La Faculté des Lettres de Rabat et l’ambassade du Pérou au Maroc ont célébré, mercredi, l’héritage littéraire de Mario Vargas Llosa, géant des lettres péruviennes et Prix Nobel de littérature 2010, disparu en avril dernier. Une table ronde riche en échanges a permis de revisiter son œuvre magistrale et son influence universelle.

Un adieu universitaire à un monument littéraire

Dans une atmosphère empreinte de respect et d’admiration, la Faculté des Lettres et des Sciences humaines de l’Université Mohammed V de Rabat a accueilli une table ronde en hommage à Mario Vargas Llosa, coorganisée avec l’ambassade du Pérou. Ce rendez-vous posthume, sobre mais dense, a réuni enseignants, étudiants, diplomates et passionnés de littérature autour de l’œuvre colossale de celui que beaucoup considèrent comme le dernier grand maître du "boom" latino-américain.

Pedro Díaz Vargas, chargé d’affaires à l’ambassade du Pérou, a souligné que ce moment de partage visait à faire redécouvrir aux jeunes générations l’importance d’une œuvre qui traverse les continents et les époques. "La littérature de Vargas Llosa est un pont entre les peuples, une passerelle vers la compréhension de l’humain dans sa complexité", a-t-il déclaré.

Une œuvre à la croisée de la fiction, de la vérité et de la liberté

Les interventions ont exploré les multiples dimensions de l’univers vargasllosien. Pour le Pr Azzedine Ettahri, chef du Département des études hispaniques, cette rencontre s’inscrit pleinement dans la vocation pédagogique de la faculté. "C’est une occasion de former nos étudiants à une lecture critique et éclairée des grands auteurs hispano-américains, et Vargas Llosa demeure une référence incontournable", a-t-il affirmé.

Les académiciens ont mis en lumière la richesse de son œuvre à travers plusieurs prismes : la relation entre vérité et fiction, au cœur de romans comme La Guerre de la fin du monde ou La Fête au bouc ; la puissance narrative qui transcende les frontières culturelles ; le regard sur la condition féminine, aussi bien critique qu’introspectif ; et surtout, la lecture comme acte de résistance, de liberté et d’émancipation.

Un intellectuel engagé, un écrivain du réel

Au-delà de la littérature, Mario Vargas Llosa fut aussi un penseur public, un essayiste engagé, un acteur politique parfois controversé. Lauréat du prix Nobel en 2010 "pour sa cartographie des structures du pouvoir et ses images mordantes de la résistance, de la révolte et de la défaite", il a incarné une figure rare : celle de l’intellectuel complet, à la fois romancier et citoyen du monde.

Ses prises de position sur la démocratie, la liberté d’expression ou encore les dérives autoritaires en Amérique latine ont nourri des débats houleux, mais ont également enrichi la perception de son œuvre. "Chez lui, le roman n’est jamais un simple divertissement, mais un instrument d’exploration du réel", a noté l’un des intervenants.

Un héritage vivant entre les langues et les générations

La table ronde a également rappelé l’impact de Vargas Llosa dans le monde francophone et arabe. Plusieurs de ses romans ont été traduits en français, suscitant l’intérêt des lecteurs au Maroc. Pour les enseignants, il s’agit maintenant de faire vivre cet héritage dans la formation universitaire, à travers des séminaires, des lectures dirigées et des traductions critiques.

En célébrant Mario Vargas Llosa, Rabat rend aussi hommage à la littérature comme vecteur de pensée, de dialogue et d’humanité. Le message est clair : au-delà de la mort de l’écrivain, l’œuvre reste, palpitante, libre et plus actuelle que jamais.