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RETOUR DE ROYAUMONT – Par Gabriel Banon
Il ne s’agit pas de prendre la moyenne des deux extrêmes, socialisme et capitalisme, mais trouver une nouvelle voie pour la société d’aujourd’hui, dans tous les domaines
Le groupe de réflexion CICERON, a été invité par le président Jérôme Chartier, à participer cette année aux Entretiens de Royaumont. https://www.entretiensroyaumont.org/ .
Une dizaine de membres a répondu à l’invitation et a pu, durant deux jours, écouter de prestigieux intervenants traiter de la thématique retenue pour cette année : « La troisième voie ».
Pour beaucoup, la troisième voie est un concept politique et économique visant à créer une philosophie qui se situerait entre la social-démocratie et le libéralisme.
Il ne s’agit pas de prendre la moyenne des deux extrêmes, socialisme et capitalisme, mais trouver une nouvelle voie pour la société d’aujourd’hui, dans tous les domaines ; politique, économique, culturelle, artistique, etc.
Durand la guerre froide, déjà on parlait de la nécessité à trouver une troisième voie entre le communisme soviétique et le capitalisme américain. En France, le gaullisme a été présenté un temps, comme une troisième voie entre les deux modèles antagonistes des grandes puissances.
Au cours des années 1990 et 2000, en Europe et aux États-Unis, les dirigeants de gauche et du centre gauche, ont développé une notion précise de troisième voie. Elle consistait essentiellement à oublier définitivement le passé communiste et l’économie administrée. On parle alors de triangulation, de realpolitik, ou de pragmatisme économique.
Le président français Emmanuel Macron et son parti La République en marche se présentent comme une incarnation de cette troisième voie, par leur rejet du clivage traditionnel gauche/droite et leur synthèse entre socialisme et libéralisme.
Perçu comme un marqueur essentiel de la gauche occidentale, l’engagement en faveur de l’égalité est ce qui a semblé faire le plus défaut aux premières énonciations de la Troisième voie.
La théorisation de l’égalité réelle des chances révèle la place relativement importante que la plupart des penseurs de la Troisième voie réservent à l’individu.
Le temps est loin où les gouvernements socialistes, sociaux-démocrates et travaillistes dominaient l’Europe des Quinze. Aux victoires qui ont émaillé les années 1990 succèdent aujourd’hui une série de défaites ou d’affaiblissements plus ou moins durables des gauches européennes.
Les questions soulevées perdurent, comme les débats autour de la troisième voie britannique, et de son caractère exportable ou non sur le continent. Le premier des mérites de cette « querelle » de la troisième voie a été de lever des tabous, particulièrement à gauche. Mais les questions sont toujours là, qui interpellent élus, responsables, militants et électeurs de gauche, tous rétifs devant l’urgente nécessité d’un aggiornamento doctrinal longtemps différé par l’exercice prolongé du pouvoir.
En France, ce problème est lui-même emblématique de ce double refus : refus de débattre sérieusement de la troisième voie, ne serait-ce que sur le plan doctrinal. Pour certains, il ne peut s’agir, au mieux, que d’un « thatchérisme à visage humain » à la fois impossible à importer et à supporter en France.
Un des intervenant aux Entretiens de Royaumont a déclaré, je cite : « la gauche a complétement disparu malgré les tentatives de la faire renaître, et le Capitalisme, le libéralisme est toujours là. »
La question qu’il faut se poser est : Pourquoi ?
Le jour où la droite a intégré le social dans son discours, elle a, de fait, vider de sa substance le discours socialiste. Rappelez-vous la déclaration de Giscard d’Estaing à Mitterrand lors de leur débat pour les présidentielles : « Vous n’avez pas le monopole du cœur ! » La messe était dite, le capitalisme prenait un visage humain et une nouvelle jeunesse.
La nouvelle voie est en réalité « un vivre ensemble » idéal que chacun imagine à sa façon. Il y a donc plusieurs voies troisièmes, selon les aspirations de chacun.
Est-ce la fin du libéralisme ? Difficile de concevoir une nouvelle forme de société, sans les libertés que le régime libéral sous-entend.
Elle est finalement la voie que l'on choisit, la voie qui répond aux aspirations de chacun. Sarah Boukri a récemment et joliment écrit : « Loin des conventions c'est la voie que nous souffle notre voix intérieure et qui nous guide, encore faut-il savoir l'écouter ! Ne pas avoir peur de se différencier, d'innover, de sortir des chemins tout tracés...c'est le début de la réussite ! »
Les modèles économiques de développement sont divers et variés, selon l’état de développement et les objectifs que se donnent les Nations. La troisième voie ne peut donc pas être universelle, mais multiple.