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Algérie : Des généraux en prison ou la purge qui ne dit pas son nom
Ces généraux appartiennent pratiquement tous à la génération du général Toufiq, colonel à l’époque du coup d’Etat, et qui allait devenir dans la foulée l’indiscutable patron de l’Algérie en sa qualité de chef du DRS
Rarement l’Algérie juge ses officiers supérieurs. La règle en général c’est que les hauts gradés de l’armée opèrent une sorte de tournante sur l’économie algérienne et souvent la mise à la retraite obéit à une loi toute simple : « Tu as commandé, tu as mangé, maintenant il est temps d’aller profiter de tes biens. » C’est peut-être pour cela que l’Algérie compte le plus grand nombre d’officiers supérieurs à la retraite pour un pays en voie de développement.
Mais voilà qu’à la « surprise » générale, cinq généraux-majors (l’équivalent de général de division au Maroc), qui occupaient des postes de commandement importants, sont déférés devant la justice de leur pays pour « enrichissement personnel et abus de confiance ». Confiance de qui ? On devine plus qu’on ne sait. Toujours est-il qu’il s’agit de grands pontes de la « grande muette ». Pas si muette que ça en Algérie : L’ex-tout puissant commandant de la gendarmerie, Nouba Menad que l’on donnait pour éventuel successeur du président Abdelaziz Bouteflika, Boudjemaâ Boudouar, ancien directeur central des finances au ministère de la défense, Habib Chentouf qui était à la tête de la première Région, Saïd Bey , ex-commandant de la deuxième Région et Abderrazak Chérif ancien chef de la quatrième Région. Auxquels il faut ajouter un colonel dont l’identité n’a pas été révélée.
A Alger on fait à peine semblant de se perdre en conjectures. Si on fait mine de croire que le massage est qu’il n’y a plus d’impunité et que tout le monde obéit à la même loi, on s’interroge tout de même si ce n’est pas une purge politique pour mettre au pas une partie d’un corps, la plus puissante ? A sept mois de l’élection présidentielle, la réponse affirmative est plus que fort probable.
L’Algérie est habituée à ce genre de manœuvres pour isoler un général trop puissant ou trop encombrant. Ce fut le cas du général-Major Mustapha Beloucif, qui fut un temps chef d’Etat-major avant d’être poursuivi par la vindicte de ses pairs au moment où le général Khaled Nezzar montait en puissance et ciblait la tête de l’armée dont il deviendra ministre en 1990. Plus récemment, c’est un autre général, Hassane, qui n’a pas peu contribué à la lutte contre les islamistes, qui croupit en prison, alors qu’il avait déjà été mis à la retraite, pour avoir trop « ouvert sa gueule ».
Les généraux qui se retrouvent aujourd’hui au banc des accusés ont commun d’appartenir à la génération des « janviéristes » qui ont renversé en janvier 1992, l’un des leurs, le président Chadli Benjedid et mené un coup d’Etat contre les urnes qui avaient donné la victoire aux islamistes du FIS, installant le pays dans une impitoyable guerre civile qui duré plus de dix ans et dont les cendres de la réconciliation voulue par A. Bouteflika, n’ont pas réussi à éteindre totalement les braises.
Ces généraux appartiennent pratiquement tous à la génération du général Toufiq, colonel à l’époque du coup d’Etat, et qui allait devenir dans la foulée l’indiscutable patron de l’Algérie en sa qualité de chef du DRS, digne héritier de la Sécurité militaire. Lui-même a été démis de ses fonctions en septembre 2015 ouvrant ainsi la voie à cette purge qui refuse de dire son nom.