A la veille de la visite de Poutine à Pyongyang, des soldats nord-coréens franchissent la frontière avec la Corée du Sud

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Kim Jong-un (archives)

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Séoul - Des dizaines de soldats nord-coréens ont franchi la frontière avec la Corée avant de battre en retraite sous les tirs de sommation de l’armée coréenne, a annoncé mardi l’état-major interarmées de Séoul.

"Environ 20 à 30 soldats nord-coréens mobilisés pour des travaux dans la Zone démilitarisée (DMZ) ont franchi la Ligne de démarcation militaire (MDL) qui divise les deux Corées avant de regagner le Nord suite à un avertissement par haut-parleurs et des coups de semonce tirés par l’armée sud-coréenne ce mardi matin", a fait savoir l’état-major, cité par l’agence de presse coréenne Yonhap.

Ce nouvel incident intervient alors que Vladimir Poutine s’apprêtait à se rendre en Corée du Nord, où il devait se rendre mardi 18 juin 2024. A quelques heures de son arrivée à Pyongyang, le président russe s'est félicité du "ferme soutien" apporté par la Corée du Nord à l'opération militaire russe en Ukraine.
Ce n’est pas la première incursion militaire nord-coréenne chez son voisin. Plusieurs soldats nord-coréens ont été blessés par l’explosion de mines alors qu’ils menaient des travaux de déblayage et posaient des mines le long de la frontière, selon Séoul.

Le 9 juin, plusieurs militaires du Nord étaient brièvement entrés en territoire coréen avant de se replier suite à des avertissements sonores et des tirs de sommation des soldats coréens.

Il s’agit donc de la deuxième fois en moins de deux semaines que des soldats nord-coréens franchissent la ligne de démarcation intercoréenne séparant les deux États.Les deux pays sont séparés par une DMZ de 4 km de large, au milieu de laquelle se situe la ligne de démarcation. Les deux côtés de la DMZ sont lourdement fortifiés tandis que la ligne de démarcation n’est matérialisée que par des panneaux.

Les relations entre Séoul et Pyongyang traversent actuellement une période parmi les plus difficiles. Les deux pays sont techniquement toujours en guerre, le conflit les ayant opposés de 1950 à 1953 s’étant terminé par un armistice et non un traité de paix.

Poutine à Pyongyang

Le président russe Vladimir Poutine s'est félicité mardi du "ferme soutien" apporté par la Corée du Nord à l'opération militaire russe en Ukraine, à quelques heures de son arrivée à Pyongyang pour une visite exceptionnelle, précédée d'incidents à la frontière intercoréenne.

M. Poutine doit effectuer mardi et mercredi une visite d'Etat en Corée du Nord, à l'issue de laquelle un accord de partenariat stratégique pourrait être signé entre ces deux pays dont l'Occident perçoit l'alliance comme une menace.

D'immenses banderoles souhaitant "ardemment la bienvenue au président Poutine" et représentant son visage souriant ont été accrochés aux lampadaires de Pyongyang, aux côtés de drapeaux russes, comme l'ont montré des images diffusées par les médias d'Etat russes.

Moscou et Pyongyang sont alliés depuis la fin de la guerre de Corée (1950-1953), mais se sont rapprochés depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022.

"La Russie a soutenu (la Corée du Nord) et son peuple héroïque dans leur lutte pour défendre leur droit à choisir la voie de l'indépendance, de l'originalité et du développement par eux-mêmes dans la confrontation avec l'ennemi rusé, dangereux et agressif, hier et demain également, et elle les soutiendra indéfectiblement à l'avenir", a écrit M. Poutine dans une tribune publiée par le quotidien officiel nord-coréen Rodong Sinmun et l'agence KCNA.

Il a également affirmé que Pyongyang "soutient fermement" l'offensive militaire russe en Ukraine et l'en a remercié.

Américains et Européens s'inquiètent depuis des mois du rapprochement accéléré de Moscou et Pyongyang, accusant les Nord-Coréens de livrer des munitions à la Russie pour son assaut contre l'Ukraine en échange d'une assistance technologique, diplomatique et alimentaire.

Cette visite "montre à quel point le président Poutine et Moscou sont désormais dépendants des pays autoritaires du monde entier. Leurs amis les plus proches et les plus grands soutiens de l'effort de guerre russe - la guerre d'agression - sont la Corée du Nord, l'Iran et la Chine", a commenté lundi le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg depuis Washington, soulignant que la Russie, membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, désormais "viole les sanctions" imposées à la Corée du Nord.

Partenariat stratégique 

"Ce qui nous préoccupe, c'est l'approfondissement de la relation entre ces deux pays, pas seulement à cause de l'impact que cela aura sur le peuple ukrainien, car nous savons que des missiles balistiques nord-coréens sont toujours utilisés pour frapper des cibles ukrainiennes, mais aussi parce qu'il pourrait y avoir une certaine réciprocité qui pourrait affecter la sécurité de la péninsule coréenne", a déclaré quant à lui le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby.

Le conseiller diplomatique de Vladimir Poutine, Iouri Ouchakov, a dit aux médias russes que "des documents importants, très significatifs" seront signés, évoquant "la conclusion possible d'un accord de partenariat stratégique global".

"Ce traité, s'il est signé, sera bien sûr conditionné par l'évolution profonde de la situation géopolitique dans le monde et dans la région et par les changements qualitatifs qui ont récemment eu lieu dans nos relations bilatérales", a-t-il relevé.

Le maître du Kremlin est accompagné de son chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, et de son ministre de la Défense, Andreï Belooussov.

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kuleba a exhorté la communauté internationale à contrer "l'amitié virile" entre Vladimir Poutine et Kim Jong Un en augmentant les livraisons d'armes à Kiev.

La meilleure façon d'y répondre est de continuer à renforcer la coalition diplomatique pour une paix juste et durable en Ukraine et de livrer davantage de patriotes et de munitions à l'Ukraine", a déclaré M. Kuleba.

"Frères d'armes" -

Ce voyage en Corée du Nord a lieu neuf mois après que M. Poutine a accueilli Kim Jong Un dans l'Extrême-Orient russe, une visite au cours de laquelle les deux hommes s'étaient mutuellement couverts d'éloges mais sans conclure, officiellement du moins, d'accords.

A en croire les Occidentaux, Pyongyang a puisé dans ses vastes stocks de munitions pour ravitailler massivement la Russie, et le Pentagone a accusé la semaine dernière Moscou d'utiliser des missiles balistiques nord-coréens en Ukraine.

En échange, selon Washington et Séoul, la Russie a fourni à la Corée du Nord son expertise pour son programme de satellites et a envoyé de l'aide pour faire face aux pénuries alimentaires du pays.

En mars, la Russie avait utilisé son veto au Conseil de sécurité de l'ONU pour mettre fin à la surveillance des violations des sanctions internationales visant la Corée du Nord, un cadeau majeur à Pyongyang.

Surveiller de près 

La Corée du Sud a dit jeudi "surveiller de près les préparatifs" de la visite de Vladimir Poutine.

Séoul a fourni une importante aide militaire à l'Ukraine, où le président sud-coréen Yoon Suk Yeol s'est rendu le mois dernier, et prend part aux sanctions occidentales contre Moscou.

Vladimir Poutine présente son assaut contre l'Ukraine et ses efforts diplomatiques comme une bataille pour lutter contre l'hégémonie américaine sur la scène internationale.

Il s'agit seulement de la deuxième visite en Corée du Nord du dirigeant russe, qui s'y est rendu pour la dernière fois il y a près d'un quart de siècle, peu après son accession au pouvoir, pour rencontrer le père de Kim Jong Un, Kim Jong Il. (Quid avec MAP et AFP)

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