Le Maroc cherche à diversifier son approvisionnement en vaccins, une mission difficile

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Comment produire rapidement plus de vaccins pour pallier la pénurie qui freine la lutte contre une pandémie toujours virulente ?

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Le Maroc joue des coudes pour soutenir la cadence de vaccination contre le Covid-19, qui a été entamée et se poursuit dans de bonnes conditions. Le comité technique marocain a donné un avis scientifique validant deux nouveaux vaccins que sont Spoutnik V et Johnson & Johnson. 

Il appartient maintenant au ministère de la Santé et aux responsables impliqués de mener à terme les négociations, sans doute déjà entamées, et d’aboutir à des livraisons plus ou moins dans des délais qui ne mettraient pas à mal ou sous pression la campagne de vaccination devenue à plus d’un titre exemplaire. 

Le choix des vaccins Johnson & Johnson, outre leurs efficacité et innocuité démontrées, s’explique par les conditions logistiques à la portée du Maroc, comme ce fut le cas avec Astrazeneca et de Sinopharm qui se conservent à une température entre 2 et 8°C. 

Ce ne sera pas une tâche facile. La capacité de production de Spoutnik ne dépasse pas pour l’instant les 500 millions de doses par an, ce qui ne satisfait même pas l’ensemble des besoins de la Russie. 

Même avec une capacité de production autrement plus importante, les mêmes problèmes se posent à Johnson and Johnson. L’administration américaine qui a déjà financé la recherche, a préempté pour ses ressortissants les premières productions, si bien qu’un pays comme le Canada en souffre. Les problèmes de production de Johnson & Johnson affectent également l’Europe. Plusieurs pays européens ont annoncé qu’ils s’attendaient à moins de doses que prévu le mois prochain.

La question d’être ou ne pas être

Comment produire rapidement plus de vaccins pour pallier la pénurie qui freine la lutte contre une pandémie toujours virulente ? 

La pandémie de Covid-19, qui fait rage depuis 14 mois et a fait au moins 2,57 millions de morts, a suscité une demande sans précédent.

L'industrie pharmaceutique pense produire 10 milliards de doses de vaccins anti-Covid cette année, soit le double de la capacité de fabrication de 2019, tous vaccins confondus.

Mais pour fabriquer ces doses, il faut non seulement les ingrédients en quantités sans précédent, mais aussi le verre pour les flacons, du plastique ou encore des bouchons, à un moment où les chaînes d'approvisionnement mondialisées sont déstabilisés par la pandémie.

Coopération entre rivaux 

Sous la pression des Etats et des opinions publiques, les grands groupes pharmaceutiques, concurrents en temps normal, ont multiplié ces dernières semaines des accords pour fabriquer plus et trouver des synergies fructueuses .  

Le Français Sanofi - qui a raté le développement de son propre vaccin anti-Covid - aidera ainsi Pfizer-BioNTech mais aussi Johnson & Johnson a fournir plus de doses. L’américain Merck produira aussi des vaccins JnJ.

Le suisse Novartis vient au secours de Pfizer et de l'allemand Curevac tout comme le fait Bayer.

Difficile pour le moment d'estimer l'impact exact sur la production mais ces accords "sont une très bonne chose et nous aimerions en voir plus à travers le monde. Il nous faut explorer les capacités de remplissage et de finition en Asie, en Afrique, en Amérique latine et utiliser et utiliser ces usines pour accroître l'offre", insiste la cheffe scientifique de l'OMS Soumaya Swaminathan.

Marie-Paule Kieny, directrice recherche Inserm en France, abonde dans le même sens. "Il y a beaucoup de fabricants de médicaments génériques qui ont la capacité et des bonnes pratiques, qui pourraient apporter leur aide dans ce processus", a-t-elle souligné.

Mais se posent très vite les problèmes de propriété intellectuelle, de licences, qui permettent aux géants pharmaceutiques qui ont beaucoup investi - parfois avec l'aide significative des Etats - de gagner de l'argent. 

Une proposition de l'Inde et de l'Afrique du sud sur la levée temporaire des brevets soumise à l'Organisation mondiale du commerce semble dans l'impasse, même si la pression d'ONG et de l'OMS monte.

2% à 3% 

Ces efforts pour doper la production de vaccins doit notamment permettre d'immuniser dans les pays les plus défavorisés, ceux qui n'ont pas l'argent pour s'approvisionner directement à la source.

Si les campagnes de vaccination ont commencé fin décembre dans nombre de pays, les riches essentiellement mais où arrivent à figurent des pays comme le Maroc, les premières doses distribuées par le système Covax - mis en place pour tenter de juguler le nationalisme vaccinal - n'ont pu être administrées que la semaine dernière. 

Environ vingt millions de doses ont ainsi pu être envoyées dans vingt pays. La semaine prochaine ? 31 pays vont s'ajouter à la liste avec 14,4 millions de doses.

"C'est un progrès encourageant, mais le volume de doses distribuées à travers Covax reste relativement faible", a noté le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Il a aussi souligné que les volumes de livraison prévus par Covax d'ici fin mai ne représentent que 2% à 3% des populations des pays récipiendaires, "alors que d'autres s'acheminent rapidement vers la vaccination de toute leur population dans les prochains mois".

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