La justice suédoise légitime l’autodafé du Coran, prétextant la liberté d’expression

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Une pancarte contre les extrémistes de droite suédo-danois Rasmus Paludan (G) et Edwin Wagensveld (D), un leader néerlandais d'un groupe anti-islam, est visible sur une clôture en fil de fer barbelé alors que des manifestants se rassemblent devant l'ambassade de Suède à Jakarta le 30 janvier 2023, pour protester contre l'auodafé du Coran en Suède. On oeut lire sur la pancarte : Les vrais terroristes - (Photo par Azwar Ipank / AFP)

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L'affaire de l’autodafé du Coran début janvier en Suède a doublement rebondi mardi, avec l'arrestation de cinq personnes suspectées de préparer un attentat islamiste en représailles et une décision de justice qui relance l'hypothèse de nouveaux autodafés.

L'autodafé commis par l'extrémiste anti-islam Rasmus Paludan avait déjà eu de graves conséquences internationales, en déclenchant une série de protestations officielles dans monde musulman, compromettant un peu plus la candidature de la Suède à l'Otan, l’acte ayant renforcé l’opposition de la Turquie à son adhésion.

Le renseignement suédois, Säpo, a annoncé l'arrestation mardi matin dans trois villes du centre du pays de cinq personnes suspectées d'être liées "à l'extrémisme islamiste violent".

Le projet, selon la Säpo, était lié "à plusieurs enquêtes" menées par le service sur de possibles représailles visant la Suède depuis l’autodafé commis par l'extrémiste anti-islam Rasmus Paludan.

"Les suspicions portent sur un projet d'acte terroriste en Suède", a indiqué la Sûreté, précisant toutefois qu'"un attentat n'était pas considéré comme imminent".

Ces arrestations, les premières liées à cette affaire, ont coïncidé avec une décision de la justice suédoise d'annuler des interdictions de manifestations prévoyant des autodafés du livre sacré de l'islam.

Après avoir autorisé la première manifestation début janvier de l'extrémiste, présentée comme une action anti-Otan, la police suédoise avait finalement décidé d'interdire d'autres manifestations similaires, invoquant un risque élevé d'attentats.

Le dossier empoisonne le gouvernement suédois, qui s'est refusé à introduire une loi interdisant de brûler publiquement le Coran et autres symboles religieux, comme dans d'autres pays d'Europe.

Stockholm s'est retrouvé coincé entre le droit suédois sur la liberté de manifestation, et l'émotion du monde musulman et notamment de la Turquie.

"La liberté d'expression est une part fondamentale de la démocratie. Mais ce qui est légal n'est pas nécessairement approprié", s’est contenté de déclarer le Premier ministre Ulf Kristersson début janvier, déplorant "un acte profondément irrespectueux".

Cette déclaration n'avait pas suffi à calmer la colère du président turc Recep Tayyip Erdogan.

-Otan suspendu 

"Il est clair que ceux qui ont causé une telle offense devant notre ambassade ne peuvent plus compter sur aucune bienveillance de notre part concernant leur candidature pour l'adhésion à l'Otan", avait-il dit.

L'incident s'était ajouté aux griefs d'Ankara, qui accusait déjà la Suède d'être un havre pour des "terroristes" kurdes proches du PKK.

Les interdictions prononcées par la police avaient été contestées devant la justice du royaume, au motif qu'elles violeraient la liberté constitutionnelle de manifester.

Il s'agissait d'un projet de manifestation d'un individu devant l'ambassade d'Irak et d'une organisation anti-Otan devant celle de la Turquie.

La police "n'avait pas de fondement suffisant à sa décision" pour interdire ces deux manifestations prévoyant de brûler le Coran devant l'ambassade de Turquie et celle d'Irak, a estimé mardi la Cour administrative d'appel.

La juge chargée du dossier a considéré que les menaces invoquées par la police pour interdire des autodafés n'étaient "pas suffisamment concrètes ou liées aux manifestations en question", indique le tribunal dans un communiqué.

La police a elle maintenu avoir eu "raison", précisant au média suédois TT être en train d'analyser un possible appel.

Rasmus Paludan, qui a la double nationalité suédo-danoise, a lui continué à brûler des Corans à Copenhague où il réside. La Turquie s'en était également émue auprès du Danemark.

Candidate depuis mai dernier avec la Suède, la Finlande a elle obtenu le feu vert turc, et entre officiellement ce mardi dans l'alliance atlantique lors d'une cérémonie à Bruxelles.

L'adhésion suédoise nécessite elle encore les ratifications turque et hongroise. Malgré ces blocages, le pays nordique espère encore rejoindre l'Otan avant son prochain sommet à Vilnius en juillet. (Quid avec l’AFP)

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