Actu
L'Allemagne légalise le cannabis récréatif avec une des lois les plus libérales d'Europe
Un employé vérifie la qualité des plants de cannabis (marijuana) dans une serre sur le site de production de la société pharmaceutique allemande Demecan pour le cannabis médical à Ebersbach près de Dresde, dans l'est de l'Allemagne, le 28 novembre 2022. Projet phare - et controversé - de la coalition d'Olaf Scholz, la légalisation partielle du cannabis à des fins récréatives entrera en vigueur le 1er avril 2024 en Allemagne. (Photo JENS SCHLUETER / AFP)
Acheter du cannabis ou en cultiver chez soi pour son bon plaisir, ce sera possible dès le 1er avril en Allemagne, où le parlement a définitivement voté vendredi, après d'intenses débats, une des législations les plus libérales d'Europe.
Cette loi phare pour le gouvernement du chancelier social-démocrate (SPD) Olaf Scholz a été adoptée - 407 voix pour, 226 voix contre -, après avoir fait l'objet de nombreuses critiques et d'un débat houleux au Bundestag, la chambre basse du parlement.
La réglementation prévoit d'autoriser l'achat de cannabis en quantité limitée de 25 grammes par jour maximum par le biais d'associations à but non lucratif. Il sera également possible de cultiver jusqu'à trois plants pour son propre usage.
La possession et la consommation de cette drogue resteront toutefois formellement interdites pour les jeunes de moins de 18 ans.
"Légalisez le chanvre !"
Avec cette nouvelle loi, l'Allemagne emboîte le pas à Malte et au Luxembourg, qui ont légalisé le cannabis récréatif respectivement en 2021 et en 2023.
"La situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement n'est en aucun cas acceptable", a déclaré avant le vote le ministre de la Santé et médecin Karl Lauterbach (SPD), évoquant un "marché noir criminel préoccupant" et défendant bec et ongles son texte face aux assauts de la droite (CDU) et de l'extrême droite (AfD).
Pour la députée CDU Simone Borchardt, cette loi est "une perche tendue à chaque dealer".
Les Verts ont appelé à "légaliser le chanvre", une revendication de longue date de certains courants du parti ayant même figuré dans une chanson allemande éponyme, populaire dans les années 2000, qui mêlait à des rythmes reggae la voix d'une figure du parti écologiste, Hans-Christian Ströbele.
Ce texte a fait l'objet de dissensions au sein du gouvernement tripartite : des résistances sont apparues parmi les sociaux-démocrates (SPD, le parti du chancelier), tandis que les Verts et les libéraux du FDP, leurs partenaires au sein du gouvernement, se sont montrés plutôt favorables.
Cette réforme a par ailleurs suscité de nombreuses critiques, notamment de la part des associations médicales et du pouvoir judiciaire.
La loi actuelle prévoit une amende et, dans les cas les plus graves, jusqu'à des peines de prison, pour possession de cannabis.
"Cannabis-clubs"
Les Allemands semblent quant à eux plutôt divisés sur la question : selon un sondage YouGov publié vendredi, 47% des personnes interrogées sont favorables à la légalisation et 42% défavorables.
La réforme doit, d'après le gouvernement, permettre de lutter plus efficacement contre le marché noir, un point contesté par l'opposition conservatrice, les syndicats de policiers et certains députés du SPD.
La consommation reste interdite à proximité de mineurs, d'écoles, de crèches et d'installations sportives. La culture et la distribution de cannabis ne seront pour leur part possibles qu'à partir du 1er juillet via des associations appelées des "Clubs de cannabis".
Ces clubs pourront vendre un maximum de 25 grammes par jour et pas plus de 50 grammes par mois à leurs membres, 500 personnes tout au plus. Seuls les adultes pourront en devenir membres. Entre 18 et 21 ans, ils ne pourront obtenir que 30 grammes par mois de cannabis avec un taux de principe actif THC limité à 10%.
Ces clubs seront également chargés de distribuer graines et boutures de cannabis à leurs membres pour la culture à domicile, à hauteur d'un maximum de sept graines ou de cinq boutures.
Reconnaissant qu'une surconsommation de cannabis pouvait être "dangereuse" pour les jeunes, dont le cerveau se développe jusqu'à 25 ans, le ministre de la Santé a fait savoir qu'une campagne sensibilisation allait être mise en place.
Dans un deuxième temps, la vente devrait être légalisée dans des magasins spécialisés dans le cadre d'une nouvelle loi qui permettra de d'abord tester ce procédé dans certaines régions, pas encore désignées, pendant cinq ans. (AFP)