numéro vert pour dénoncer les actes de corruption, la présentation devant la justice de plusieurs affaires de corruption relevées par la Cour des comptes ou encore la proposition d'une nouvelle loi encadrant l'Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption.

Cependant, en dépit de tous ces efforts déployés autant par les pouvoirs publics que par la société civile, ce phénomène demeure très présent dans le quotidien des marocains, ce qui exige une intensification de la lutte et de la répression.

« La corruption n’est pas une fatalité, pas plus qu’elle n’a fait partie un jour du caractère des marocains. Or la notion de corruption a été galvaudée et quasiment normalisée dans la société », avait affirmé  le roi Mohammed VI dans son discours adressé à la nation le 30 juillet 2016, à l'occasion de la Fête du Trône.

Le souverain avait souligné que « la lutte contre la corruption est l’affaire de l’Etat et de la société. L’Etat avec ses institutions, à travers l’opérationnalisation des dispositifs juridiques de lutte contre ce phénomène dangereux, la criminalisation de toutes ses manifestations et la répression sévère des prévaricateurs et la société dans toutes ses composantes, en réprouvant cette pratique, en dénonçant ses auteurs et en inculquant le devoir de s’en démarquer, tout en gardant à l’esprit les principes de notre sainte religion et les valeurs marocaines authentiques que sont la vertu, la probité et la dignité ».

 

lire aussi