chroniques
Taqiya à la tebbounienne - Par Seddik MAANINOU
L’Algérie sous l’occupation turque
L’Algérie a vécu cinq siècles sous l’occupation turque, puis sous la colonisation française. Les Turcs se sont intéressés à la façade méditerranéenne, tandis que les Français ont élargi leur espace à l’intérieur de la contrée qu’ils considéraient comme une partie de la France outre-mer.
Tout au long de cette période, il n’y avait pas d’Etat appelé l’Algérie, pour la simple raison que ce pays ne disposait ni de président, ni de gouvernement, ni de drapeau, ni d’administration, ni de devise, ni de présence diplomatique. Elle est comme dit l’intellectuel et ancien ministre algérien, Noureddine Boukrouh, ‘’un pays sans papiers dans l’histoire’’. On peut donc légitimement assurer que 1962 a marqué la naissance d’un Etat dont les contours géographiques et administratifs ont été taillés par la France qui l’a baptisé Algérie.
Administration militaire
Aujourd’hui, l’Algérie a 60 ans d’existence. Elle s’étend sur un vaste territoire quadrillé par une administration militaire sans expérience en matière d’administration, d’économie et d’organisation. Elle a hérité de la colonisation française de vastes espaces volés aux pays voisins, notamment au Maroc et à la Tunisie. Rien d’étonnant donc à ce que les militaires algériens soient les défenseurs les plus farouches de «l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation».
Depuis, la junte militaire s’est saisie du pouvoir et a éliminé toute voix discordante, à commencer par les dirigeants historiques à l’intérieur du pays comme à l’étranger. Les militaires se sont succédé à la tête de l’Algérie qu’ils ont gouvernée d’une main de fer, se prévalant d’être «les héritiers unique et légitimes» de l’Armée de libération nationale.
Dès le début, les dirigeants algériens ont dès affiché leurs prétentions expansionnistes. Houari Boumediene disait que l’Algérie est la locomotive et le reste des pays de la région des wagons. Un ministre des Affaires étrangères a claironné que «l’Algérie est l’unique puissance économique et militaire de l’Afrique du Nord, le reste des pays de la région n’ayant pas d’importance». Dans leur suite logique, le chef de l’Etat actuel, Abdelmadjid Tebboune, a fanfaronné que «l’Algérie [était] une force de frappe».
Pour justifier l’hégémonie militaire, il fallait créer un ennemi intérieur et un ennemi extérieur. C’est pour cette raison que les dirigeants algériens ressassent à volonté que leur pays est constamment ciblé et que l’ennemi classique n’est autre que le Maroc.
Isolement total
Comme tous les régimes dictatoriaux, l’Algérie vit dans un isolement total. Dans l’incapacité de fonder un Etat-nation, les dirigeants algériens se gargarisent sans cesse de slogans creux sur le pays des «millions de martyrs», sans parvenir à créer une société qui, brassant les différentes ethnies, langues et coutumes, soit unie par un sentiment d’appartenance commune et des objectifs clairs et précis. En tant que régime défaillant, l’Algérie s’appuie sur la force au lieu du dialogue, la répression au lieu de la liberté et la militarisation au lieu de la démocratie.
Cette situation, couplée aux horreurs de la décennie noire, a exacerbé les désirs séparatistes, non seulement dans les Aurès et la Kabylie, mais également au Sahara oriental et dans le sud où s’activent les populations Touarègues et Azawad. Comme de bien entendu, il ne vient pas à l’esprit des militaires de consulter par voie référendaire ces populations pour connaître leurs orientations futures et continueront à ignorer sans vergogne cet état des choses qui s’apparente en réalité à une redoutable bombe à retardement.
Obsession maladive
Au lieu de laisser le peuple algérien se déterminer sur son sort, choisir son régime, fixer ses priorités et planifier librement et en toute transparence son avenir, la soldatesque continue de s’agripper au pouvoir avec une obsession maladive, de créer et d’entretenir un climat de tension permanent dans la région et d’adresser des accusations misérables et fantaisistes aux voisins. Les militaires n’ont pas l’impression de réaliser que ce «sport favori» ne fait plus recette auprès du peuple algérien et qu’il a perdu toute crédibilité à l’intérieur du pays comme à l’étranger. Sans perspective pour le pouvoir que la fuite en avant, pour la jeunesse algérienne le rêve de l’exode et pour les autres le désespoir, au mieux la résignation.
Un dicton africain dit : «Le sot parle, le sage écoute». Mais n’est pire sourd que celui qui ne veut rien entendre.
Peuple frère !
Brusquement, un nouveau site d’information a ressorti des séquences curieuses d’une interview réalisée par France24 avec le président algérien : «Nous n’avons aucun problème avec nos frères marocains. Il parait que ce sont eux qui ont un problème avec nous», a déclaré Abdelmadjid Tebboune. «Nous n’avons aucun problème avec le peuple marocain frère et nous n’avons aucun problème avec le Roi du Maroc. Si les Marocains prennent l’initiative, et ils sont en mesure de le faire, nous pourrons clore définitivement ce problème», a-t-il ajouté.
Il semble que ces séquences font partie d’une interview qui n’a jamais été diffusée par la télévision algérienne. Les militaires ayant probablement désavoué la teneur de cette interview, la bande est intervenue pour en interdire la diffusion aux téléspectateurs. Mais pourquoi donc en a-t-on interdit la diffusion ? L’armée algérienne aurait-elle sollicité l’intervention de la présidence de la République française pour sucrer une partie de la déclaration ? En tout état de cause, les séquences fuitées sont à la fois étranges et étonnantes, en raison notamment de la récurrence de termes inhabituels, du genre «fraternité», «peuple marocain frère», et surtout l’appel à une initiative pour clore définitivement le différend entre les deux pays.
Confusion
Mais pourquoi les propos de Tebboune sont-ils curieux, et étranges ? La raison en est que ce discours diffère complètement des accusations récurrentes que ne cessent d’adresser les milieux officiels et la presse algérienne au Maroc, pays dont on interdit de citer le nom même dans les rencontres sportives.
A moins qu’à force d’avoir fréquenté ses alliés iraniens, le président algérien en ait contracté le virus de la «Taqiya», érigé en mode de gouvernance. La taqiya, principe chiite consistant, dans des situations particulières, à dissimuler sa foi, représente dans ce cas précis l’incarnation de l’hypocrisie, de l’imposture et du mensonge. Elle renvoie à cette fâcheuse pratique qui permet à l’individu de dire le contraire de ce qu’il pense, d’embrasser celui qu’il souhaiterait étrangler. Tebboune ment au peuple, dupe ses alliés et trahit ses voisins.