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Foot : comment Hasna Doumi, première entraîneure d'une équipe masculine au Maroc, a sauvé son club
Une photo prise le 18 mai 2023 montre l'entraîneur Hasna Doumi dirigeant une séance d'entraînement pour l'équipe de football Ittihad Riadi Fkih Ben Salah dans la ville de Fkih Ben Salah. Doumi est devenue la première femme à entraîner une équipe de football masculine, lorsqu'elle a été nommée entraîneur de l'équipe Ittihad Riadi dans le championnat national amateur du Maroc. (Photo by FADEL SENNA / AFP)
Par Kaouthar OUDRHIRI (AFP – Bureau de Rabat)
"Les femmes sont tout aussi capables, il faut juste leur donner l'opportunité", croit dur comme fer Hasna Doumi, devenue à 29 ans la première entraîneure d'une équipe masculine dans l'histoire du football marocain.
Cette ancienne joueuse de haut-niveau est, depuis mars, à la tête de l'Ittihad Riadi Fkih Ben Salah (IRFBS), qui évolue en quatrième division marocaine
Sur le modeste terrain de Fkih Ben Salah (centre du pays), Hasna Doumi, toute vêtue de noir, casquette vissée sur la tête et son sifflet jamais loin, semble avoir pris ses marques.
Elle donne le "la" à ses joueurs, très attentifs et appliqués, dans une ambiance bon enfant.
"C'est un honneur d'être la première entraîneure d'une équipe masculine au Maroc, une fierté aussi pour mes parents qui m'ont toujours soutenue", assure-t-elle à l'AFP.
A travers cette consécration dans une société aux mœurs conservatrices, elle souhaite faire passer un message aux responsables du football : "il faut faire confiance aux femmes, car nous avons des entraîneures très compétentes", plaide celle qui enseigne aussi l'éducation physique.
"Navire à flot"
La preuve, à son arrivée il y a trois mois, le club était 13e et menacé de relégation.
Et quand on lui a proposé le job, "il y avait une grande appréhension de ma part, l'équipe était au fond du classement. Une vraie bombe à retardement", raconte la jeune femme.
Hasna Doumi prend les choses en main et son équipe engrange sept victoires et deux nuls, soit 23 points, "un record dans le championnat amateur", se réjouit le directeur technique du club, Abderrahim El Khadimi, soulagé qu'elle ait "remis le navire à flot".
L'Ittihad a terminé la saison en milieu de tableau.
Du côté des joueurs, le soulagement est partagé.
"Elle est arrivée à un moment critique, on a travaillé main dans la main et on a surmonté les difficultés", explique le capitaine Abdelhadi Bennane, en concédant que la nomination de Hasna Doumi a été "une surprise".
"Elle a une forte personnalité. Elle est à l'écoute et finalement le fait qu'elle soit une femme a changé beaucoup de regards", admet le joueur de 28 ans. Même si de son point de vue, "qu'elle soit une femme ou un homme ne fait pas une grande différence".
Malgré sa jeunesse, "coach Hasna" a déjà une belle carrière derrière elle. En tant qu'entraîneure, elle a officié à la tête d'équipes locales féminines ou de jeunes avant d'encadrer, mais comme adjointe seulement une section masculine de l'Olympique Fkih Ben Salah, autre club local.
Et comme joueuse, elle a intégré dès 2009 l'élite du championnat féminin.
Relents misogynes
"Le foot est un amour que je cultive depuis ma tendre enfance", dit-elle.
Après avoir réalisé son "rêve" de le pratiquer, elle a choisi "le coaching pour rester proche des terrains".
Ses modèles ? L'Espagnol Pep Guardiola, entraîneur de Manchester City qui vient de remporter le Championnat d'Angleterre et qui va disputer la finale de la Ligue des champions, le Franco-Marocain Walid Regragui, qui a mené le Maroc en demi-finale du Mondial-2022, mais aussi Lamia Boumehdi, l'entraîneure marocaine de l'équipe féminine du club congolais du TP Mazembe.
Une passion minée toutefois par des relents de misogynie.
"La seule difficulté pour moi est le regard de la société. Le foot, c'est pour les hommes, disent-ils", déplore la coach.
"Dans la vraie vie, personne n'ose me critiquer, c'est plutôt sur les réseaux sociaux, derrière des écrans, qu'ils se lâchent et m'insultent", opine-t-elle.
Hasna Doumi estime néanmoins que "les lignes bougent" dans l'euphorie suscitée par l'épopée historique des Lions de l'Atlas lors de la Coupe du monde au Qatar.
"J'ai remarqué un nombre de plus en plus important de femmes qui souhaitent s'engager dans le football", relève-t-elle, avant de les encourager: "Si vous avez un objectif en tête, il faut se battre pour l'atteindre, avec de l'envie et de la détermination vous allez y arriver".