La nouvelle politique mettra-t-elle fin au conflit du Sahara ? (Par Bilal Talidi)

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Le ministre des Affaires étrangères marocain, Nasser Bourita, et son homologue bahreïni Abdullatif bin Rashid Al Zayani à Laayoune pour l’inauguration du consulat bahreini.

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L’accord entre le Maroc et les Etats Unis d’Amérique, annoncé le 10 décembre après une maturation de deux ans, a suscité une grande controverse politique et médiatique.

 Certains parlent de deal ou d’une transaction : marocanité du Sahara contre normalisation avec Israël. D’autres ont mis en doute le gain politique pour le Maroc d’une annonce d’un président en fin de mandat, estimant que sa déclaration ne repose sur aucun appui juridique. Ils sous-entendent par là que le Maroc risque de se retrouver mal récompensé en retour par une transaction payée d’avance. 

Les données indiquent que l’approche marocaine dans la gestion de la cause nationale n’a rien changé dans les règles du jeu tant les rapports de l’ONU et les résolutions du Conseil de sécurité obéissent encore à la logique de l’équilibre et la notion de ni vainqueur ni vaincu. Ainsi, en dépit des très sérieuses propositions à travers le référendum et ensuite le plan d’autonomie, l’Algérie a persisté à soutenir le Polisario et à contrecarrer toute option sérieuse marocaine pour la résolution du conflit. 

Les options de développement du pays, passant par son extension vers ses prolongements africains que contrarie l’hostilité algérienne aux intérêts du Maroc, alliées à la sourde oreille que rencontrent les appels du Roi Mohammed VI à l’Algérie pour mettre un terme au conflit en vue de s’atteler aux intérêts des peuples maghrébins et à l’activation des instances de l’UMA, ont, entre autres, fini par convaincre les décideurs politiques de l’impossibilité  de persister dans cette voie. 

Pour rappel, le Maroc a commencé par retenir l’option référendaire afin de convaincre la communauté internationale, et pourquoi pas l’Algérie aussi, de son infaisabilité.  Il a ensuite présenté son plan d’autonomie comme réponse idoine à « l’autodétermination », sachant que l’autonomie dans l’acception du droit international est la forme achevée de l’exercice de l’autodétermination. Chaque fois, il s’est heurté à l’immobilisme du régime algérien qui ne veut ni négocier directement avec le Maroc, ni contribuer à la résolution du conflit.

Si bien que lorsque l’Administration américaine a proclamé le deal du siècle, le Maroc, estimant que celle-ci cherche à mobiliser un large soutien à son initiative en recourant à une panoplie de pressions et d’incitations, a peut-être perçu une occasion à saisir. Dans ce contexte particulier, il a probablement considéré que le moment était venu de réaliser une précieuse avancée dans l’affaire du Sahara. Et afin de mieux réussir son essai, il s’est donné du temps, deux ans, pour réunir les conditions optimales et avoir en main le maximum de cartes pour négocier avec les Etats Unis.

On n’a rien de précis sur les détails de ces négociations qui ont pris deux ans. Pour l’instant rien n’a été dévoilé sur ses implications politiques, diplomatiques, économiques ou militaires. Tout ce que l’on sait c’est l’annonce de la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur son Sahara, la décision d’ouvrir un consulat américain à Dakhla et le rétablissement des relations diplomatiques entre Rabat et Tel-Aviv.

Politiquement et diplomatiquement il sera difficile à Washington de renier l’annonce présidentielle et il n’y a pas de précédents qui feront craindre semblable éventualité. Le Maroc a, donc, réalisé ainsi un important acquis qui va au moins le débarrasser des tracas de la position américaine et de oscillations de ses propositions (partage du Sahara, extension des prérogatives de la Minurso aux droits de l’homme).   

Et s’il n’est pas certain que la nouvelle position américaine induira pour le Maroc la fin du conflit, elle fera au moins comprendre à Alger que les larges marges de manœuvre qu’il avait, se sont rétrécies. Désormais l’Algérie ne sera plus en face du seul Maroc, mais se heurtera aussi aux intérêts américains dans la région.  Car ce qui est sûr, c’est que Washington ne va pas ouvrir un consulat à Dakhla pour que ses fonctionnaires bronzent su soleil de la baie, mais pour travailler aux grands intérêts économiques des Etats Unis dans la région, interdisant du coup à Alger de s’essayer à ses manœuvres habituelles.   

Quant aux relations du Maroc avec Israël, il n’y a aucun indicateur étayé qui renseigne sur leurs limites. Tout au plus savons-nous que le Maroc a officiellement réaffirmé que sa position n’a pas changé, qu’il s’agisse des droits fondamentaux du peuple palestinien ou de la question d’Al Qods. Le ministre des Affaires étrangères marocain, Nasser Bourita, a tenu de son coté à indiquer dans ses déclarations que le Maroc avait par le passé des relations avec Israël, rappelant qu’elles ont été gelées, ce qui peut laisser entendre que rien, le cas échéant, n’interdit qu’elles le soient de nouveau. Mais dans tous les cas de figure, et jusqu’à plus ample informé permettant de lire correctement la position du Maroc, il serait prématuré et hasardeux de l’évaluer en l’état actuel des choses.  

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