Système robotique pour l'extraction du venin scorpionique : Anass Kettani explique cette invention toute marocaine

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Professeur, vice- président de l’Université Hassan II, chargé de l’insertion, de l’entrepreneuriat et du partenariat, Anas Kettani est le directeur de thèse à l’origine de l’invention du système robotique pour l'extraction du venin scorpionique

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Par Jalal Chouhani (MAP)

Casablanca – Professeur, vice-président de l’Université Hassan II, chargé de l’insertion, de l’entrepreneuriat et du partenariat, Anas Kettani est le directeur de thèse à l’origine de l’invention du système robotique pour l'extraction du venin scorpionique. Dans cet entretien à la MAP, il explique cette invention qui va révolutionner l'industrie du venin scorpionique qui fait partie des venins les plus chers au monde. La particularité de cette invention marocaine est d’augmenter, selon le professeur Kettani, la quantité et la qualité de ce venin utilisé comme principe actif dans la fabrication de médicaments, de produits cosmétiques et la production du sérum anti venin.

Comment présenter à la communauté non scientifique cette invention marocaine ?

Le système robotique pour l’extraction du venin scorpionique permet d’une part d’évaluer l’épaisseur de la couche superficielle du scorpion pour envoyer des décharges électriques adaptées à chaque espèce de scorpion et d’autre part de mettre plusieurs scorpions de la même espèce en même temps dans un convoyeur pour pouvoir extraire un lot de venin de la même espèce.

Ce robot facilitera en premier lieu l’extraction du venin de qualité grâce à son mécanisme qui fournit des décharges électriques appropriées sans risque de décès pour le scorpion.

En second lieu, le robot permet d’extraire le venin de plusieurs scorpions de la même espèce en même temps. C’est ce deuxième volet qui a fait l’objet du brevet délivré par l’Office marocain de la Propriété industrielle et commerciale (OMPIC).

Ce système a la capacité de mettre 32 scorpions de la même espèce dans un seul convoyeur pour avoir un lot de venin de la même espèce dans des conditions biologiques qui peuvent être exploitées par l’industrie pharmaceutique et l’industrie cosmétique.

Quel apport de cette invention à l’industrie du venin scorpionique ?

Le venin de scorpion va connaître une révolution scientifique dans son aspect pratique dans la mesure où le processus d’extraction du venin des scorpions est très délicat. Il faut des décharges électriques adaptées pour extraire une petite gouttelette du venin.

Souvent lorsqu’on ne maîtrise pas ce procédé le scorpion meurt comme les abeilles quand elles piquent elles meurent.

Ce processus permet d’extraire le venin d’un lot de scorpions (32) de la même espèce en même temps tout en préservant la sécurité de ces scorpions d’une part, et en fournissant du venin en grande quantité et de bonne qualité d’autre part.

Une invention de ce type se mesure aussi aux possibilités de commercialisation qu’elle offre. Qu’en est-il pour ce système robotique pour l'extraction du venin scorpionique ?

C’est vrai. Souvent on reproche aux laboratoires de réaliser des recherches qui n’atteignent jamais la phase d’industrialisation.

Depuis l’obtention de ce brevet, qui atteste de la qualité et du caractère sérieux du travail, l’équipe composée de Mouad Mkamel, doctorant, Pr. Omar Tanane, co-directeur de thèse et Pr. Rachid Saile, directeur du laboratoire de Biologie et Santé de la Faculté des Sciences Ben M’Sik relevant de l’université Hassan II, a reçu beaucoup de demandes des industriels à l’international notamment de l’Amérique latine et de l’Europe.

Ces industriels focalisent sur deux points, à savoir comment passer des commandes de venin après avoir vérifié qu’il est de qualité et comment acquérir ce robot inventé.

L’avenir est prometteur et l’université peut être fière d’être derrière cette invention vu qu’on est dans le transfert de la technologie.

Au niveau national, l’équipe veut participer grâce à du venin de bonne qualité à atténuer l’impact des envenimations par piqûre de scorpion, en contribuant à la production des antidotes de bonne qualité et en aidant le ministère de la santé à mettre en place des projets au niveau des régions les plus touchées du Maroc.

Quels sont aujourd’hui les prérequis pour l’aboutissement de la recherche scientifique au sein des universités ?

Comme tout sujet de recherche, ce n’est jamais un hasard. En plus d’un laboratoire qui a de la notoriété comme le cas du laboratoire de Biologie et Santé de la Faculté des Sciences Ben M’Sik, le doctorant doit être motivé autour d’un sujet fédérateur. C’est l’élément clé et c’est le cas avec Mouad Mkamel.

Mouad Mkamel, doctorant à l’origine de la thèse qui a permis d’aboutir à cette invention, est né au milieu des scorpions et il les manipule comme on manipule des petites fourmis.

Il est très agile et a une grande passion pour les scorpions.

Cette passion l'a poussé à persévérer dans la mesure où après avoir obtenu sa licence (PhD) à la faculté de Ben Msick, il a insisté pour faire un master et un doctorat dans le but d’aller le plus loin possible.