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Iran: la presse conservatrice salue la victoire de Raïssi
Des Iraniennes tiennent le portrait du nouveau président iranien élu Ebrahim Raïssa, le 19 juin 2021 à Téhéran
La presse conservatrice de Téhéran salue dimanche la victoire d'Ebrahim Raïssi à la présidentielle iranienne, accueillie vertement par les deux grands adversaires de la République islamique sur le plan international: Washington et Israël.
Chef de l'Autorité judiciaire, M. Raïssi, ultraconservateur âgé de 60 ans, a été proclamé vainqueur samedi de la présidentielle, avec près de 62% des voix.
Le scrutin qui s'est tenu vendredi a été marqué par une forte abstention: à 48,8%, le taux de participation est le plus faible enregistré à une présidentielle depuis la proclamation de la République islamique en 1979.
Pour le quotidien conservateur Ressalat, l'élection de M. Raïssi marque rien moins que "l'aube d'une ère nouvelle".
Hodjatoleslam (rang inférieur à ayatollah dans la hiérarchie du clergé chiite), M. Raïssi faisait figure d'archifavori, faute de concurrence réelle après la disqualification de ses principaux adversaires.
Le gagnant de la présidentielle, qui doit succéder au modéré Hassan Rohani en août, hérite d'un pays en proie à une grave crise économique, conséquence des sanctions imposées par Washington contre l'Iran après la décision de l'ancien président américain, Donald Trump, de dénoncer en 2018 l'accord international sur le nucléaire iranien conclu en 2015 à Vienne.
"Propagande ennemie"
Samedi, le guide suprême, Ali Khamenei, avait estimé que "la nation iranienne" était "le grand vainqueur" de l'élection face aux appels au boycottage du scrutin lancés par des mouvements d'opposition en exil.
Le journal ultraconservateur Javan, qualifie le niveau de la participation d'"acceptable et logique", compte tenu du "mécontentement face à la situation économique et de la [pandémie de] coronavirus".
Autre organe de presse ultra, Kayhan juge même la participation a été "épique" vu les difficultés quotidiennes des électeurs et la "propagande ennemie".
Semblant analyser différemment les résultats du scrutin, Arman-é Melli, journal réformateur appelle M. Raïssi à "gagner la confiance de ces 70%" d'électeurs qui n'ont pas voté pour lui.
A l'étranger, le futur président a été félicité par le président russe, Vladimir Poutine, et son homologue syrien, Bachar al-Assad, le président des Emirats arabes unis, cheikh Khalifa ben Zayed al-Nahyane, et l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Halmad al-Thani.
Il a aussi reçu les encouragements du mouvement islamiste palestinien Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, et du mouvement chiite libanais Hezbollah, tous deux soutenus par Téhéran.
A l'inverse, Washington a regretté samedi que "les Iraniens [aient] été privés de leur droit à choisir leurs propres dirigeants à travers un processus électoral libre et honnête".
"Dernière minute"
Le nouveau Premier ministre israélien, Naftali Bennett, a pour sa part estimé dimanche que M. Raïssi n'avait "pas été choisi par le peuple iranien mais par (l'ayatollah) Khamenei".
"Le choix de Raïssi est un signal pour que les puissances se réveillent, un signal de dernière minute peut-être avant de revenir sur l'accord sur le nucléaire, pour leur permettre de comprendre avec qui elles font affaire et quel type de régime elles vont choisir de renforcer", a déclaré M. Bennett.
Israël accuse Téhéran de chercher à se doter de l'arme nucléaire en secret, ce que la République islamique a toujours nié.
Bien qu'issu d'un courant politique se caractérisant par l'antiaméricanisme et le rejet de l'Occident, M. Raïssi a rappelé pendant la campagne que la priorité du pays -- conformément à la ligne fixée par M. Khamenei -- était d'obtenir la levée des sanctions américaines imposées à l'Iran sous la présidence Trump pour sortir le pays de l'ornière.
Son élection ne devrait donc pas avoir d'effet sur les négociations en cours pour sauver l'accord de Vienne en y réintégrant les Etats-Unis.
La solution passe a priori par la levée des sanctions américaines demandées par l'Iran en échange du retour de Téhéran à l'application pleine et entière de l'accord, la République islamique ayant abandonné en riposte au blocus américain la plupart des garde-fous à ses activités nucléaires controversées qu'elle avait acceptés à Vienne.