chroniques
Où sont les partis ?
Ce que l’on demande aux partis, c’est de créer du sens en réfléchissant aux questions de développement, de proposer des stratégies locales, régionales et nationales et de sélectionner des hommes et des femmes pouvant les défendre, les mettre en œuvre
Le Roi Mohammed VI a reçu les ministres de l’Économie et de l’Intérieur qu’il avait chargés d’enquêter sur les blocages du projet « Al Hoceima Manarat Al Moutawassit ». Il a convoqué le chef du gouvernement, mais aussi le président de la Cour des comptes, Driss Jettou. Selon le communiqué du Cabinet Royal, les conclusions du rapport notent des retards dans l’exécution et parfois l’inexistence d’un début d’exécution, mais sans suspicion de détournement. Pour en avoir le cœur net, le Chef de l’État a demandé à la Cour des comptes, de vérifier la chose et ce, dans un délai de dix jours.
Nous sommes devant un exercice démocratique, où le Roi, le Chef de l’État, use de ses pouvoirs, tout en respectant le rôle de toutes les institutions tel que fixé par la Constitution. Tout cela est né du discours du Trône, très fort, qui a mis chacun devant ses responsabilités et en particulier, les partis politiques.
Qu’ont-ils fait depuis ce discours ? Rien, à part saluer la teneur de ce discours. En toute responsabilité, ceci aurait dû les inciter à entamer une opération de mutation de leur mode de fonctionnement, d’un redressement vers leur rôle constitutionnel et d’une introspection profonde. Nous avons eu le droit à une explication, une justification, qui est une impasse. On nous répète que la faiblesse des partis est la conséquence de l’emprise du fameux « Makhzen ». Celui-ci existait de manière plus forte, dans les années 70, 80 et cela n’a pas empêché la vie partisane d’exister, y compris de manière conflictuelle. Il faut inverser la question, si des partis sont satellisés, c’est parce que leurs dirigeants l’ont bien voulu, contre des avantages, des rentes.
Aujourd’hui, nous sommes face à une situation inédite. Ce sont les partis qui dirigent et composent le gouvernement, les régions, les conseils municipaux. Ces entités sont en charge du projet de développement et en constituent l’exécutif. Nos échecs sont d’abord les leurs.
On ne peut pas imaginer un système où le Roi doit trancher pour tous les choix, partout sur tout le territoire. Ce n’est pas le sens de l’histoire et ce n’est pas ce qui est prévu par nos institutions. Se cacher derrière le « Makhzen » pour justifier l’incurie des partis, est une voie sans issue, de la lâcheté en fin de compte.
Le congrès de l’Istiqlal, une vraie honte, prouve que c’est le schéma qui a mené à la décrédibilisation des partis qui se pérennise. Ce qui se passe, ou ce qui ne se passe pas dans les autres partis, y compris le PJD, n’est pas de meilleur augure. Ils n’ont pas compris le message du discours du Trône.
Ce que l’on demande aux partis, c’est de créer du sens en réfléchissant aux questions de développement, de proposer des stratégies locales, régionales et nationales et de sélectionner des hommes et des femmes pouvant les défendre, les mettre en œuvre. Un parti, c’est d’abord une vision, un projet de société.
Que des dirigeants politiques se définissent par rapport à Abdelilah Benkirane, à ce qu’il dit, à ce qu’il fait, est un aveu de leur impuissance conceptuelle, alors que c’est un politique certes singulier par sa façon de pratiquer la politique, mais qui n’a tout de même pas l’envergure d’un Abdellah Ibrahim, d’un Bouabid, ou encore d’un Boucetta. Il n’a fait finalement que profiter du vide des autres.
La construction démocratique a besoin du renouvellement de la classe politique, c’est un impératif.