La visite royale en France a ?t? un moment important. Les deux chefs d?Etat ont eu un entretien qui a, s?rement, donn? lieu ? des ?changes sur les sujets d?actualit?, le terrorisme par exemple, les questions ?conomiques, ou la reconfiguration g?ostrat?gique en cours.

Cependant, ce sont d?autres ?v?nements qui ont ?t? mis en ?vidence. Ils concernent la culture, la profondeur des relations humaines entre les deux pays, li?s par une histoire qui d?passe de loin, de tr?s loin, l?interm?de du protectorat. Le Mar?chal Lyautey avait dit, devant l?Assembl?e nationale fran?aise, que ?le Maroc est une nation p?trie d?histoire que l?on ne peut coloniser ind?finiment?. La visite royale, en s?attachant ? la culture, puisque Mohammed VI va pr?sider ? Paris la c?r?monie de lancement des travaux du ?Centre culturel du Maroc? en pr?sence de Fran?ois Hollande, d?montre une osmose entre les deux nations, au-del? de la conjoncture.

La culture, voie du respect de l?autre, de l?int?gration, de l?alt?rit?, est la r?ponse idoine aux peurs et au renfermement. L?intol?rance et le racisme ont pour g?niteur premier un degr? ?lev? d?ignorance. Cette hauteur de vue donne ? cette visite un sens particulier. C?est une approche plurielle d?une relation entre deux nations, avant d??tre une relation entre deux Etats. Les deux Etats ont cependant un dossier plan?taire ? g?rer ensemble. La COP21 a ?t? un succ?s inesp?r? pour l?environnement. La France doit assurer le suivi des engagements avant de passer le relais au Maroc, qui accueille la COP22 en novembre prochain ? Marrakech.

Les ?quipes en charge du dossier, dans les deux pays, doivent assurer une collaboration parfaite, pour r?pondre ? un risque humanitaire, dans les meilleures conditions. Ce n?est possible que quand les relations sont d?une profondeur qui d?passe les al?as, les contingences, ce qui est le cas.

Il a ?t? fait cas de la nomination d?Audrey Azoulay ? la t?te du minist?re de la Culture. Elle est Marocaine, juive et fran?aise. Elle a ?t? nomm?e parce qu?elle ma?trise son sujet, qu?elle conna?t plus particuli?rement le monde du spectacle, et est tr?s sensible aux probl?mes des intermittents. Quel symbole qu?elle soit ministre en France, alors que son p?re est Conseiller du Roi au Maroc !

Que cela soit fait en pleine pol?mique sur la d?ch?ance de nationalit?, n?est pas anodin. Les Fran?ais du Maroc, les Marocains de France, ont tous particip? dans les deux pays ? des avanc?es essentielles. Les premiers ont ?t? des pionniers dans des secteurs sensibles, comme la m?decine, ou ? la t?te d?une cr?ation qui permet ? la culture marocaine d?atteindre l?universel. Les seconds ont apport? ? la France une nouvelle dimension de sa vocation humaniste et ont permis de renouveler les doxa des courants de pens?e. Ces liens entre le Maroc et la France, multiples, riches, ne sont dirig?s contre aucun pays tiers, aucune autre alliance. Ils d?passent les jeux r?gionaux, les enjeux strat?giques. Ils sont tellement forts qu?ils ont r?sist? aux alternances, aux crises, ? la ? realpolitik ?.

La visite du Roi Mohammed VI a ?t? l?occasion de rappeler, sans communication abusive, que les relations entre les deux nations ?taient d?abord culturelles, humaines, autour de valeurs communes. Le reste n?est qu?une question de gestion, ce qui ne peut qu??tre ?ph?m?re. L?amiti? maroco-fran?aise ne peut que traverser les si?cles.