chroniques
Pour un serment d’humilité et d’humanité
*Ancien ambassadeur, Rachid Idrissi Kaitouni a ?t? secr?taire g?n?ral de la Chambre des repr?sentants
Apr?s qu'ils nous aient gratifi?s de congr?s exp?ditifs ou de sessions extraordinaires de leurs parlements respectifs; les Partis Politiques nous ont train? dans une gageure au sujet des prochaines ?lections l?gislatives, sans nous fournir, pour autant, ni les ?l?ments d'appr?ciations relatifs, ? l'aune de la nouvelle constitution, de leur pratique institutionnelle, ni dans quelle perspective ils envisageaient nous embarquer pour les cinq prochaines ann?es et encore moins sur la typologie d'alliances et de programmes de gouvernement qu'ils comptent nous soumettre pour les l?gislatives du 7 octobre prochain. Tout porte ? croire, jusqu'? pr?sent, que les faits divers et les chicaneries l'emportent sur tous les autres d?bats : l'?pisode du Caid de ...?clipsait pour un moment m?me les d?veloppements de l'affaire du Sahara au conseil de s?curit?. Les grands probl?mes de soci?t? sont rel?gu?s derri?re les cimes au b?n?fice des tornades politico-m?diatiques administr?es et g?r?es pour des besoins apparemment aussi ?quivoques que d?l?t?res. Nous n'avons pas besoin de savoir si la m?re de tel ?tait vendeuse d'?ufs ou que celle de l'autre recevait des cadeaux de SM le Roi. Pas plus qu'il n'?tait important de connaitre si un ministre avait eu son baccalaur?at ou que la fille du chef du gouvernement a ?t? admise aux concours de la fonction publique dans les r?gles qu'imposent la d?ontologie la plus ?l?mentaire. Si bien que certains proc?d?s l?gislatifs et r?glementaires ?de nature ? indisposer particuli?rement la vie politique s??clipsent au profit des pol?miques aussi inutiles que st?rilisantes.? Il en est ainsi de l'amendement de la loi organique visant ? permettre aux partis politiques de se constituer en coalition avant les scrutins. Il cr?e une ambigu?t? patente au regard de l'article 47 de la constitution. Ce dernier ne souffre d'aucune ?quivoque concernant la nomination du chef du gouvernement. L'amendement en question ne vient ni expliquer ni prolonger l'article 47 de la constitution. Il le contredit dans le sens o? m?me si la coalition arrive en t?te des suffrages en si?ges; le chef du gouvernement ne peut-?tre d?sign? que s'il appartient ? la formation politique ayant recueilli le plus grand nombre de d?put?s ?lus au vue de l'ensemble du scrutin. C'est ? ce moment que, r?ellement, la femme ou l'homme d?sign? ? la chefferie du gouvernement s'?chine ? constituer une majorit? de nombre et non pas une majorit? d'id?es. Pour rendre lisible cette articulation, seule une r?vision de la constitution pourrait mettre ? l'ordre du jour cette subtilit? qui a ?chapp?, entre autres, ? la vigilance des r?dacteurs de la charte fondamentale.?A elle seule, m?me si cette r?forme venait ? pallier ce glissement, dans la pratique, le mode de scrutin s'est constamment configur?, d'une part, pour ne permettre, jusqu'? lors, ? aucun parti politique d'exercer seul une h?g?monie sur la sc?ne politique. D'autre part, il impose au chef du gouvernement d?sign? de recourir aux forces d'appoint pour constituer, dans les meilleurs des cas, une majorit?. Ce qui revient ? dire que la coalition n'est qu'une majorit? ?ph?m?re de part sa composition num?rique et al?atoire aux vues de son programme ?tabli dans la pr?cipitation entre le moment de la nomination du gouvernement et lorsque celui-ci?re?oit la confiance des d?put?s. Enfin, si le l?gislateur s'est organis? pour ?viter la transhumance des parlementaires; cette pratique permet paradoxalement la migration de partis politiques en totalit? du gouvernement vers l'opposition et de l'opposition vers le gouvernement. Le scrutin majoritaire ? deux tours reste la r?ponse la plus adapt?e ? la constitution de coalitions gouvernementales d'id?es au d?triment de celles du nombre. Il a l'avantage de fixer les coalitions par le biais du d?sistement r?ciproque ou par le recours au candidat commun.
Les promoteurs ayant r?v? d'une nouvelle soci?t? politique d?barrass?e des tenants du compromis historique n'ont r?ussi ni ? endiguer l'avanc?e de l'islamisme, ni ? forger un outil capable d'imposer une dualit? politique cons?quente, m?me lorsque l'Istiqlal et l?USFP ont perdu de leur verve.
Jusqu'? aujourd'hui, cette strat?gie fait la part belle au PJD auquel le PAM ne semble servir, en d?finitif, que de courte ?chelle lui permettant ? se hisser ? la t?te des ?lections alors qu'initialement il s'est donn? pour t?che essentiel de le combattre.
La m?me d?marche n'est pas sans rencontrer de grandes difficult?s lorsqu'il s'agit d?accoucher d'une nouvelle bourgeoisie. Les tenants du Capital seraient-ils plus vigilants que les leaders politiques de lIstiqlal et l'USFP ! La v?rit? c'est que personne n'a envie d'oblit?rer sur la place publique ses titres ni de faire valoir ses engagements ? travers les v?ritables probl?mes politiques et de soci?t?.?
La c?l?bration des ?l?ves les plus performants du baccalaur?at a jet? le voile sur les questions fondamentales tels que l'enseignement ou le ch?mage des jeunes. Aucun leader politique n'a r?ellement abord? ces probl?mes, m?me lorsqu'il est invit? ? animer des conf?rences dans des ?tablissements d'enseignement ou de formation des cadres durant tout le mois du ramadan. La pol?mique s'appropriait l'essentiel du d?bat devant la question institutionnelle que tout le monde feint d'ignorer. Pour unanime qu'elle fut admise et adopt?e, la constitution n'en demeure pas moins compliqu?e dans sa pratique et ses articulations. Elle installe tous les acteurs politiques dans l'enfermement et la difficult? d'agir au quotidien. Le syst?me politique n'a besoin ni de tuteur, ni de protecteur pour se consolider o? se maintenir. L'engagement patriotique ne peut se r?aliser ni dans le d?nigrement ni dans l'exclusion. Il a ses propres voies d'acc?s et ses ressources propres. La soci?t? civile ne se substituera pas aux partis politiques pas plus que les syndicats ou le patronat ne seront admis ? dicter leurs lois en tous lieux et en toutes circonstances.
Le Maroc est debout depuis plus de douze si?cles et ne se perp?tuera qu'en se r?formant et en impulsant la r?forme. Tout le monde est t?moin des progr?s r?alis?s et tout un chacun retient son souffle devant tout ce qui reste ? faire face ? des besoins et des exigences de prime abord indomptables. L'autisme ne peut se faire valoir d'aucune th?orie politique et ne conduit qu'? l'errance et ? l'?chec. Il reste que pour sortir de cet enclavement et apaiser les tourments qui s'annoncent ? l'horizon du 7 octobre, un serment d'humilit? et d?humanit? ouvrirait grande la voie de l'espoir . L'exception marocaine, dans ce cas, aurait alors acquis toutes ses lettres de noblesses...