Rue des consuls à Rabat : mythique, historique, autrefois diplomatique, aujourd’hui encore commerciale

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La rue des Consuls au début du siècle dernier…

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Par Bouchra Azour (MAP)

Rabat - Parmi les entrées emblématiques de l'ancienne médina de Rabat, se distingue "la Rue des Consuls". Riche d'un passé diplomatique considérable, cette allée marchande a su conserver ses activités artisanales et commerciales exceptionnelles depuis les XVIIe et XVIIIe siècles. C’est dans les origines de cette histoire et leur projection dans le présent qu’en compagnie de Saïd Mortaji, enseignant à la faculté des lettres et sciences humaines à l’université Mohammed V de Rabat, spécialiste des musées et du patrimoine, on célèbre cette rue mythique qui connait ainsi que ses extensions, notamment vers le Oued  Bourgreg et l’ancien Mellah, un travail de valorisation et de modernisation du patrimoine historique pour l’intégrer au 21 ème siècle. 


La Médina de Rabat : un espace qui retrouve sa splendeur architecturale

La rue des Consuls au début de ce siècle.

En donnant le dos à la Kasbah historique des Oudayas, se présente au regard la rue des Consuls, couloir historique et pont de passage vers le reste de l'ancienne médina de Rabat, dans laquelle les représentants des missions de pays étrangers se sont installés depuis le 17e siècle et qui est devenue une artère commerciale florissante.

A 10H30, les portes en bois des magasins s'ouvrent successivement, dans l'espoir de recevoir des clients qui se retrouveront dans cette rue, considérée parmi les plus célèbres allées marchandes de la capitale pour le commerce de tapis et divers produits en cuir et un passage incontournable dans la visite touristique de la capitale.

Les tapis colorés exposés sur les devantures des magasins et les artefacts du souvenir sont alignés dans une combinaison de couleurs vives, chatoyantes et captivantes, comme une invitation à la découverte des venelles ondulantes de l'ancienne médina.

Au début, une activité diplomatique intense

Le spécialiste des musées et du patrimoine et professeur-chercheur à la faculté des lettres et des sciences humaines -Université Mohammed V de Rabat, Mohamed Said El Mortaji explique que l'origine du nom de la rue des Consuls renvoie à une étape historique qui a défini la stabilité des corps consulaires et la résidence des délégations étrangères dans cet espace.

« Le nom de la rue est apparu au début de la période du protectorat, et l'exploration de ce que raconte la rue nécessite de la comprendre dans son processus historique, car il s'agit d'une extension du premier noyau de la ville islamique de Rabat situé en arrière-plan de la rue, représenté par la Kasbah des Oudayas.

Les archéologues ont pu découvrir au sein de cette Kasbah diverses antiquités datant de la période almoravide et les écrits relatifs à la rue des Consuls et à l’ancienne médina demeureront rares jusqu'à la chute de Grenade et les débuts des migrations andalouses successives vers Rabat.

La fréquence de ces migrations a augmenté après l'année 1609, date d’expulsion des Morisques d'Espagne et l’installation de plusieurs d’entre eux à la médina de Rabat, marquant ainsi le début de l'activité de "jihad maritime".

« La rue se distingue par son emplacement stratégique, à proximité du port et souk "al-Ghazl" adjacent à la kasbah, qui était jusqu’aux années 1970 un marché de vente de laine et un espace d’animation qui n’est pas sans rappeler la mythique palce de Jamaa El Fna à Marrakech.

Activité commerciale d'aujourd'hui, une extension naturelle d'une ancienne histoire

Aujourd'hui, la rue des consuls est un espace de référence pour le commerce des produits de l'industrie traditionnelle, attirant les visiteurs marocains comme étrangers pour découvrir les trésors de l'artisanat traditionnel qui abondent dans cet espace, notamment des tapis traditionnels, des produits en cuir, des bijoux, du bois et des pierres sculptées.

Les activités commerciales pratiquées aujourd'hui dans la rue des consuls représentent une extension naturelle de l’histoire de la rue et du rôle qu’elle a joué. Au fil du temps, se sont dessinés un groupe de bâtiments, d'hôtels, de mosquées, de coins et de bâtiments habitables sur les côtés de la rue.

Les hôtels, particulièrement, ont joué un rôle fondamental dans l'histoire de l'ancienne médina de Rabat, car ils abritaient initialement des voyageurs et stockaient des marchandises, puis ont tourné vers des activités artisanales.

Devoir de mémoire et devoir d'équilibrer un authentique patrimoine

La rue des Consuls est une charge historique qui éclaire une partie importante de l'histoire de l'ancienne médina de Rabat, reflétant la relation étroite qui s'est établie entre les activités artisanales et commerciales, et l'activité diplomatique qu’a abrité la rue au long des siècles, grâce à sa position stratégique qui en a fait un lien entre la Kasbah historique des Oudayas et le port.

Les espaces historiques que sont les ruelles et les vieux bâtiments de la rue sont chargés d'une histoire qui relie les habitants de la ville à son identité séculaire.

Les projets de réhabilitation et de restauration que connaissent plusieurs espaces historiques, dans différentes parties du Royaume, revêtent une importance particulière pour encourager l'activité touristique dans ces venelles et rues artisanales. La restauration, nécessaire doit préserver les traits du suranné et s’interdire toute modification es caractéristiques de ces bâtiments et tissus urbains anciens.

La réalisation d'un développement économique basé sur la valorisation de l'ancien et du patrimoine nécessite l’implication des habitants de ces espaces historiques et des artisans qui y exercent des activités commerciales, à travers la formation, dans l'objectif de les informer de leur histoire et de l'importance de son valorisation afin de réaliser le rayonnement touristique et économique de ces espaces.

Tout projet de développement qui vise à préserver le patrimoine et à encourager le tourisme doit faire appel à l'assistance de spécialistes de l'histoire en général et de l'histoire de l'art et de l'architecture en particulier, en plus des acteurs de la société civile pour que ces monuments historiques et ce patrimoine authentique ne soient pas dénaturés.

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