billet
On a fini par s’y habituer, mais la menace terroriste, bien là, se perfectionne
Abdelhak El Khayam, fait dans l’humour. La cellule terroriste que son Bureau vient de mettre hors d’état de nuire aura été la dernière à faire allégeance à El Baghdadi, qui n’en finit pas de mourir, juste quelques jours avant l’annonce de sa liquidation physique par le président américain Donald Trump.
En dehors de ça, le patron du Bureau Central d’investigation Judiciaire (BCIJ) n’a aucune envie de rire.
Les sept présumés terroristes n’appartiennent pas à la catégorie des hommes suicides. Une fois leurs forfaits perpétrés, ils comptaient se replier sur une « base » arrière où ils espéraient certainement attirer à eux des candidats au jihad.
Dans leur forme, ces arrestations s’inscrivent dans ce qui est devenu, à la longue, pratiquement une information banale : Une opération de l’ordre de « l’action proactive » du BCIJ qui tombe sur le fil si régulièrement qu’on n’y fait plus attention.
On vaque à ses occupations quotidiennes, l’antiterrorisme marocain veille. On oublie juste ce qu’en a dit André Malraux il y a plus de soixante ans : « le terrorisme provoque la répression, la répression organise le terrorisme. »
La cellule dont le démantèlement a été annoncé vendredi dernier représente une mutation qualitative dans ses méthodes aussi bien que dans ses objectifs. Abdelahk El Khayam, dans sa conférence de presse, tout comme le porte-parole de la DGSN, Boubker Sabik, sur 2M, resteront silencieux sur les cibles qualifiées « d’infrastructures sensibles et de sites stratégiques ». Mais l’impressionnant lot de matériels découvert « dans un abri sûr » à Tamaris et au domicile du chef de la cellule dans la même région indiquent que les présumés terroristes entendaient s’attaquer à de « gros morceaux ».
On y retrouve l’arsenal classique du « terroriste parfait », mais primaire. Deux fusils, trois pistolets automatiques, diverses munitions, des ceintures pour cartouches, des armes blanches de grande taille, des sacs en plastique de contenant des produits chimiques suspects pouvant entrer dans la confection des explosifs…
Mais fait inédit, outre la présence de trois maitres-nageurs au sein de la cellule, le BCIJ a découvert un important matériel de plongée sous-marine : un zodiac,des gilets de sauvetage, des paires de palmes, des montres, de lampes torches et masques de plongée, une caméra de plongée … De là à les voir s’en prendre à un port ou faire couler un navire à quai ou encore à se faufiler par voie maritime dans des sites stratégiques, il n’y a pas qu’un pas qui n’exige pas une imagination exubérante.
Les sept présumés terroristes, qui étaient en relation avec un Syrien activement recherché, n’appartiennent pas à la catégorie des hommes suicides. Une fois leurs forfaits perpétrés, ils comptaient se replier sur une « base » arrière dans la région d’Ouazzane où ils espéraient certainement attirer à eux des candidats au jihad, déclarés ou en latence, pour entreprendre autre chose qu’une action déstabilisatrice mais ponctuelle.
La démarche n’est pas innovante. Une partie de la gauche et de l’extrême gauche l’ont bien conçue et tentée dans les années soixante-dix du siècle dernier. Sans grande réussite. Sauf qu’aujourd’hui la configuration sociale du Maroc et la pensée qu’elle charrie est totalement différente. Pour plus d’un millier de présumés terroristes en détention, combien y a-t-il de « porteurs sains » qui gambadent dans la nature ? Sans compter le potentiel que constituent naturellement les mouvances islamistes légales ou tolérées qui génèrent, elles aussi, leurs propres déçus.