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Le Polisario à Marrakech : Aït Idder, lièvre ou coureur de fonds perdus?
Bensaïd Aït Idder s’est rendu en janvier 2016 aux obsèques du leader algérien Hussein Aït Ahmed. A cette vieille grande figure du militantisme maghrébin, il devait ça et bien plus. C’est ce plus qui est en train d’agiter le bocal algérien ces derniers temps. Du haut de ses quatre-vingt-dix ans et de ses sept ou six décennies de lutte plus ou moins heureuse, il a eu la lumineuse idée d’organiser par le centre d’études qui porte son nom un grand débat, début avril à Marrakech, sur le Sahara marocain, géographiquement appelé occidental, comme on dit du Sahara algérien le Sahara oriental dont une partie fut un temps marocaine avant que la France l’annexe au profit de ce que fut pendant cent trente ans un territoire français en terre maghrébine ou nord-africaine. En réalité, au jour d’aujourd’hui, on ne sait plus vraiment sur quoi va porter ce débat, mais l’idée en soi est généreuse. Rétablir un début de commencement de discussion entre frères algériens et marocains en présence de frères tunisiens, mauritaniens, libyens, d’amis français, espagnols, italiens et je ne sais qui encore à cette agora grandeur nature qui a de forte chance, si elle se tient, de se transformer en foire d’empoigne.
Même des joutes, il peut en sortir toujours quelque chose, mais là où le vieux et vénérable Bensaïd Aït Idder a fait fort, c’est en invitant le Polisario en la personne de son chef de file, Mohamed Abdelaziz. La dernière fois qu’on a vu un Polisaroïd dans la cité ocre, c’était en janvier 1989 lorsque Hassan II avait reçu une délégation du Front.Dire que l’invitation d’Aït Idder a de quoi laisser perplexe plus d’un est un euphémisme. Elle a surpris presque tout le monde, à commencer par les séparatistes de Tindouf qui ne déclinent pas l’offre mais la conditionnent dans un emballage qui ne peut déboucher que sur un refus : « Le dialogue avec les Marocains en tant que partis ne peut se concevoir que sur la base des résolutions et décisions de la légitimité internationale, à travers les décisions de l’ONU reconnaissant le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, et les décisions consultatives de la Cour internationale de justice, des Nations unies de 2002 et de l’Union africaine de 2015 », a déclaré l’un de ses dirigeants, Mohamed Salem Ould Salek. Qu’il reste donc s’empoussiérer jusqu’à la fossilisation à Tindouf. Pour ne pas être en reste, la presse algérienne ressert son monolithisme habituel quand il s’agit du Maroc et du Sahara dans ce langage qui lui est si propre: C’est une manœuvre du Makhzen qui serait en difficulté sur ce dossier. Traduire que dans cette affaire, le vieux militant ne serait qu’un lièvre. Une question que se posent aussi les Marocains. Les uns font la moue. Les autres se disent que le patriarche a beau avoir été atteint par la limite d’âge, il n’est pas encore à un stade de sénilité pour voir des feux verts là où il y a des feux rouges.