Le Parlement européen somme l’armée algérienne de céder le pouvoir aux civils

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Le général Saïd Chengriha chef d’état-major de l’armée algérienne

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La résolution du Parlement européen adopté dans l’après-midi du jeudi 26 Novembre 2020 a mis en rogne le pouvoir et ses satellites qui ne décolèrent pas. On le serait à moins. Les parlementaires européens ne dénoncent pas seulement les atteintes aux droits de l’homme en Algérie, mais remettent en cause l’autocratie militaire qui règne en Algérie sous des dehors d’élections et de constitution sur mesures. Ils vont encore plus loin en sommant la hiérarchie militaire de céder les rênes à un pouvoir civil.   

La résolution adoptée par un vote sans appel, quasi unanime, 669 voix pour, 3 contre et 22 abstentions, ne lésine pas sur les mots et « condamne fermement les atteintes Droits ». En tout, onze pages, neuf consacrées aux attendus qui résonnent toutes comme une condamnation, et trois dédiées à la dénonciation et à la sommation du pouvoir algérien. 

On y retrouve la condamnation de « l’escalade [en Algérie] des arrestations et détentions illégales et arbitraires et du harcèlement juridique dont sont victimes les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme, les syndicalistes, les avocats, les membres de la société civile et les militants pacifiques en Algérie, qui ferme toute possibilité de dialogue politique sur la révision constitutionnelle non démocratique et entrave l’exercice des libertés d’expression, de réunion et d’association; dénonce le recours à l’introduction de mesures d’urgence dans le contexte de la pandémie de COVID-19 comme prétexte pour restreindre les droits fondamentaux du peuple algérien ». 

Rarement les Européens s’étaient montrés aussi catégoriques et aussi fermes avec Alger. Généralement, pour des raisons multiples, les politiques en Europe se montraient accommodants ne voulant pas trop vexer Alger. Ce qui fait que cette résolution, par la violence de ses termes, signe la fin d’une époque.

Par le passé, Alger pouvait compter sur la complaisance d’un noyau, entre communistes, verts, et députés de gauche en générale, pour lui sauver la mise. Il pouvait compter aussi sur ceux que le gaz algérien intéresse. Cette fois-ci personne ne s’est manifesté pour défendre un pouvoir qui se complait dans la nostalgie d’une époque révolue, rageusement réfractaire à prendre acte et en charge les transformations qu’a connues le monde.

L’armée sur le gril 

Mieux, ou pire si l’on est à Alger dans les petits papiers du pouvoir, le texte comporte des directives et entend tracer la voie au pouvoir algérien lui signifiant ce qu’il doit faire. Il comporte ainsi, à titre d’exemple, un rappel solennel de la déclaration universelle des droits de l’homme qui est l’une « des clauses relatives aux droits de l’homme figurant dans l’accord d’association UE-Algérie de 2005. » Fort de ce rappel, le Parlement européen attend de l’Union européenne qu’elle place la situation en matière de droits de l’homme au cœur de son dialogue avec les autorités algériennes, tout particulièrement lors de la prochaine session du Conseil d’association UE-Algérie. 

Mais, ultime sacrilège, la résolution européenne cloue au pilori l’armée algérienne. Sans aucune précaution de style elle « invite les autorités algériennes à garantir à la fois une pleine reddition de comptes et un contrôle démocratique et civil des forces armées, ainsi que la subordination effective de ces dernières à une autorité civile légalement constituée, et à faire en sorte que le rôle de l’armée soit correctement défini dans la Constitution et explicitement limité aux questions touchant à la défense nationale. »