Argentine : des dossiers économiques et sociaux épineux sur le bureau d’un nouveau président ‘’atypique’’ – Par Hicham Lakhal

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Javier Milei, candidat à la présidence argentine pour l'alliance La Libertad Avanza, s'adresse à ses partisans après avoir remporté le second tour de l'élection présidentielle au siège de son parti à Buenos Aires, le 19 novembre 2023. L'outsider libertarien Javier Milei a réussi un énorme coup de théâtre dimanche en remportant une victoire retentissante, une réprimande cinglante des partis traditionnels qui ont supervisé des décennies de déclin économique. (Photo Luis ROBAYO / AFP)

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Hicham Lakhal (MAP – Buenos Aires)

Buenos Aires - Les Argentins ont choisi l’ultralibéral Javier Milei comme nouveau président pour les quatre prochaines années, un mandat qui est loin d’être une partie de plaisir tant les défis à relever sont nombreux.

A partir du 10 décembre prochain, le nouveau président prendra les rênes d’un pays dont les indicateurs sont au rouge : stagnation de l’activité économique, grave pénurie des réserves de change, taux d’inflation le plus élevé des trois dernières décennies, difficultés à accéder aux prêts internationaux et détérioration du climat social.

Tous les analystes économiques et les experts politiques s’accordent sur un fait : le président élu doit immédiatement donner des signaux clairs sur l’orientation qu’il prendra à court, moyen et long termes. Ses principaux défis seront la lutte contre l’inflation, la stabilisation du taux de change et les problèmes des réserves de devises et de la dette, y compris les relations avec le Fonds monétaire international (FMI).

Ils soulignent que les trois principaux objectifs qui devraient guider l’action du nouveau chef de l’Etat sont la stabilisation économique et la promotion d’une politique monétaire efficace, l’améliorer de la qualité de vie de la population et la réactivation de l’accès au financement international.

Dans ce contexte, l’inflation galopante (plus de 142% en glissement annuel), que les gouvernements successifs, indépendamment de leurs orientations idéologiques, n’ont pas réussi à contenir, constitue le plus grand défi, en plus de la lutte contre la pauvreté qui touche 40 % de la population et la dévaluation de la monnaie locale, le Peso.

José Luis Ammaturo, président de la Chambre argentine des petites et moyennes industries métallurgiques, a indiqué que les secteurs productifs ont besoin dès aujourd’hui d’un « retour à la normale », avec des objectifs clairs en matière économique, un taux de change unifié, une réduction de la pression fiscale » et un renforcement des exportations.

Il est vrai que le pays a souffert au cours des quatre dernières années d’une grave sécheresse qui a provoqué un manque à gagner pour l’Argentine d’environ 20 milliards de dollars, en plus de la forte chute des réserves de change, mais la chance pourrait sourire au nouveau président, car les caisses de l’État seront renflouées l’année prochaine grâce à l’augmentation des exportations et à une nette amélioration de la balance commerciale d’environ 25 milliards de dollars.

Avant que les recettes des exportations ne commencent à affluer, l’économie argentine va enregistrer un nouveau déclin à cause d’une accélération probable de l’inflation, mais les céréales, les énergies et le lithium offriront une bouée de sauvetage au président à moyen terme.

A ce stade, une lueur d’espoir pointe à l’horizon avec une augmentation des flux financiers étrangers, après la fin de la sécheresse. L’autre bonne nouvelle sera l’apport du secteur des exportations agricoles grâce à un surplus de 29 milliards de dollars l’année prochaine, soit une augmentation de 53 % par rapport à 2023 (18,7 milliards de dollars).

Un autre signal positif pourrait venir du secteur des hydrocarbures : l’Argentine était jusqu’à l’année dernière, un importateur net des hydrocarbures - gaz et pétrole - même si elle renferme d’immenses réserves de ces ressources. La production n’était jamais suffisante pour répondre à la demande locale.

Le champ pétrolier de Vaca Muerta (sud-ouest du pays) devrait augmenter la production de gaz et de pétrole et faire pencher la balance en faveur de l’Argentine, qui obtiendrait ainsi un excédent de sa balance commerciale énergétique de 3,7 milliards de dollars, alors qu’en 2022, le solde affichait un bilan négatif de 4,4 milliards de dollars.

D’autre part, l’Argentine, qui possède l’une des plus grandes réserves de lithium, est le quatrième producteur mondial après l’Australie, le Chili et la Chine. Ses exportations de ce minerai devraient générer des revenus supplémentaires de plus de 2,1 milliards de dollars l’année prochaine.

Grâce aux exportations agricoles et énergétiques, l’accès aux ressources financières dont l’Argentine a besoin pour relancer son économie semble en théorie balisé, mais le nouveau président devra faire face à un autre défi au niveau du Congrès où son parti « Liberté en avant » n’a pas la majorité.

Pour s’en sortir, Javier Milei sera obligé de renforcer ses alliances au Congrès, notamment avec le parti de l’ancien président Mauricio Macri "Proposition républicaine" (PRO).

 

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