Une partie de la population ne comprend pas le rôle des parlementaires. Elle veut un rapport direct avec l’élu au sens d’une rentabilité. Qu’est ce qu’il va faire pour moi ?

Pour savoir ce qui se passe sur le terrain, il ne faut surtout pas se limiter aux discours des partis politiques et à une presse peu précautionneuse. Pour ma part, grâce à mes relations militantes à travers le Maroc je peux donner des indications. Je ne citerais pas de noms, pour ne pas avoir de procès, et les indications sont générales, mais croyez-moi elles sont proches du réel.

Les rabatteurs de voix sont le vrai problème. Les non avertis pensent qu’un candidat qui achète les voix distribue de l’argent directement. C’est faux, cela n’existe plus depuis un quart de siècle. Dans toutes les circonscriptions il y a des rabatteurs. Certains d’entre eux sont d’une efficacité redoutable. Ils promettent tant de voix dans tant de bureaux, et les obtiennent, ne se faisant payer qu’a l’arrivée. Les autres arnaquent les candidats naïfs. Leur force c’est qu’ils servent d’intermédiaires entre la population et les autorités, facilitent l’obtention de papiers, de rendez-vous à l’hôpital… Ils sont toujours là, y compris en milieu urbain, et les faux notables y ont recours même à Casablanca.

L’instrumentalisation de la précarité est une réalité. Les habitants des bidonvilles sont tenus par celui qui leur procure le certificat de résidence, sésame pour accéder à tous les droits, y compris la scolarisation des enfants. C’est ce qui explique que dans un Douar tous les votants vont dans le même sens. Je réserverai un article à ce sujet.

Durant la campagne, il n’y a pas eu d’intervention intempestive des corps d’Etat, même le PJD le reconnait. Mais sa neutralité peut être jugée négative. Pourquoi ? Parce que les rabatteurs qui étaient dispatchés sur les candidats « argentés », se sont souvent retrouvés unis autour d’un seul sigle et surtout que ces rabatteurs sont connus, reconnus, et que personne ne met fin à leur commerce illicite.

Enfin et c’est le plus important, une partie de la population ne comprend pas le rôle des parlementaires. Elle veut un rapport direct avec l’élu au sens d’une rentabilité. Qu’est ce qu’il va faire pour moi ? Cela veut dire que c’est une frange de la population qui est éloignée de tout projet collectif. C’est l’extrême faiblesse de la construction démocratique.