Actu
Près de Londres, se multiplient les champs de taxis abandonnés à cause de la pandémie
Des taxis londoniens parqués dans un champ à Epping, au nord-est de Londres, le 19 novembre 2020
Avec la pandémie, trouver une course est devenu tellement compliqué pour les "cabs", mythiques taxis noirs londoniens, que nombre d'entre eux sont désormais parqués dans des champs en périphérie de la ville.
Tony Georgiou contemple un champ rempli de taxis garés à la queue-leu-leu. "J'ai perdu le compte du nombre de véhicules qu'on a ici", se désespère le dirigeant de GB Taxis Limited, qui loue habituellement les fameuses voitures aux chauffeurs possédant une licence, "Il doit y avoir entre 150 et 200 voitures qu'on a retirées de la circulation".
Ces taxis bombés iconiques ont été conçus à l'origine pour accueillir des passagers dotés de chapeaux haut-de-forme.
Mais dans un centre-ville vidé de ses habitants par un second confinement, les chauffeurs ont pour la plupart fait le choix de rendre leur taxi de location. Débordées par l'afflux de retours, les sociétés loueuses se retrouvent obligées de les stocker dans des champs proches de Londres.
"Ca arrive partout, tout autour de la M25 (route majeure autour de Londres, ndlr), il y a des champs plein de cabs comme ça", explique à l'AFP Steve McNamara, secrétaire général de l'Association des chauffeurs de taxi avec licence (LTDA), pour qui cette situation "complètement inédite" est intenable pour certains.
Tony Georginou affirme qu'une cinquantaine de ses véhicules se sont déjà fait voler des pièces, qui coûteront 120.000 livres à remplacer. "Je ne sais pas si nous allons nous en sortir", explique-t-il à propos de son entreprise ouverte il y a 16 ans, "C'est un combat".
6.000 taxis en moins
Successeurs des taxis londoniens à chevaux apparus au XVIIe siècle, les "cabs" noirs sont un emblème de la vie britannique au même titre que les cabines téléphoniques rouges et les policiers casqués. "Les seuls qui restent sont désormais les taxis", affirme M. McNamara. Mais pour combien de temps ?
Actuellement, seuls 20% des taxis roulent, affirme-t-il, se basant sur les voitures de son association -qui en compte 11.000, soit plus de la moitié des 20.000 de la ville- et les chiffres officiels fournis par l'aéroport londonien d'Heathrow.
"Nous avons perdu 5.000 à 6.000 véhicules depuis juin", affirme-il, car si certains chauffeurs font des petits boulots comme des livraisons pour les supermarchés, la "grande majorité" ne travaille plus.
Ceux qui ont fait le choix de continuer à prendre des clients pourraient gagner 20% de leur salaire annuel, qui peut schelonner entre 15.000 et 80.000 livres par an.
Pour Steve McNamara, le nouveau coronavirus est "sans aucun doute le principal facteur" responsable de la baisse du nombre de taxis, et non les applications comme Uber.
Interrogés par l'AFP, les transports londoniens (TfL) affirment eux que le nombre de taxis avec licence est passé de 19.000 véhicules au 1er mars à un peu moins de 15.000 au 8 novembre.
Aide financière
A l'aéroport de Heathrow, auparavant le plus fréquenté d'Europe, Sam Houston fait le pied de grue. Il attend d'habitude 3h pour avoir une course, mais cela monte à 20h, voire une journée, en période de coronavirus.
Le chauffeur de 45 ans, qui exerce depuis 8 ans, explique qu'en temps normal cette profession est "un bon gagne-pain". Mais la pandémie représente "la période la plus difficile que j'aie jamais connue", lâche-t-il.
Ses collègues ont essayé d'obtenir l'aide du système de chômage partiel pour les travailleurs indépendants, mais beaucoup n'entraient pas dans les cases, selon lui.
"Nous voulons un soutien ciblé du gouvernement pour notre secteur", réclame-t-il, rejoint par Steve McNamara, selon qui les chauffeurs peinent à s'en sortir financièrement alors que beaucoup ont récemment investi dans des taxis électriques ou des machines de paiement.
Il réclame une aide financière spécifique semblable à ce qui a été fait pour la restauration, affirmant avoir "été touché aussi durement -si ce n'est plus - que ce secteur".