La leçon d’Al Hoceima : Stabilité et exigence de réformes

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Les pouvoirs publics ont peiné à décoder les signaux faibles qu’émettait le terrain et n’ont pas su mettre en œuvre, à temps, les stratégies de réponse anticipative qui s’imposaient. Le pourrissement de la situation ne pouvait donc que révéler les défaillances analytiques de la gouvernance de la crise, le dérèglement de la chaîne de décision et engendrer une communication inappropriée

Toutes les discussions autour des événements d’Al-Hoceima ne vaudront jamais une information aussi concrète que possible sur ce que font ou ne font pas les pouvoirs publics depuis quelques mois déjà. Et de quelle manière réfléchissent ou plutôt refusent de réfléchir les partis politiques et leurs prolongements locaux et régionaux à propos de ce phénomène qui exprime un mal-être, et qui a tous les symptômes de la contagion ?

Comment ces partis en sont-ils arrivés à faire l’autruche devant l’impératif du savoir social et de l’analyse sociologique ?

Une passivité autiste et médusée qui ne saurait les exonérer du devoir d’inventaire en se posant une question, une seule : qui pense pour eux!
Et pourquoi la "force nue de l'Etat" comme l'indiquait très justement Max Weber devait être "étalée dans la rue, l'organisation spontanée dans l'insurrection, la peur de la victoire sur la peur", sans que les leaders locaux ou nationaux n'aient été capables de remplir leur mission constitutionnelle et d’occuper l’espace de médiation et d’interposition qui leur est légitimement dévolue. Quelle lecture faire de cette paralysie systémique depuis l'automne dernier. Quelle autre prétexte ou excuse peut-on invoquer sinon l’érosion irrémédiable de l'Autorité suite aux dernières élections législatives et son corollaire qu’a été le blocage gouvernemental! Aucun leader, aucun parti ni une autre institution de médiation politique n’a eu l’audace du devoir et le courage politique d’aller sur le terrain tenter de démêler l’écheveau d’une crise qui s’avère être autant politique que sociale. Le déroulement de la campagne législative et les interventions hétérodoxes qui l’ont marquée, la faillite de la gouvernance partisane locale, envoyaient pourtant des signaux précurseurs que tout la monde a feint d’ignorer. Transformer les résultats électoraux en un ascenseur social et pour juguler définitivement toute forme d’opposition,  est le prélude de la confrontation directe avec le système institutionnel en dehors des voies et moyens qu’offre le débat politique légitime.

Le tragi-comique de cet activisme est finalement l’échec du jeu institutionnel et son impuissance à prévenir la radicalisation de la revendication et à éviter tous les dérapages. L'erreur serait de croire, qu'à Al-Hoceima comme ailleurs au Maroc, que les populations silencieuses ou passives, actrices d’une stabilité de façade, n’aient pas de revendications et d’exigences profondes : ce serait une grave méprise que de penser qu'elles étaient sans besoins.

Les pouvoirs publics ont peiné à décoder les signaux faibles qu’émettait le terrain et n’ont pas su mettre en œuvre, à temps, les stratégies de réponse anticipative qui s’imposaient. Le pourrissement de la situation ne pouvait donc que révéler les défaillances analytiques de la gouvernance de la crise, le dérèglement de la chaîne de décision et engendrer une communication inappropriée. Le cycle infernal panique-improvisation-répression s’installe avec son lot de drames et de gâchis inutiles.
 La nature complexe de la revendication, pose désormais le problème crucial de l'éthique de responsabilité ainsi que du rôle et de l'efficacité de nos élites. La solution réside de ce fait, dans la mise à plat de la problématique avec sérénité et humilité, pour l’identification des mesures de restauration de la confiance et la création du climat propice à la réforme….

 

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