Santé
Le traitement des cancers en 2022, quoi de neuf au Maroc, docteur ?
Seuls deux pays Africains possèdent la dernière technologie dans le traitement des cancers. L'Afrique du Sud et le Maroc
Chaque année le 4 février, pour la Journée mondiale contre le cancer, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC) soutiennent l’Union internationale contre le cancer (UICC) pour promouvoir les moyens de faire reculer la charge de morbidité imputable à cette maladie.
Qu’en est-il au Maroc en 2022 ?
Www,quid.ma, fait le point avec deux cancérologues marocains. Dr Ikram NEJJAR, radiothérapeute et Dr Mounir BACHOUCHI, Oncologue-chimiotherapeute.
Les traitements contre les cancers ne cessent d’évoluer. La chirurgie carcinologique est de plus en plus affinée. Les molécules de chimiothérapie sont de plus en plus ciblées avec moins d'effets secondaires.
La radiothérapie est de plus en plus précise, de plus en plus puissante et efficace, au point qu’elle joue également le rôle de la chirurgie. Explications
Dans le traitement des cancers, les plus grandes avancées en matière de radiothérapie ont été obtenues en radiochirurgie et en radiothérapie stéréotaxique.
C’est une technique de radiothérapie non invasive, de haute précision et sans chirurgie.
En quelques séances, cette technique permet de délivrer aux tumeurs malignes de petite taille, des doses curatives, tout en préservant les tissus sains avoisinants, indique Dr Ikram NEJJAR, Cancérologue et radiothérapeute au centre d’oncologie 16 novembre de Rabat
Cette technique est particulièrement utile pour traiter des tumeurs profondes pour lesquelles il serait trop dangereux de réaliser une intervention chirurgicale. Contrairement aux radiothérapies classiques, la radiochirurgie nécessite très peu de séances.
La radiochirurgie n’est pas adaptée à tous les types de tumeurs. Elle est réservée aux tumeurs de petite taille. Il peut s’agir notamment des méningiomes, des neurinomes, de certaines métastases isolées et des tumeurs qui se développent au niveau de l’hypophyse.
Elle ne peut pas être utilisée pour traiter les tumeurs étendues ou infiltrantes, comme le glioblastome, ni les tumeurs trop proches de certaines zones sensibles, notamment les nerfs optiques.
Mais avant d’aller plus loin, il faut préciser que la radiothérapie est un traitement locorégional basé sur l’utilisation des rayonnements ionisants (rayons).
Ces derniers détruisent les cellules cancéreuses et certaines tumeurs bénignes.
Son rôle incontournable en cancérologie s'inscrit toujours dans un contexte de stratégie multidisciplinaire.
La radiothérapie est souvent associée à la chirurgie et aux traitements systémiques (Chimiothérapie, thérapies ciblées, immunothérapie). Elle peut être exclusive dans certaines situations cliniques.
La radiothérapie a énormément évolué depuis ces dernières années grâce aux progrès de l’imagerie et de l'informatique.
Les plus grandes avancées en matière de radiothérapie ont été réalisées en radiochirurgie et en radiothérapie stéréotaxique.
Il s’agit d’une technique de radiothérapie non invasive (sans chirurgie) de haute précision. Elle permet en quelques séances, de délivrer aux tumeurs de petit volume, les doses thérapeutiques nécessaires. Tout en gardant intact les parties saines avoisinantes.
Elle a facilité le traitement de lésions inaccessibles à la chirurgie notamment en neurochirurgie où les séquelles sont parfois très lourdes à gérer après un acte chirurgical réalisé au niveau du cerveau.
Le but thérapeutique de la dernière génération des appareils de radiothérapie, qui font fonction d’acte chirurgical sans ouvrir le crâne, est de détruire la tumeur en causant le moins d’effets secondaires possibles.
La dose délivrée à chaque séance est plus élevée que lors de la radiothérapie classique. Cette dernière nécessite des durées de traitement étalées sur plusieurs semaines.
Cette courte durée de traitement associée à une efficacité accrue sans séquelles sont des arguments de poids dans le développement de cette technique.
L’indication d’une radiochirurgie est posée par un comité pluridisciplinaire de décision thérapeutique.
Sa mise en place suppose que le radiothérapeute et son équipe disposent de moyens d’imagerie adaptés ( scanner 4 D , IRM , Pet scanner ) ainsi que du matériel spécifique pour immobiliser le patient (moyens de contention dédiés à la stéréotaxie).
Car, il est impératif de prendre en compte les mouvements des cibles à traiter grâce aux systèmes d’imagerie et de recadrage tels que le gating pour adapter la balistique aux mouvements respiratoires.
Le gating est un système qui, au cours d’une radiothérapie, permet d’arrêter et de reprendre l’irradiation en suivant la respiration ou les battements du cœur.
De même, il faut avoir à portée de main, la technique du « tracking », afin de pouvoir suivre les mouvements de la tumeur par le faisceau d’irradiation lui-même au niveau d’organes mobiles tels que le foie ou la prostate, précise Dr Mounir BACHOUCHI, Médecin oncologue et Directeur du centre d’oncologie 16 novembre de Rabat.
Il faut savoir qu’aujourd’hui, il existe des machines de traitement conçues et dédiées à cette technique telles que le Gammaknife, le Cyberknife , le Novalis et plus récemment l’ EDGE.
Ces appareils de radiothérapie permettent de délivrer la dose à l’aide de mini-faisceaux dans différents plans de l’espace avec une précision inframillimétrique.
Ainsi, la radiochirurgie peut être indiquée pour traiter des localisations cancéreuses extra-crâniennes telles que les cancers du poumon, du foie, du pancréas, de la prostate ainsi qu’aux métastases pulmonaires, hépatiques, osseuses, et ganglionnaires, relevé Dr Ikram NEJJAR
Cette nouvelle technique de radiothérapie permet aussi la réirradiations en cas de rechute localisée, sans toucher aux tissus avoisinants sains.
Le dernier né de cette technologie est une machine dédiée à la radiochirurgie intra et extra crânienne.
Grâce au système Identify, il permet un meilleur repositionnement du patient avec une sécurité optimale du traitement en SGRT (Surface guided radiation therapy). C’est un système qui permet de détecter tout mouvement de la position du patient en cours de traitement et agit en conséquence.
Cet appareil est équipé d’un système de tracking : Calypso. Il permet de traiter des cibles mobiles telles que les cancers prostatiques, pulmonaires et hépatiques grâce à l’insertion dans ou à proximité de la tumeur de transpondeurs radio opaques qui émettent des ondes électromagnétiques qui seront repérées par et suivis pendant la séance de traitement via des caméras et un système ayant les propriétés d’un GPS.
De même, la dernière génération des appareils de radiothérapie est également équipée du système Hyperarc qui permet le traitement en une seule et même séance de multiples localisations métastatiques cérébrales.
La radiochirurgie se positionne aujourd’hui comme un élément incontournable dans les traitements ciblés et personnalisés des cancers.
Et espérons qu’avec la généralisation de l’assurance maladie, un grand nombre de Marocains et de Marocaines atteints par ce mal, puisse bénéficier des dernières possibilités thérapeutiques offertes dans notre pays.