Juifs et Musulmans de France (Epilogue), les pompiers pyromanes – Par Driss Ajbali

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Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres a été bien inspiré de déclarer que le 7 octobre n’est pas sans antécédent. En voici un échantillon : la mort de l’enfant de 12 ans Mohamed al-Durah, tué par balles le 30 septembre 2000, lors de la deuxième Intifada, dans les bras de son père qui tentait de le protéger

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Dégage, une injonction effervescente* dans un verre d'eau - Par Driss Ajbali

L’histoire se répète disait Karl Marx. « La première fois comme une tragédie, la seconde fois comme une farce ». Au Proche-Orient, et de manière récurrente, seule la tragédie est à chaque fois au rendez-vous.

En l’an 2000, avec la seconde intifada et ses lanceurs de pierres, le Hamas avait judicieusement préempté le mythe biblique de David contre Goliath.  A l’époque, les réseaux sociaux n’existaient pas ou si peu. Pas de Facebook ni Twitter. I24News, la chaine israélienne, non plus.  Et dans le monde arabe, Al Jazeera donnait le la. 

Plus que les pierres, la séquence de la mort du jeune Mohamed, dans les bras de son père, fera beaucoup de mal à Tsahal et à Ariel Sharon. Filmée en direct et diffusé en boucle planétairement, la scène abimera l’image d’Israël dans l’opinion mondiale. Le Palestinien en est sorti, non pas vainqueur, mais victime.

Lire la première partie :  JUIFS ET MUSULMANS DE FRANCE, QUI SONT LES PYROMANES – 1/5 : LA FIN D’UN CYCLE ET D’UN MYTHE – PAR DRISS AJBALI

Et si les chaines, arabes surtout, avaient fait leur miel de cet épisode, il ne faut pas oublier que la diffusion de ces images aurait été impossible sans le journaliste de France 2, le franco-israélien Charles Enderlin. Il sera, pour cela, voué aux gémonies par une partie de la communauté juive française.

C’est de cette période que date, en France, le recensement des actes antisémites. Une manière d’évaluer l’impact du conflit proche-oriental dans l’hexagone (640 en 2000 contre 857 en 2023). Et dans le même temps, grâce à une offensive intellectuelle, on assistera à la diabolisation de l’immigration française en la « palestinisant ». Chaque jeune immigré, le maghrébin tout particulièrement, devenait un potentiel fedayin.  

Avec les attaques du 7 octobre 2023, la prouesse guerrière du Hamas, humiliante pour l’un des pays les plus sécurisé au monde, passera rapidement au second plan. Elle sera, au fur-à-mesure de la divulgation des atrocités commises, inscrite dans le registre de la barbarie et l’inhumanité. Vingt-trois ans après la seconde Intifada, dans un monde hyper connecté, la guerre médiatique se mène parallèlement aussi redoutablement, si ce n’est plus, que l’action militaire. 

Cette fois, la victime qui s’impose est une figure israélienne. Celle du bébé, du vieillard, de la jeune femme violée et du fêtard pacifiste, tous ciblés en tant que civils, en tant qu’israéliens et tant que juifs. On parlera, très vite, de pogrom, mot russe ou salve, qui prend ici une résonnance islamiste. Le premier pogrom de la mondialisation, cette tour de Babel. Avec une diversité des victimes comme des otages. Tous israéliens certes, mais appartenant au monde entier.

Lire la deuxième partie : JUIFS ET MUSULMANS DE FRANCE, QUI SONT LES PYROMANES - 2/5 : DE L’IMMIGRÉ AU MUSULMAN – PAR DRISS AJBALI 

Entre la seconde l’Intifada de l’année 2000 et le 7 octobre 2023, il y a des différences de taille.  Non pas de nature mais de degrés. En 2000 comme depuis le 7 octobre 2023, la réaction en France, est presque similaire, avec cette fois-ci une intonation outrancière, une pigmentation brunâtre et une odeur nauséabonde. Pourquoi ?

Qu’Israël se défende, militairement et médiatiquement, c’est compréhensible et même, si j’ose dire, de bonne guerre. C’est sa guerre. Ce n’est pas la guerre de la France.  Alors pourquoi tant de haine ?

C’est là qu’il faut situer les responsabilités

Exception du député des Français de l’étranger, Habib Meyer, ce personnage politiquement obséquieux, très proche de Netanyahou, qui, quand il s’adresse à l’Assemblé nationale française, oublie qu’il n’est pas à la Knesset. Je fais délibérément l’impasse sur des journalistes comme Frederic Haziza, des experts comme Frederic Ancel, des politiques comme Julien Dray, des communicants comme Franck Tapiro, des penseurs comme Bernard-Henri Lévy, des névrosés comme Gilles-William Goldnadel ou Arno Klarsfeld. Ils sont notoirement Juifs, ils ont pour eux l’honneur d’être sensibles à Israël et d’en être les défenseurs. C’est leur droit le plus absolu. Encore que. En 1973 durant la guerre du Kippour, Golda Meir aurait reproché à Henry Kissinger de ne pas assez soutenir Israël alors qu’il est de confession juive. Celui-ci lui aurait retorqué : « Je suis d’abord citoyen du monde, puis américain, puis républicain, puis juif ».

 Il y a cependant tous les autres.

Dans un paysage médiatique bouleversé par Vincent Bolloré, le catho et le cathodique, tout ce que compte la France comme néoconservateurs, les va-t’en guerre ou autres faucons, au sens bushien du terme, a désormais, à sa disposition une palette médiatique, qui dans une synergie parfaite se complète capitalistiquement et idéologiquement. Cette galaxie est, pour l’essentiel, animée par des journalistes, des personnalités médiatiques ou des militants de la société civile, partisans de la palabre et du buzz, adossés qu’ils sont à Wikipédia. 

Lire la troisième partie : JUIFS ET MUSULMANS DE FRANCE, QUI SONT LES PYROMANES - 3/5 : LA FONDATION ''2 MARS''

On y trouve Cnews de Pascal Praud et de Sonia Mabrouk. Europe 1 de Pascal Praud et de Sonia Mabrouk. Le Journal du dimanche de Geoffroy Lejeune, de l’intégriste Charlotte d’Ornellas et d’Éric Naulleau. Ne pas oublier la revue Causeur d’Elizabeth Lévy en plus de toute la fachosphère. Entre eux, ils se repassent les plats. Et entre eux, ils soliloquent. Ils s’invitent mutuellement et sollicitent les mêmes voix : Michel Onfray, Robert Ménard, Alain Bauer, Gilles Kepel et son djihadisme d’atmosphère ou l’impayable Jean Messiha.

Plus cocasses, ce sont les Français de fraiche date. Sonia Mabrouk, la tunisienne, naturalisée en 2010. Abnouss Shalmani, l’iranienne, naturalisée en 2009. Elles parlent, avec des trémolos dans la voix, au nom de la modernité et de la démocratie, menacées, dans une guerre de civilisation, où l’occident est incarné, pour elles, par cet appendice qu’est Israël qui fait face à la barbarie. 

Pire, comme si la France manquait de talents, Paris importe désormais des réactionnaires comme Mathieu Bock-Côté, grand verbeux devant l’éternel.  Il a pris la place d’Éric Zemmour et du volume tant l’air parisien lui sied. C’est lui qui, dans un article au Figaro, a littéralement criminalisé l’invocation « Allah Akbar » en en faisant « un cri de guerre ». Bientôt, ce sera le tour du credo musulman « il n’y de Dieu qu’Allah » ou de la formule « Inchallah ». Et tant qu’on y est ! pourquoi pas ne pas abolir la langue arabe elle-même.  

Mathieu Bock-Côté a écrit sa provocation le matin et le soir même, elle est reprise, à la télévision, par Elizabeth Lévy avant qu’Éric Zemmour n’en fasse, le lendemain, sa propre cartouche. Bock-Côté est venu du Canada, avec dans ses bagages, sa femme, Karima Brikh.  Elle officie aussi sur Cnews. Pour le coup, la chaine voit d’un bon œil le regroupement familial. 

Karima Brikh est une marocaine avec un solide accent canadien. Elle a l’avantage d’être moins névrosée que notre Zineb El Ghazoui national, aujourd’hui disparue des radars. Comme a disparu la Dounia Bouzar qui, hier encore, vendait ce gadget pour nigauds qu’est la déradicalisation. Comme s’est naufragé, dans l’argent public, le Mohamed Sifaoui qui nous expliquait avant-hier ce qu’est l’intégrisme. Dans cette galerie d’importés, Darius Rochebin, journaliste d’origine iranienne né à Genève, respectable et professionnel, fait presque exception.

Lire la quatrième partie : JUIFS ET MUSULMANS DE FRANCE, QUI SONT LES PYROMANES : 4/5 - PIERRE-ANDRE TAGUIEFF, L’UTILE ARTIFICIER AU SIONISME – PAR DRISS AJBALI

Depuis le 7 octobre, ces figures médiatiques reprennent en chœur, dans la joie et la bonne humeur, la grille de lecture élaborée lors de la seconde Intifada par Pierre-André Taguieff. Ils extrairont Georges Bensoussan de la naphtaline pour reprendre ses éléments de langages :  1. L’antisionisme est un antisémitisme. 2. L’antiracisme est un « fascisme ». 3. L’islamogauchiste est un alliage diabolique. 4. Et les territoires perdus de la république sont désormais des espaces islamisés où germent les ferments de la future guerre civile, si ce n’est le grand remplacement.

Ces gens-là, comme dans la chanson de Jacques Brel, font société. Ils sont bien entre eux. Ils mènent leur petit combat. Ils y sélectionnent leurs alliés.  Ils choisissent leur musulman. Ils préfèrent Chalgoumi à Benzema. 

Ce sont eux les vrais pompiers pyromanes. Et ce sont eux qui préparent, qu’à Dieu ne plaise, la guerre civile comme l’écrivait Ivan Rioufol. Ils sont ceints d’une même ceinture d’explosif : la théorie de Gramsci sur les victoires culturelle qui précèdent les victoires politiques. Dans une démarche politicienne, ce qui les intéresse, plus que les suppliciés des kibboutz, c’est de canarder Jean-Luc Mélenchon. Parce tout simplement, ils ont déjà choisi Marine Le Pen à qui ils balisent le chemin de l’Élysée.

Lire la cinquième partie : JUIFS ET MUSULMANS DE FRANCE, QUI SONT LES PYROMANES : 5/5 - GEORGE BENSOUSSAN, LA MANUFACTURE DES FRACTURES – PAR DRISS AJBALI

A leurs décharges, ils ont eu, depuis 2012, des complices décisifs. Des idiots utiles, capables des pires tragédies : les Merah, les Kouachi, les Coulibaly, les tchétchènes tueurs des profs ou, comme c’est le cas depuis hier, le disgracieux imam de Beaucaire