L'Alabama va exécuter un condamné à mort par inhalation d'azote, une première mondiale

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Des militants contre la peine de mort, notamment des membres de MoveOn.org et d'autres groupes de défense, se rassemblent devant la Cour suprême des États-Unis pour tenter une dernière fois d'empêcher l'exécution de Richard Glossip, un détenu de l'Oklahoma, le 29 septembre 2015 à Washington.. (Photo par Larry French / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

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L'Etat américain de l'Alabama s'apprête jeudi à mettre à mort un condamné par inhalation d'azote, une première mondiale critiquée par l'ONU qui a comparé ce mode d'exécution à une forme de "torture".

L'exécution de Kenneth Eugene Smith, définitivement condamné en 1996 à la peine capitale pour le meurtre d'une femme commandité par son mari, sera la première de l'année aux États-Unis, où 24 ont été réalisées en 2023, toutes par injection létale.

La période fixée par la gouverneure républicaine de cet Etat du sud-est du pays, Kay Ivey, pour conduire cette exécution s'est ouverte jeudi à 06H00 GMT et s’est refermée vendredi à 12H00 GMT.

Une précédente tentative d'exécution de Kenneth Eugene Smith par injection létale, le 17 novembre 2022, avait été annulée in extremis, les perfusions intraveineuses pour lui injecter la solution mortelle n'ayant pu être posées dans le temps légalement imparti, après "avoir été attaché plusieurs heures", selon ses avocats.

L'Alabama est l'un des trois Etats américains autorisant les exécutions par inhalation d'azote, dans lequel le décès est provoqué par hypoxie (raréfaction d'oxygène).

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme (HCDH) s'est dit le 16 janvier "alarmé" par cette exécution programmée "au moyen d'une méthode inédite et non testée, l'hypoxie à l'azote".

Cela "pourrait constituer de la torture ou d'autres traitements cruels ou dégradants au regard du droit international", a prévenu une porte-parole du Haut-Commissariat, Ravina Shamdasani, appelant à un sursis à cette exécution.

Le protocole d'exécution par hypoxie à l'azote de l'Alabama ne prévoit pas de sédation, alors que l'Association américaine vétérinaire (AVMA) recommande d'administrer un sédatif aux animaux, même de grande taille, lorsqu'ils sont euthanasiés de cette façon, a souligné la porte-parole.

"Traumatisé" 

Kenneth Eugene Smith, 58 ans, dont tous les recours en Alabama ont été rejetés, a saisi la Cour suprême des Etats-Unis au motif que cette nouvelle tentative d'exécution violerait ses droits constitutionnels, ainsi qu'une demande de sursis. Mais la plus haute juridiction du pays, à majorité conservatrice, a rejeté mercredi cette requête.

Dans ses arguments écrits à la Cour suprême pour s'y opposer, l'Etat d'Alabama était même allé jusqu'à présenter l'hypoxie à l'azote comme "peut-être le mode d'exécution le plus humain jamais inventé".

Kenneth Eugene Smith a présenté un ultime recours jeudi devant la Cour suprême, qui devrait connaître le même sort.

"Je suis encore traumatisé par la dernière fois", a-t-il confié en décembre dans une interview à la radio publique NPR, s'avouant "absolument terrifié" à la perspective de revivre une tentative d'exécution.

Il a été reconnu coupable du meurtre en 1988 d'Elizabeth Dorlene Sennett, 45 ans, commandité par le mari de cette dernière, Charles Sennett, un pasteur lourdement endetté et infidèle, pour faire croire à un cambriolage qui aurait mal tourné.

Malgré le suicide du mari, la police était remontée jusqu'aux deux meurtriers. Le complice de Kenneth Eugene Smith, John Forrest Parker, condamné à la peine capitale, a été exécuté en 2010.

Kenneth Smith a également été condamné une première fois à la peine de mort mais le procès avait été annulé en appel. Lors de son second procès en 1996, 11 des 12 jurés s'étaient prononcés pour une peine de prison à perpétuité.

Mais dans son cas comme dans celui de son complice, le juge avait passé outre l'avis des jurés et l'avait condamné à la peine capitale, une possibilité existant à l'époque dans quelques Etats mais désormais abolie sur l'ensemble du territoire américain.

Dans son rapport annuel en décembre, l'observatoire spécialisé Death Penalty Information Center (DPIC) soulignait que la plupart des prisonniers exécutés en 2023 aux Etats-Unis "ne seraient probablement pas condamnés à mort aujourd'hui", en raison de la prise en compte notamment des problèmes de santé mentale et traumatismes des prévenus ou de changements législatifs pour infliger la peine capitale.

La peine de mort a été abolie dans 23 Etats américains, tandis que six autres observent un moratoire sur son application sur décision du gouverneur. (AFP)

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