13.000 enfants tués et 5 mois plus tard, Washington propose un ''cessez-le-feu'', Pékin et Moscou opposent leurs véto

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Une femme qui a fui avec d'autres l'hôpital Al-Shifa et ses environs dans la ville de Gaza au milieu de certains de ce qui lui reste ses biens dans le centre de Gaza, le 21 mars 2024. Le 21 mars, l'armée israélienne a lancé un raid sur Al-Shifa, le plus grand hôpital de Gaza. (Photo de l'AFP)

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La Russie et la Chine ont mis leur véto vendredi à une résolution américaine à l'ONU soulignant la "nécessité" d'un cessez-le-feu "immédiat" à Gaza, l'ambassadeur russe dénonçant un texte "hypocrite" qui n'appelle pas directement à faire taire les armes.

Le projet de résolution américaine qui insiste sur la "nécessité d'un cessez-le-feu immédiat et durable" en lien avec la libération des otages, a recueilli 11 voix en faveur, trois voix contre (Russie, Chine et Algérie) et une abstention (Guyana).

Les veto russe et chinois satisfont Hamas

L'ambassadeur russe Vassili Nebenzia a dénoncé le "spectacle hypocrite" des Etats-Unis qui ont essayé de "vendre à la communauté internationale un produit totalement différent, une formulation diluée", alors que "Gaza a quasiment été effacée de la carte".

Le Hamas a salué vendredi les vetos de la Chine et de la Russie au projet de résolution américain présenté au Conseil de sécurité des Nations unies sur une trêve dans la guerre entre Israël et le mouvement palestinien dans la bande de Gaza. 

"Le projet de résolution américain rejeté au cours du vote aujourd'hui au Conseil de sécurité de l'ONU contenait une formulation trompeuse complice des objectifs de l'ennemi sioniste criminel, et lui permet de poursuivre son agression", estime le Hamas.

Pour l'organisation, le texte accordait "une légitimité à commettre une guerre génocidaire contre le peuple palestinien dans la bande de Gaza, la résolution n'incluant pas de demande explicite de cessez-le-feu immédiat".

Le massacre se poursuit à l’ l'hôpital al-Chifa

Le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, est arrivé vendredi en Israël où il devrait insister sur l'urgence d'accroître l'aide humanitaire à Gaza au moment où le Conseil de sécurité de l'ONU doit se prononcer sur une résolution pour un "cessez-le-feu immédiat" dans le territoire palestinien.

Après cinq mois et demi de guerre d’extermination des Palestiniens par Israël dans la bande de Gaza assiégée et dans la famine, Washington cherche aussi à convaincre, sans grande conviction, son allié d'éviter une offensive terrestre sur la ville surpeuplée de Rafah, redoutant de lourdes pertes civiles.

Le Royaume-Uni, membre permanent du Conseil de sécurité, et l'Australie ont appelé vendredi à une "fin immédiate des combats" dans la bande de Gaza, pour y permettre "l'acheminement de l'aide et la libération des otages", détenus des Palestiniens à Gaza.

Pendant que les diplomates s'activent, les affrontements se poursuivent à travers le territoire palestinien, notamment dans et autour de l'hôpital al-Chifa, le plus important du territoire, où l'armée israélienne a affirmé vendredi avoir tué plus de 150 combattants palestiniens et arrêté des centaines de suspects depuis le début de la semaine.

Cette opération d'envergure lancée lundi contre ce complexe hospitalier a poussé des centaines de civils à fuir.

"Le fossé se réduit" dans les négociations pour une trêve associée à une libération des détenus israéliens, a cru pouvoir assurer jeudi M. Blinken pour ajouter tout de suite après : "S'il est difficile de parvenir" à un accord, "cela est toujours possible".

En parallèle de ces pourparlers, les Etats-Unis ont pour la première fois présenté un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'ONU sur un "cessez-le-feu immédiat lié à la libération des otages" détenus à Gaza depuis le début du génocide.

Le texte, consulté par l'AFP et qui doit être soumis vendredi au vote, souligne "la nécessité d'un cessez-le-feu immédiat et durable pour protéger les civils de tous côtés, permettre la fourniture de l'aide humanitaire essentielle".

L'issue du vote est toutefois incertaine alors que la Russie réclame un "appel" plus clair à faire taire les armes.

Rafah, une "erreur" 

Les Etats-Unis ont déjà mis leur veto à plusieurs résolutions du Conseil de sécurité appelant à un cessez-le-feu, estimant que cela aurait bénéficié au Hamas.

Mais face à la situation humanitaire catastrophique dans la bande de Gaza, à une opinion publique qui échappe de plus en plus à l’influence de la propagande israélo-occidentale, Washington s’agite pour parvenir à une trêve, acheminer de l'aide et éviter une offensive terrestre sur Rafah, ville à la frontière égyptienne où s'entassent selon l'ONU environ 1,5 million de Palestiniens, la majorité déplacés par la guerre dans le reste du territoire.

"Il y a de meilleurs moyens de gérer la menace du Hamas", a déclaré jeudi M. Blinken, qualifiant "d'erreur" une éventuelle invasion terrestre de Rafah.

En dépit des ‘’pressions internationales’’, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, affirme qu'une offensive sur Rafah est nécessaire pour atteindre son objectif d’exterminer un maximum de Palestiniens et de contraindre le reste à l’exil.

La guerre israélienne d’extermination a fait jusqu’à maintenant plus de 32.000 morts à Gaza, dont plus de 14.000 enfants et autant de femmes. 

Mossad et CIA au Qatar -

Lors de sa sixième tournée au Moyen-Orient depuis le début de la guerre, M. Blinken a rencontré jeudi au Caire le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, pour discuter des moyens de parvenir à un cessez-le-feu. Une énième palabre qui n’incite guère à l’optimisme.

Les discussions sur une trêve se poursuivent à Doha entre représentants des Etats-Unis, du Qatar et de l'Egypte. Le chef du Mossad, les services de renseignement israéliens, David Barnea, doit y rencontrer vendredi le directeur de la CIA, William Burns, le Premier ministre qatari, Mohammed ben Abdelrahman, Al-Thani et le chef des services de renseignement égyptiens, Abbas Kamel.

Après avoir exigé un cessez-le-feu définitif, le Hamas a infléchi sa position la semaine dernière en acceptant le principe d'une pause de six semaines dans les combats. Mais des différends semblent persister sur l'échange détenus israéliens à Gaza contre des prisonniers palestiniens écroués arbitrairement en Israël.

Les enfants meurent de faim" 

Israël impose un siège complet à la bande de Gaza, déjà sous blocus depuis 2005, et contrôle strictement l'aide qui arrive principalement depuis l'Egypte via Rafah. Or ces contrôles serrés, selon l'ONU, ont pour effet de réduire le nombre de camions entrant dans le territoire.

"Les enfants meurent de faim. Ils sont privés de nourriture", s'est alarmé jeudi le Comité des droits de l'enfant des Nations unies. "Même les miettes sont difficiles à trouver", affirme-t-il.

Afin de soulager la population, plusieurs pays organisent des parachutages de nourriture et ont ouvert un couloir maritime depuis Chypre vers Gaza. Mais l'aide reste insuffisante face aux besoins des 2,4 millions d'habitants de Gaza et ne parvient que très difficilement dans le nord, où vivent plus de 300.000 personnes selon l'ONU.

"Voici nos enfants, voyez-vous leur état ? Nous ne savons pas comment les nourrir", a déclaré jeudi à l'AFP une Palestinienne fuyant les combats dans le secteur de l'hôpital al-Chifa. "Nous sommes assiégés depuis trois jours, nous ne pouvons rien leur donner à manger ou à boire". (Quid avec AFP)