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L'IA au Maroc, si on ne fait pas avec, elle se fera sans nous
"Tant qu’à faire, il vaut mieux l’adopter au plus vite, la domestiquer pour en tirer profit, voire contribuer à son développement via les startups innovantes pour bien se positionner dans cette économie fondée sur l’IA et le digital et bénéficier ainsi de leur forte valeur ajoutée"
Par Fatima Zahra BELARBI (MAP)
Rabat - Le Maroc a fait du digital et de l'Intelligence Artificielle (IA), un véritable levier de développement socio-économique, dans le cadre du chantier de la transformation numérique du Royaume, eu égard à son importance capitale sur les plans stratégique et économique et aux réponses qu’elle peut apporter aux besoins différenciés des citoyens et des entreprises.
Le Maroc qui ambitionne de devenir l’un des acteurs majeurs du numérique, s’est inscrit résolument dans un processus de transformation digitale à la faveur du lancement, dès 2005, d’une multitude de stratégies pour accélérer son développement : la stratégie "e-Maroc 2010", le plan "Maroc numérique 2013", "Maroc Digital 2020" et "Horizon 2025".
En 2020, le Royaume a réussi à occuper la quatrième place du "Digital Risers" (classement des Etats en termes de compétitivité́ digitale) des pays de la région MENA. Ce qui signifie qu’il peut et doit encore mieux faire.
Mais ce constat démontre déjà que la transformation digitale est perçue comme une importance cruciale. L’IA a un rôle majeur à jouer dans la facilitation du processus de digitalisation, en tant que pilier essentiel de transformation stratégique, au regard de son impact transversal indéniable sur la gouvernance, la transparence, la performance des services publics, l’adhésion de la population, ainsi que sur la dynamique économique en général.
Dans un entretien à la MAP, El Houssine Bouyakhf, Président Directeur Général d’AIOX LABS, Start-up spécialisée en IA, précisée, dans un entretien que l’IA "impacte aujourd’hui toutes les industries et s’impose dans la plupart des secteurs et ne manquera pas de conquérir les dernières poches de résistances, peu nombreuse d’ailleurs".
"L’IA peut apporter et apporte déjà̀ beaucoup en termes de productivité́ grâce à l’automatisation de nombreuses tâches", a-t-il dit.
De l’avis de cet expert, "le Maroc peut se positionner en hub de l’Intelligence Artificielle, vu la richesse et la qualification de haut niveau de ses talents en mathématiques et informatique, , et en raison encore de l’existence d’un écosystème de leaders marocains d’autre part".
"Toutefois, la consolidation de ce positionnement nécessite l’addition de plusieurs facteurs, notamment la mise en place d’une véritable stratégie de développement de l’IA dotée des moyens nécessaires pour sa réalisation, l’amélioration de l’accessibilité́ à la Data, l’encouragement des Start-Ups innovantes et leur soutien financier…", a-t-il estimé.
"Le Royaume peut se positionner comme un hub dans les domaines de l’outsourcing et les contacts centers dopés à l’IA, de l’agriculture de précision, de la santé, de la logistique et des finances... Ce sont des secteurs où l’IA peut jouer un rôle fondamental", a-t-il enchaîné́.
Imad Benelallam, Directeur de recherche à SI2M à l'INSEA et en charge des technologies (CTO) au sein d’AIOX LABS, est sur la même longueur d’onde : "l’Intelligence Artificielle ne réalise que des tâches réalisables, en théorie, par l’Homme, mais dont la complexité, qui naît de la volumétrie de ces tâches simples successives à réaliser, la rend complexe, voire impossible pour l’Homme".
"Une IA exécute des tâches à forte fréquence et ne demeure sous contrôle qu’uniquement si elle est programmée, en conservant l’Homme dans la maille de la prise de la décision" explique-t-il.
Par conséquent, avec l’IA, l’activité économique se conjugue autrement. Certains secteurs comme le commerce, l’industrie et les services sont déjà impactés par l’IA et les nouvelles technologies qui lui sont associées. D’autres s’apprêtent à faire le grand saut dans la disruption que représente l’IA.
Soulaimane Lahrech, Directeur des opérations dans cette même structure, a lui aussi rappelé que cette révolution "se fera donc avec ou sans nous, d'où l'intérêt d'un positionnement rapide du Maroc a minima en tant que leader régional maîtrisant cette technologie, ou mieux encore comme un pays producteur et exportateur d’IA".
"Tant qu’à faire, il vaut mieux l’adopter au plus vite, la domestiquer pour en tirer profit, voire contribuer à son développement via les startups innovantes pour bien se positionner dans cette économie fondée sur l’IA et le digital et bénéficier ainsi de leur forte valeur ajoutée", soulignée M. Lahrech.
"L’IA devrait servir à améliorer le bien public : les gouvernements devraient ainsi l’utiliser, mais avec attention et modération quant aux questions éthiques".
Selon M. Lahrech, "l’IA devrait toutefois compléter et non pas remplacer l’Homme. Elle permettra de créer de nouveaux outils de compréhension de l’existant et de simulation de nouveaux projets dans tous les domaines".
"Si elle détruit des emplois, c’est qu’ils sont probablement précaires et à forte pénibilité. En contrepartie, l’IA permet de générer de nouveaux emplois à forte valeur ajoutée", soutient-il ajoutant qu’il vaut mieux créer ou adopter les outils d’automatisation que d’en subir les effets.
S’agissant des transformations imposées par l’IA, Youssef Bouyakhf, Directeur des affaires financières au sein d’AIOX LABS, a, de son côté, souligné que "la meilleure manière de les anticiper est de comprendre ce que représente cette technologie, ce qu’elle peut et ce qu’elle ne peut pas réaliser, mais surtout de s’y préparer, car nous n’échapperons pas à ces mutations".
"L’objectif est de penser l’avènement de ces technologies comme une nouvelle révolution industrielle au sens large qui imposera aux industries et, a fortiori, aux leaders d’intégrer et repenser leurs stratégies en incluant les dernières avancées de l’IA, au risque de se voir dépassées et caduques", a-t-il fait savoir.
Considérée de plus en plus comme un outil incontournable au service de l’économie et des objectifs du Nouveau Modèle de Développement, l’IA a révolutionné le monde de la technologie, au point qu’elle est devenue désormais difficile d’imaginer un progrès sans IA.
La promotion de nombreux et de nouveaux secteurs d’activités, la transformation des entreprises et du marché́ du travail national dépendront de la modification des pratiques de la R&D et de l’innovation notamment à travers l’Intelligence Artificielle. L'IA est ainsi, si on ne fait pas avec, elle se fera sans nous.