Liste grise du GAFI: l'Afrique du Sud entre le marteau et l’enclume - Par Hamid AQERROUT

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L'organisme mondial de surveillance de la lutte contre le blanchiment d'argent voulait des preuves que l’Afrique du Sud est sérieuse pour mettre le pays en conformité avec les meilleures pratiques internationales

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Par Hamid AQERROUT (Bureau de la MAP à Johannesburg)

Johannesburg - Finalement, ce qui devait arriver arriva. L’Afrique du Sud a finalement été placée sur la "liste grise" du Groupe d'action financière (GAFI), ce qui signifie qu'elle présente des lacunes dans la lutte contre les flux financiers illicites, une décision qui aura immanquablement des conséquences désastreuses sur les coûts des banques, les gestionnaires d'actifs et toute l’économie du pays.

En prenant cette décisions, l'organisme mondial de surveillance de la lutte contre le blanchiment d'argent voulait plus de preuves que l’Afrique du Sud était en mesure de contrôler les nouvelles lois qu'elle a mises en œuvre pour mettre le pays en conformité avec les meilleures pratiques internationales : En matière de lutte contre le blanchiment d’argent et les flux illicites.

Un coup dur

Il s’agit là, certes, d’un coup dur pour la situation financière internationale de l'Afrique du Sud, la Banque centrale ayant averti que la mise sur liste grise pourrait avoir des conséquences considérables pour le système financier du pays arc-en-ciel.

Bien que la banque centrale ait mis en garde contre les sorties de capitaux et de devises, le problème le plus immédiat est que cela augmente les coûts de transaction, d'administration et de financement pour le secteur bancaire.

Dès l’annonce de la décision exténuante du Gafi, les partis d’opposition n’ont pas tardé à réagir, en dénonçant l'incapacité du gouvernement sud-africain à lutter contre les crimes financiers et en qualifiant l' inscription du pays sur la liste grise du Groupe d'action financière d'acte d'accusation accablant contre le système de justice pénale du pays.

«La liste grise a fait courir un risque important à notre nation, car le reste du monde considère désormais les entreprises et les particuliers sud-africains comme des contreparties à haut risque dans les transactions mondiales», souligne le principal parti d’opposition, l’Alliance Démocratique (DA).

Relevant que ce développement est totalement «inacceptable», il a appelé le gouvernement à prendre des mesures immédiates pour rectifier cette «position intenable».

Idem pour le Congrès national africain (ANC), parti au pouvoir en Afrique du Sud depuis 1994, qui a appelé le gouvernement à mettre rapidement en œuvre la stratégie nationale de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, adoptée en novembre dernier, en vue de sortir de la liste grise.

Il a également souligné que la période de capture de l'État était la principale cause derrière cette dégradation, notant que l'action rapide requise par le GAFI était conforme aux recommandations de la Commission judiciaire d'enquête sur la corruption généralisée qui avait régné dans le pays durant les dernières années.

Huit domaines de lacunes stratégiques

En réaction à ces critiques, le ministre des Finances, Enoch Godongwana, a déclaré qu'il avait informé le président du GAFI, Raja Kumar, que le gouvernement sud-africain avait examiné le plan d'action et s'était engagé à "répondre rapidement et efficacement à toutes les lacunes en suspens et à renforcer l'efficacité" de sa lutte contre le blanchiment d'argent.

En effet, le président Cyril Ramaphosa avait signé en décembre dernier deux textes législatifs clés : la loi de modification des lois sur la lutte contre le blanchiment d'argent et la lutte contre le financement du terrorisme et la loi de modification de la protection de la démocratie constitutionnelle contre le terrorisme et les activités connexes.

Ainsi, dans une course contre la montre pour éviter que la communauté internationale ne coupe l'Afrique du Sud du commerce transfrontalier, le Parlement sud-africain a adopté deux lois pour répondre aux exigences strictes du GAFI. Ces lois, selon Godongwana, ont corrigé 15 des 20 lacunes législatives, ce qui pourrait être insuffisant.

Dans ses remarques, le Groupe d'action financière a identifié huit domaines de lacunes stratégiques, ce qui oblige l'Afrique du Sud à démontrer une augmentation soutenue des demandes d'entraide judiciaire sortantes qui contribuent à faciliter les enquêtes sur le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, ainsi que les confiscations de différents types d'actifs.

Le pays se doit aussi d’améliorer la supervision basée sur les risques des Entreprises et Professions non financières désignées (EPNFD) et démontrer que tous les superviseurs appliquent des sanctions effectives et proportionnées, comme il doit veiller à ce que les autorités compétentes aient accès en temps opportun à des informations exactes sur les bénéficiaires effectifs.

L’Afrique du Sud appelée à se montrer plus sérieuse

Il s’agit également de démontrer une augmentation soutenue des demandes de renseignements financiers des organismes chargés de l'application des lois au Centre de renseignement financier pour ses enquêtes et de démontrer aussi une augmentation soutenue des enquêtes et des poursuites pour blanchiment d'argent grave et complexe.

Selon les remarques du GAFI, l’Afrique du Sud doit également renforcer son identification, sa saisie et sa confiscation des produits et instruments d'un plus large éventail d'infractions sous-jacentes et mettre à jour son évaluation des risques de financement du terrorisme pour éclairer la mise en œuvre d'une stratégie nationale globale de lutte contre ce phénomène. Le pays doit, enfin, assurer la mise en œuvre effective de sanctions financières ciblées et démontrer un mécanisme efficace pour identifier les individus et les entités qui répondent aux critères de désignation nationale.

Maintenant que les dès sont jetés et que la menace d’être placée sur la liste grise du GAFI s’est concrétisée, l'Afrique du Sud se doit de toute urgence de montrer qu'elle est sérieuse pour arrêter le flux d'argent sale et le financement du terrorisme.

 

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