De pain, d’huile et de cinéma, et gendre d’un président français – Par Hatim Betioui

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À Paris, Mohamed, ici avec Mazarine Pingeot, a continué à suivre les dernières productions du cinéma mondial, faisant des salles de cinéma son refuge chaque fois qu'il ressentait de la nostalgie pour sa ville et pour son pays.

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Un jour de juillet 1985, mon ami Mohamed Ulad Mohand et moi avons quitté le port de la ville marocaine de Tanger à bord du bateau "Bismillah", en direction du port d'Algésiras en Espagne. De là, nous avons pris le train en direction de la capitale française, Paris, afin d'explorer la possibilité d'étudier le journalisme et le cinéma. Nous venions d’obtenir notre bac.

Nous savions que le délai d'inscription dans les universités françaises était passé, et combien même réussirions-nous à nous inscrire, nos chances de bénéficier d’une bourse d'études étaient nulles. En principe nous devions effectuer une préinscription via l'ambassade de France à Rabat au milieu de l'année scolaire. Pour pallier le problème, Mohamed Benaissa, alors ministre de la Culture et maire d'Asilah, avait laissé une recommandation à notre sujet auprès de M. Abdelkader El Jay, à l’époque deuxième homme de l'ambassade du Maroc à Paris, espérant qu'il pourrait nous aider à nous inscrire dans une université.

Le conseil de Paris

Plus tard, M. El Jay est deviendra ambassadeur du Maroc au Sénégal, puis porte-parole du ministère des Affaires étrangères sous le ministre défunt Abdellatif Filali.

Il nous a accueillis chaleureusement, mais dès le début, il nous a signifié que nous étions en retard pour l'inscription et qu'il serait préférable pour nous de retourner au Maroc et de manger du pain et des olives avec nos parents plutôt que de rester ici sans bourse, afin de ne pas subir les humiliations qui seraient alors inhérentes à notre situation en France. La réponse de mon ami Mohamed au diplomate marocain fut sarcastique: "Je veux manger du pain et des olives ici", tandis que pour ma part j'ai décidé de rebrousser chemin pour poursuivre mes études universitaires à Rabat.

Mohamed est resté à Paris, préférant l'aventure pour réaliser son rêve, tandis que j'ai reporté le mien à plus tard, Londres devenant ma prochaine destination, où j'allais entamé quelques années plus tard une carrière professionnelle remarquable dans les bureaux du journal "Asharq Al-Awsat" sur High Holborn Street. Mais c'est une autre histoire dont ce n'est pas l'espace d’en parler.

Mohamed est resté entre les salles de cours et les salles de cinéma à la recherche de lui-même, persévérant pour réaliser ses ambitions cinématographiques. Quelques années plus tard, Mohamed a remporté le prix du meilleur jeune producteur en France, d'une valeur de 300 000 francs français, et il a commencé à marcher fermement vers le monde de la célébrité.

Au Cinéclub d’Asillah

Le parcours de Mohamed vers succès n'a été facile ni devant quelque chose à un coup de chance, mais le résultat d’une persévérance et d'une volonté à toute épreuve. Depuis qu'il était étudiant dans sa ville natale d'Asilah, il était connu pour sa passion et son amour pour le cinéma, fortement influencé par le mouvement de la "Nouvelle Vague" dans le cinéma français et s’arrangeait régulièrement pour ne manquer aucun numéro du magazine "Cahiers du Cinéma". Il fut aussi l'un des responsables du cinéclub de la ville.

Mohamed ne faisait pas mystère de son ambition de devenir un nom célèbre dans le cinéma, répétant sans cesse à ses amis et confrères qu’il voulait devenir ‘’l'Éric Rohmer ou le Jean-Luc Godard du Maroc."

Gendre du président français

À Paris, Mohamed a continué à suivre les dernières productions du cinéma mondial, faisant des salles de cinéma son refuge chaque fois qu'il ressentait de la nostalgie de la nostalgie pour sa ville et pour son pays.

Mohamed n'a pas négligé le travail pratique en parallèle avec les études théoriques. Il a participé à la réalisation de films documentaires, travaillé comme figurant dans plusieurs œuvres françaises, contribuant également à de nombreuses œuvres nécessaires à la production cinématographique.

Mohamed s'est ensuite marié avec Mazarine Pingeot, la fille du défunt président français François Mitterrand, et ils ont eu trois enfants, Astor, Tara et Marie, avant de se séparer.

Mohamed a rencontré Mazarine en 2001 dans un lieu qu'il considère comme l'un des plus beaux au monde, la Villa Médicis à Rome, qui offre un prix de résidence aux artistes, réalisateurs, écrivains et musiciens talentueux. Mazarine y était présente avec sa mère.

Mohamed est-il tombé amoureux d'elle au premier regard ? Mohamed dit que l'amour au premier regard est très rare, expliquant dans une interview que j'ai réalisée avec lui et publiée dans le journal "Asharq Al-Awsat" le 25 novembre 2009, que cela "s'est produit progressivement, nous sommes d'abord devenus amis", avant de se raviser et de dire : "Je pense que cela concerne notre vie privée, et je ne pense pas que cela intéresse les lecteurs."

Mazarine Pingeot était l'un des secrets de la République française. Ce n’est qu’après avoir été atteint d'un cancer de la prostate et que ses médecins lui ont dit que la maladie avait pris le dessus, que président Mitterrand a reconnu en 1994 sa fille Mazarine, qu'il avait eue avec son « amour caché », Anne Pingeot, longtemps directrice de l'unité de sculpture au Musée d'Orsay à Paris.

Asilah, leur nid d’amour

Mohamed et son ex-épouse Mazarine ont veillé à passer leurs vacances d'été dans leur maison située dans la vieille ville d'Asilah, où ils ont reçu un jour le secrétaire général du Parti socialiste français, François Hollande, quelques mois avant sa candidature à la présidence de la République, accompagné de sa compagne Valérie Trierweiler, ancienne journaliste du magazine "Paris Match". Ils fréquentaient ensemble le célèbre restaurant "Casa Garcia". C’est sur l'une des plages d'Asilah que les paparazzi avaient pris des photos de François Hollande et de sa nouvelle compagne. La publication de ces photos est pour beaucoup dans la décision de son partenaire et mère de ses quatre enfants,S égolène Royal, de lui demander de quitter la maison familiale.  Candidate alors contre Nicolas Sarkozy à la présidence, elle adresse une requête à l’agence de presse française AFP : "Si vous pouviez éviter, dans vos dépêches, de présenter François Hollande comme mon compagnon… Ce n'est plus le cas". Bien plus tard elle expliquera : "J'ai demandé à François Hollande de quitter le domicile, de vivre son histoire de son côté, désormais étalée dans les livres et les journaux, et je lui ai souhaité d'être heureux.’’

Une ville socialiste française…

Avant la visite de Hollande à Asilah, le célèbre ministre de la Culture sous le président Mitterrand, Jack Lang, y était passé plusieurs fois, tout comme le ministre des Affaires étrangères de la France sous le président Jacques Chirac, Hubert Védrine, pour participer à l'une des éditions de le Moussem culturel international.

Enfin, il se trouve que j'ai rencontré lors d'une occasion à Asilah l'ancien directeur du Fonds monétaire international et ministre de l'Économie et des Finances dans le gouvernement socialiste de Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn.

Les circonstances ont conduit Strauss-Kahn à s'asseoir à côté de moi, et je me suis penché vers lui en chuchotant : "Bienvenue à Asilah, je suis l'ami de notre amie commune, untelle", et il a été heureux de me rencontrer. Puis j'ai ajouté : "Monsieur Dominique, Asilah est une ville socialiste française par excellence", il a esquissé un léger sourire, comme pour dire : "En effet, ils sont tous passés par là."

La différence entre lui et eux est qu'il a décidé, avec son épouse marocaine Myriam Loufir, de construire une maison dans les environs d'Asilah où ils pourraient se retirer pour se reposer et trouver la paix et la tranquillité chaque fois que le bruit du monde, le tumulte de la politique et sa tromperie les épuisent.

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