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La Macronie a transformé les autorités indépendantes en ''bras armés'' de l’exécutif (journaux)
‘’De plus en plus de gens préfèrent [le recasage] plutôt que d’entrer au gouvernement, où l’on a aucune marge de décision face à l’Élysée”
Paris - La Macronie a transformé les autorités indépendantes en France, censées exercer un contre-pouvoir sur le gouvernement, en "bras armés" de l’exécutif, écrit, mercredi, un jourbal local.
Depuis 2017, le président Emmanuel Macron a placé plusieurs de ses soutiens à la tête de nombre de ces instances, note le journal français Libération dans une enquête dédiée à cette question, estimant que cela revient à dire qu’Emmanuel Macron veut que ces autorités indépendantes, censées être des garde-fous ou des contre-pouvoirs à l’intérieur de l’État, se meuvent en bras armés de l’exécutif dans les secteurs sur lesquels elles sont censées veiller.
Le fait qu’elles soient conçues à l’origine par le législateur comme des outils de limitation du “pouvoir exorbitant” de l’exécutif dans le système politique français explique la vision en cours à l’Élysée, qui “crée d’autant plus de résistances, notamment au Parlement”, explique le quotidien.
Le dernier épisode en date est la nomination d’un ex-directeur de cabinet de l’actuelle cheffe du gouvernement, Elisabeth Borne, au ministère des Transports (2017-2019), à la tête de la Commission nationale du débat public (CNDP), relève le journal.
Cette nomination est passée d’extrême justesse, sans vote majoritaire. Après avoir été validée par les commissions compétentes du Sénat et de l’Assemblée nationale, les parlementaires appelés à trancher ont pourtant manifesté une large hostilité à cette suggestion : 50 d’entre eux se sont prononcés contre et seulement 38 pour, note la publication.
Mais c’est au Sénat que Marc Papinutti a fait face à la plus grande adversité, car nombre d’élus de la Chambre haute ont reproché à Papinutti “de ne pas présenter toutes les garanties requises”, poursuit-on, estimant que cet épisode “illustre l’existence, au sein de l’État, d’un nouveau foyer de tension dans la vie de moins en moins paisible du macronisme”.
Le président de la République doit désormais batailler pour imposer certaines nominations, pourtant l’une de ses prérogatives majeures, note le journal, relevant que dans ces affaires de nominations, le fait de ne plus disposer d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale ne simplifie pas la tâche du chef de l’État.
Mais, explique-t-on, les raisons de cet affaiblissement d’autorité sont aussi à chercher ailleurs, dans “la façon toute personnelle, verticale et dirigiste, qu’a le Président de considérer ces corps intermédiaires de l’intérieur, notamment les autorités administratives indépendantes (AAI)”.
Pour le député socialiste Philippe Brun, magistrat administratif de métier, cité par le journal, “avec Emmanuel Macron, nous assistons comme jamais auparavant à la nomination à ces postes d’amis du pouvoir, en lieu et place de personnalités reconnues pour leur indépendance”. A ses yeux, il s’agit d’une "reprise en main, et la disparition de l’impartialité de l’État".
Les exemples confortant cette appréciation très critique sont nombreux, note Libération. ''Comment interpréter l’usage par le chef de l’État de ces organes administratifs de décision ou de consultation ?'', s’interroge le journal.
Si l’Élysée n’a pas souhaité répondre à la question du journal, un “très bon connaisseur” de ces outils, cité par la publication, y voit se dessiner un ''phénomène de recasage de la macronie'' et "une forme de récompense à des gens loyaux”, d’autant qu’il s’agit de “jobs très attractifs, où l’on dispose d’une certaine autonomie, où l’on prend des décisions structurantes et où l’on est bien payé, mieux qu’un ministre”.
“De plus en plus de gens préfèrent cela plutôt que d’entrer au gouvernement, où l’on a aucune marge de décision face à l’Élysée”, relève cette même source, pour qui, comparé à ses prédécesseurs, Emmanuel Macron “a moins de tolérance à l’égard des voix alternatives”