Actu
Mami Wata, la déesse vaudou de la mer, célébrée au Bénin
Célébrations du culte de Mami Wata, à Ouidah le 10 janvier 2022
Le grondement incessant des vagues s'écrasant sur le sable rythme les chants d'une quarantaine d'adeptes de Mami Wata, la déesse de la mer célébrée lundi sur une plage du sud du Bénin à l'occasion de la fête nationale du vaudou.
Chaque 10 janvier, les Béninois rendent hommage aux divinités du vaudou, religion bâtie autour des forces de la nature et du lien avec les ancêtres, dont les représentations peuvent être des objets ou des éléments naturels.
Les initiés pratiquent les rites sur la plage de Ouidah, le 10 janvier 2022
Il y a Hêviosso, le dieu du tonnerre, Sakpata, le dieu de la terre ou encore Kokou, celui de la guerre. Mais à Ouidah, petite ville au bord de l'océan Atlantique et ancien port esclavagiste, c'est Mami Wata - divinité vaudou la plus connue dans le monde - qui est célébrée chaque année.
Le vaudou, originaire du royaume de Dahomey (actuels Togo et Bénin), n'est pas précisément né à Ouidah.
Mais c'est de là, avec les millions d'esclaves qui y ont transité avant leur déportation vers le Nouveau Monde à partir du 18e siècle, que ce culte s'est exporté de l'autre côté de l'Atlantique.
Il compte aujourd'hui 50 millions de membres à travers le monde, que l'on retrouve en Louisiane, au Brésil, en Haïti etc.
Sur la plage de Ouidah, sous un soleil écrasant, la quarantaine d'adeptes de la déesse, vêtus d'un pagne blanc et parés de perles, forment un demi-cercle face à l'océan.
Parmi eux, Gnikplin Hounon Evéolé, 70 ans, qui a fait le déplacement depuis le Togo voisin où elle habite. La dignitaire était là dès les premières heures. Chantant et dansant, elle a fait le tour de la ville avec les autres adeptes et dignitaires pour "la marche de la purification".
Tout au long de l'année "je prends soin de ma divinité, mais chaque 10 janvier, je ne vais qu’à Ouidah parce que c’est ici sur cette plage que se trouve l’âme de cette célébration, l’âme du Vodoun", confie-t-elle à l'AFP.
"Mami Wata ce n’est pas un fétiche, c'est la Marie des eaux. Elle vit dans la mer et ses rituels ne se font qu'autour de la mer", ajoute la dignitaire. Un grand nombre de Béninois pratiquent le vaudou en parallèle à d'autres religions monothéistes, christianisme ou islam.
Secret et mystère
Selon ses adeptes, Mami Wata a le pouvoir de procurer santé, fécondité et beauté. Sur la plage, la majorité des adeptes sont des femmes.
"Je dois toute ma richesse à cette divinité. Elle est source de bonheur et de bienfaisance. L’essentiel est de respecter ses préceptes. Tu amasses les richesses sans savoir d’où elles viennent. Mami Wata t’enrichit même contre ton gré", explique souriante Gnikplin Hounon Evéolé.
A ses côtés, Noëllie Tohoundo, 32 ans, affirme devoir son bonheur familial à la divinité. Il y a trois ans, son mari et ses enfants sont tombés très malades, raconte-t-elle. "Mais la reine des eaux les a sauvés, et c’est après leur guérison que la divinité m’a désignée comme adepte".
Les non-initiés savent peu de choses sur la déesse ou son culte, tout comme sur les autres divinités vaudou, car il est interdit aux adeptes de révéler à l’extérieur ce qui se dit et s’enseigne dans ce culte.
Sur la plage, les adeptes ont d'ailleurs procédé à diverses offrandes et libations, mais impossible de pouvoir les décrire alors que les non-initiés sont tenus à bonne distance de la cérémonie.
Et en dépit des richesses apportées par Mami Wata, le secret et le mystère qui entourent le culte ne sont pas toujours source de bonheur pour ses adeptes.
"Partout où je passe, j’ai la grâce sur moi, mais je dois dire que les gens ont parfois peur de moi", confie Renaudia Houngabdji de son nom d’adepte "Zozodia".
"Certains hommes ont peur de m’approcher en tant que jeune fille, mais ils ont tort", sourit-elle, car "toute ma beauté, tous mes avoirs, je les dois à ma divinité".