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Le mal-logement s'aggrave en France
Le rapport de la Fondation Abbé Pierre a révélé que l'année dernière, 4,1 millions de personnes étaient mal logées dans l'hexagone, parmi elles, plus d'un million privé de logement personnel, et 330.000 sans-abris, soit une augmentation de 130 % en 10 ans.
Paris - Les sans-abri contraints de dormir dans la rue secouent les consciences, surtout lorsque le thermomètre descend en dessous de zéro. En France, leur nombre ne cesse déplorablement d'augmenter d'année en année, en raison notamment de l'envolée des prix de l'immobilier.
Dans son rapport rendu public début février, la Fondation Abbé Pierre, une organisation caritative qui ne cesse de tirer la sonnette d'alarme année après année sur le mal-logement en France, dresse un état des lieux tragique.
Le rapport de la Fondation a révélé que l'année dernière, 4,1 millions de personnes (ce chiffre inclut les personnes sans logement personnel, vivant dans un lieu beaucoup trop petit pour elles ou sans le confort de base) étaient mal logées dans l'hexagone, parmi elles, plus d'un million privé de logement personnel, et 330.000 sans-abris, soit une augmentation de 130 % en 10 ans.
Les 330.000 englobent les quelque 200.000 personnes en hébergement d'urgence, 110.000 migrants en centre d’accueil ou d'hébergement pour demandeurs d’asile, plus environ 27.000 sans-abri dormant dans la rue dans des tentes ou dans des véhicules.
La Fondation, qui analyse les politiques publiques conduites en matière de logement et commente les chiffres du mal-logement, en s’appuyant sur le vécu des personnes mal logées, pointe du doigt la faible place que les responsables politiques en France accordent à la question du logement au début du second quinquennat d’Emmanuel Macron.
"Deux mesures seulement dans son programme électoral, pas de ministre en charge de cette question essentielle dans son premier gouvernement, une thématique absente initialement du Conseil national de la refondation, avant que les acteurs sociaux parviennent à l’y réintégrer, cela alors même que les tensions liées au logement se manifestent sous des formes diverses, mois après mois, sans trouver de réponse à la hauteur", fait observer l'ONG.
Elle souligne ainsi que l’écart a rarement semblé aussi grand entre d’un côté l’état du mal-logement, sa permanence, comme ses manifestations aggravées (augmentation du nombre de personnes sans domicile, hausse des coûts, nombre de logements énergivores…), et de l’autre, l’insuffisance des réponses publiques pour rendre le logement abordable tant dans le parc existant dont l’ouverture aux plus modestes se restreint, que dans la construction neuve, qui reste insuffisante au regard de l’ampleur et des caractéristiques de la demande.
Le rapport évoque également la flambée des prix de l'immobilier et ses conséquences. Ainsi, "les secteurs géographiques qui étaient déjà chers ont vu leurs prix continuer à s'élever, mais aussi leurs périmètres s'étendre", déplore l'Organisation.
Dans son rapport, la Fondation fait également le focus sur les disparités de genre face au mal-logement, aux dépens des femmes. Plusieurs "moments potentiellement de rupture" alimentent les inégalités avec les hommes, observe le directeur des études de la Fondation, Manuel Domergue.
Les femmes sont plus susceptibles de se retrouver sans logement lorsqu'elles quittent le foyer parental en cas de violences sexuelles. "Parmi les sans-domicile, 36% des femmes et 19% des hommes ont connu des violences sexuelles avant 18 ans", relève M. Domergue.
Selon le rapport, la séparation conjugale représente un choc financier et résidentiel plus important pour les femmes que pour les hommes. "En effet, leurs revenus disponibles chutent d’environ 20% après une séparation, tandis que les hommes ne perdent que 2,5% en moyenne".
La séparation, note le document, se traduit en matière de logement par une précarisation plus fréquente des femmes, relevant qu'après la séparation, l’homme reste plus souvent dans le logement conjugal et les femmes perdent plus souvent le statut de propriétaire que les hommes
Par ailleurs, les mères célibataires vivent souvent dans des logements précaires et sous-dimensionnés. 40% des femmes seules avec un enfant et 59% des mères d'au moins trois enfants subissent de mauvaises conditions de logement, contre 20% pour la population générale, selon la Fondation Abbé-Pierre
La Fondation constate encore que la situation actuelle dans l'hexagone devrait conduire à renforcer le rôle protecteur du logement, pas seulement pour les précaires, mais aussi pour l'ensemble des ménages modestes, mais également veiller à ce que la dimension protectrice des politiques publiques ne soit pas affaiblie.